Au vernissage, une présence très modeste : quelques galeristes, une dizaine d’artistes de tous bords, un ou deux critiques d’art et à peine quelques amateurs. Une ambiance paresseuse qui contrastait avec la qualité exceptionnelle de l’exposition et les efforts de bon accueil et de convivialité de la maîtresse des lieux.
Depuis les années 1990, Mohsen Jeliti expose des sculptures constituées d’objets de récupération comme des roues de vélo ou des manches de scie. Ce qu’il fait n’est pas tout à fait ce nouvel art qu’on appelle Poubellisme, Trash Art et autre Garbage Art (gourbij en tunisien) dont les maîtres se trouvent en Occident, puisque Jeliti l’a accommodé avec le métal, l’argile et certains matériaux nobles : bois et pierre. Ce grand artiste compose toutes sortes de sculptures : masques, animaux, cavalier, totem, couples… Le résultat est inégal mais certaines sculptures sont d’une beauté indéniable. L’artiste affirme, un peu confusément, que certaines de ses sculptures bouffonnes sont accusatrices et dénoncent la mascarade du pouvoir. Je suis resté partagé entre les interrogations que soulève une démarche artistique aussi peu conventionnelle et l’estime pour cet artiste, inspiré, méticuleux et qui se lance sur une voie décalée par rapport au lieu dans lequel il vit et dans un art qui n’interpelle qu’un public très restreint et seulement dans les grandes capitales de l’art contemporain comme Zurich ou New York. Je me suis demandé si ce antihéros de l’art, qui lutte contre le conformisme sculptural, pouvait vraiment vendre ce genre d’œuvres éminemment avant-gardistes.
Puis m’est revenue à l’esprit cette statue en fil de fer et bois que j’avais achetée il y a plus de dix ans dans une vente aux enchères et qui porte le non significatif de Don Quichotte. Une femme de ménage me l’avait même jetée une fois à la poubelle, comme on jette tout ce qu’on n’arrive pas à identifier ! Pendant longtemps je m’étais senti moi aussi concepteur de cette statuette puisque je l’avais récupéré une deuxième fois – cet objet issu du Récup’art. J’en conclus avec certitude que son créateur ne pouvait être que ce monsieur Mohsen Jeliti, accroché à ses rêves, comme Don Quichotte. Je lui dis bravo !
Exposition personnelle du sculpteur MohsenJeliti
Exposion de groupe : Hamadi Ben saad, Jan Demeulemeester, Olivier Derveloy, Karim Falli, Amor Ghdamsi, Mourad Harbaoui, Lamine Sassi, Majed Zalila, Atef Maatallah, Ibrahim Mattoussi, Abdellaziz Mohsni.
Du 13 juillet au 30 août 2012 –
Espace Art Sadika à Gammarth – www.sadika.net — Tél : 71 913 025