L’équation impossible ? En hommage à Slim Chaker

L’équation du développement et de la sortie de la crise économique tunisienne devient de plus en plus difficile à résoudre. Une équation à laquelle s’est confronté l’ami et le ministre Slim Chaker du temps où il était en charge des Finances du pays. Ce texte rend hommage à sa détermination, son dévouement et son sens de l’Etat. Repose en paix Slim.
Le débat public en Tunisie est marqué depuis plusieurs mois par les discussions sur la crise économique que traverse notre économie et cette transition économique devenue de plus en plus problématique. La question ou l’équation que cherche à résoudre le gouvernement est relative au maintien et au renforcement de l’amélioration de la croissance enregistrée lors du premier trimestre de l’année en cours, mais qui s’est affaiblie lors du second trimestre, tout en relevant les défis des grands équilibres économiques. Une équation qui est devenue un casse-tête pour tous les gouvernements post-révolution.
Mais pour mesurer la complexité de la situation, revenons un instant sur les grands défis de notre économie. Le premier est celui des finances publiques avec un déficit qui ne cesse de s’accentuer au fil des ans et que nous avons les plus grandes peines à maîtriser. Ce gap est le résultat d’une croissance forte de nos dépenses particulièrement de la masse salariale, de nos dépenses de compensation, des remboursements de la dette ainsi que le budget d’investissement. Mais, ces dépenses n’ont pas été soutenues par une croissance forte de nos recettes. Du coup, c’est le recours à la dette interne et externe qui a permis de combler ce gap et a été à l’origine de l’explosion de la dette et de son service.
Le second défi concerne la reprise de la croissance ainsi que son contenu. Jusque-là, les tendances récessionnistes n’ont pas permis à la croissance de repartir et la dynamique économique est restée faible et fragile. Mais, en plus de sa fragilité, c’est le contenu de cette croissance qui pose des difficultés pour notre économie dans la mesure où c’est la consommation qui joue le rôle de principale locomotive. La nature de cette croissance a renforcé les déséquilibres de notre économie et a contribué au creusement du déficit commercial. La reprise de la croissance et le changement de sa nature en donnant à l’investissement un rôle beaucoup plus important constituent un autre défi majeur pour les pouvoirs publics.
Le troisième défi concerne le mouvement des réformes économiques et son accélération. En effet, un consensus est établi sur la rigidité et la crise de nos institutions économiques et sociales et qui ont été au cœur des dynamiques économiques et du contrat social hérité des années pré-révolution. Il était nécessaire d’opérer un large mouvement de réformes afin de redonner à ces institutions une plus grande efficacité et pour certaines d’entre-elles de les sauver de la déroute. Ces réformes concernent les institutions sociales notamment les caisses sociales, le système de compensation, les mécanismes de financement de l’économie et la fiscalité. Or, en dépit de ce consensus, le mouvement des réformes n’a pas été à la hauteur des attentes et d’importants retards ont été enregistrés dans leur exécution.
Ainsi, le renforcement du redressement économique tout en soulevant les défis des grands équilibres macroéconomiques et particulièrement ceux des finances publiques, de la reprise de l’investissement et de l’accélération des réformes économiques constituent l’équation à laquelle les pouvoirs doivent trouver les solutions adéquates.
Certes, le gouvernement a avancé dans cette direction. La loi de Finances 2018 en cours de finalisation ainsi que le projet de développement économique 2017-2020 qui sera publié officiellement dans les prochains jours après que le gouvernement ait finalisé ses consultations avec les partis et les organisations signataires de la charte de Carthage, constituent les réponses du gouvernement à cette équation.
Mais, nous pensons que la gravité de cette situation et sa complexité exigent du gouvernement de sortir des sentiers battus et d’apporter des réponses nouvelles. Les périodes de crise économique et sociale sont des moments d’une grande inventivité et d’innovation économique et sociale. A nous de prendre les termes de cette équation à bras-le-corps et de lui apporter les solutions capables de redonner espoir à notre jeunesse.      

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