Au moment où le ciel s’embrase au Moyen-Orient, sous le feu des bombardements intenses des Israéliens, soutenus par les Américains, et des Iraniens, les médias, les scènes culturelles, les tribunes politiques et diplomatiques occidentaux s’enflamment en pensées, attitudes, visions et propositions. L’Occident a toujours agi de la sorte, dans la plupart des causes, qu’elles soient internationales ou nationales. Les politiciens, les diplomates, les experts, les journalistes et les intellectuels jouent pleinement leurs rôles pour être au cœur des événements, les commentant et les pensant avec leurs propres outils d’investigation, leurs expériences et leurs convictions. Au contraire, le théâtre politique, médiatique et intellectuel arabe frappe les observateurs comme une tragi-comédie aux acteurs interchangeables sans talents ni morale. Ils ne savent pas ce qu’ils font. De plus, ils le font d’une manière catastrophique. C’est le degré zéro de la politique. Pas de compétence, pas de style, pas d’organisation, pas de stratégie, pas de communication, pas de crédibilité, pas de boussole. Cette situation dramatique en dit long sur la déchéance que connaît actuellement la nation arabe. Il n’est plus question donc d’impuissance, de défaite et de sous-développement, mais plutôt de fuite en arrière et de suicide civilisationnel généralisé.
Sur le déclin d’une idéologie nationaliste autoritaire de jadis, il se lève, chez les Arabes, une sous-idéologie de soumission qui sème à tout vent injonctions, traîtrise et exorcismes. Elle s’inspire d’une vieille idée d’impuissance : «ceux qui ne font rien ne risquent rien» ! Et elle jouit d’avoir rallié à sa cause une caste obscurantiste, qui se présente comme le sacré collège d’un culte envahissant. Le saignement fut tellement apocalyptique que les bourreaux sionistes et occidentaux en profitèrent pour asséner de nouveaux coups dans un corps déjà agonisant. Ils spolièrent les Lieux saints. Puis, ils firent abattre le ciel sur les têtes des Palestiniens. Et devant l’impuissance éhontée des pouvoirs arabes, la terre fut alors noyée dans le sang des Libanais. Puis, vint le tour de la capitale des Califes omeyyades, Damas, qui tomba dans le fossé du complot et de la trahison.
Depuis la chute de l’Andalousie, les Arabes n’ont pu quitter la sphère de la décadence. Pour ces derniers, le temps s’est arrêté, depuis bien longtemps. Des ténèbres opaques et sibyllines du passé ont émergé de nouveaux «prophètes» venus annoncer le retour tant attendu à l’ère pré-islamique et à l’aube de l’histoire. C’est ainsi qu’ils trouvent de l’audience et s’assurent la protection des pouvoirs inféodés et corrompus.
Cette vérité alarmante semble échapper aux élites intellectuelles arabes qui ont tendance à l’occulter et à soutenir l’idée selon laquelle toute confrontation avec les ennemis ne peut que nuire à la nation. Elles ne cessent d’être celles qui voltigent au loin. Ruminant les théories qu’elles avaient consommées et que les maîtres eux-mêmes avaient reniées auparavant. Elles évoluent au sein d’une enclave de crise insidieuse. Elles n’observent point et n’assistent ni ne réagissent à quoi que ce soit. Si elles évoquent le réel, c’est à travers une optique passéiste lointaine, si elles comparent, c’est en usant de personnages et d’événements relevant du passé.
L’histoire de la nation arabe n’a jamais connu d’épisode plus obscur que celui qu’elle vit aujourd’hui. Mais à chaque période de décadence et de recul grave, c’était la voix de la raison qui se faufilait à travers les décombres pour insuffler l’espérance dans les esprits et redonner confiance aux âmes meurtries. Chaque chute était irrémédiablement suivie d’un réveil. Malheureusement, cette lueur d’espoir qui brille du fond de l’horizon pour démentir les mauvais présages des détracteurs et entretenir l’espoir d’une renaissance s’est dramatiquement éteinte.