Les canadairs solidaires

Pour éteindre le brasier du Boukornine, l’Algérie envoie deux canadairs en Tunisie. Puis, celle-ci fournit à l’Algérie, sa contribution à l’extinction des feux furieux. La profonde signification de pareil échange fut élucidée par l’article intitulé « Essai sur le don », le chef d’œuvre de Marcel Mauss, écrit Lévi-Strauss. Don et contre-don outrepassent les biens mis en circulation et désignent la nature de la relation. Au cas où celle-ci arborerait une allure exécrable, don et contre-don seraient quasi impensables. Voilà pourquoi Washington et Moscou ne s’embrassent pas, loin de là ! Dans ces conditions, l’échange de bons sentiments dresse le miroir où apparaît la supercherie de l’ainsi dit « Grand Maghreb arabe uni ». Depuis son institution, celui-ci brandit une coquille vide et, dirait Mauss, « une lune morte au firmament ».
A la façon d’Ennahdha, il procure des rétributions à un personnel administratif plutôt oisif. Son illustre président, Taïeb Baccouche, n’a donc besoin ni de ses mains pour agir ou écrire, ni de sa bouche pour discourir. Le soi-disant Maghreb uni palabre à des années-lumière du vrai Maghreb, lui, désuni.
Pour cette raison, lorsqu’un illuminé prétend quantifier « le coût du non-Maghreb », il troque l’investigation appliquée au monde social tel qu’il est contre l’élucubration infligée à l’univers tel qu’il devrait être. L’utopie délivre un blanc-seing au « bavardage », ce « discours sans vie ».
Ainsi, le conflit survenu entre le Maroc et l’Algérie, pour les raison que nous connaissons, rend un peu louche l’attribution d’une quelconque influence imputée à Taïeb Baccouche.
Hani m3akom la tinsawni. Le refus algérien de voir Israël rôder par là rugit, que le « Maghreb uni » existe ou pas. Il faut être un peu trop subtil ou alors un tant soit peu débile pour tirer son chapeau à des fonctions inutiles. Car, les propos tenus par les personnages dépourvus de réelle autorité n’engendrent aucun effet. Si Néjib Chebbi ordonne à l’Armée de bouger, elle ne bronchera pas. Tel n’est pas le cas si l’ordre émane du Carthaginois. Deux cas de figure, afférents à la guerre civile permettront d’illustrer ce que veut dire la parole autorisée. Une fois désarçonné, Ghannouchi se dit apte à déclencher la guerre civile et sa déconfiture lui répond : « Autant en emporte le vent ». A l’inverse, et à propos de Donald Trump, lisons ceci : « Parce que les Etats-Unis se dirigent vers un niveau de violence politique inédit depuis la guerre de secession (1861-1865) il suffit, pour s’en convaincre, de fréquenter les lieux où se rassemblent les électeurs de droite. Un salon des armes à feu, une église ultra-conservatrice, un meeting de Donald Trump. Peu importe l’endroit, les prophéties apocalyptiques sont omniprésentes ». Au cas où ce témoignage serait crédible, pareille ambiance insurrectionnelle cligne à l’évidence vers son absence en Tunisie, malgré les proclamations de Ghannouchi.
Certes, les tensions, les revendications, les protestations et les grèves ajoutent leur grain de sel aux effets délétères de la persistance caniculaire.
Cependant, cela paraît inapte à déstabiliser l’autorité. Les tenants de l’esprit chagrin comptent sur l’effondrement très prochain. Mais la ya3lamoul ghaïba illallah. Pour l’instant, les canadaires solidairs contrecarrent le rêve éveillé des revanchards. 

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