La rentrée politique, économique et sociale s’annonce chaude voire mouvementée. De tous les défis pour le gouvernement Chahed 2, en mal d’appui et de soutien solides.
Après plus de deux mois de farniente et de fuite du quotidien, c’est le quotidien qui rattrape les Tunisiens avec sa complexité, ses côtés imprévisibles et ses exigences incontournables.
D’abord, sur le plan politique, le remaniement attendu depuis des mois va enfin révéler ses secrets, animer, comme toujours, des polémiques stériles et mettre à nu les graves dissensions qui déchirent une classe politique prompte à tous les excès, à toutes les alliances contre nature et à tous les calculs politiciens.
Pour certaines formations politiques, en lambeaux, le remaniement est devenu une question existentielle, un faux alibi pour continuer leur fuite en avant. La bataille que les dirigeants de Nidaa Tounes, ou ce qui en reste, et d’Ennahdha pour l’accaparation des postes de responsabilité, a frisé le ridicule, l’inénarrable. Hafedh Caid Essebsi, directeur exécutif de Nidaa Tounes a eu l’outrecuidance d’affirmer que son parti refuse un autre putsch contre les résultats des élections de 2014, si la majorité des postes ministériels ne sont pas attribués à ses cadres ! Ennahdha joue la même partition en bataillant pour le maintien des portefeuilles détenus par ses ministres et en usant de fortes pressions pour mettre Youssef Chahed devant le fait accompli.
Pourtant, il est admis que, ce dont la Tunisie a le plus besoin dans l’étape actuelle, empreinte de défis et de graves difficultés, c’est bien d’une équipe gouvernementale homogène, solidaire et capable d’assumer, sans attendre, ses missions. Un gouvernement d’action qui possède un programme clair, une vision et qui peut offrir aux Tunisiens une perspective pour renforcer leur confiance dans l’avenir. Un gouvernement de rupture qui ne cède pas aux pressions et qui soit apte à mener des réformes, profondes et douloureuses, afin de conduire un vrai changement qui mettra un terme à un attentisme dont les conséquences sont aujourd’hui désastreuses sur tous les plans
Un gouvernement, enfin, de mission qui ne doit pas se contenter de gérer les affaires courantes, mais plutôt de remettre le pays en ordre de marche afin de renforcer sa démocratie, garantir sa sécurité, trouver des solutions courageuses à des problématiques structurelles et de placer son action au-dessus des considérations partisanes.
Avec tous les dossiers qui l’attendent, en l’occurrence l’élaboration du budget de l’Etat et de la loi de Finances 2018, la poursuite de sa guerre contre la corruption, l’assurance d’une rentrée scolaire et universitaire apaisée, la réflexion de signaux clairs aux opérateurs économiques et partenaires, le gouvernement dans sa nouvelle composition n’a de chance de réussir que s’il montre une forte résolution à affronter toutes les problématiques d’une manière sereine et en tenant le langage de la vérité aux Tunisiens.
A l’Assemblée des Représentants du Peuple, on espère que les élus se mettent, enfin, au travail et nous épargnent les scénarios qui ont transformé l’hémicycle du Bardo en arène pour des querelles politiques improductives qui provoquent plus de dépit que de railleries. Avec tous les projets de lois qui sont en train de moisir dans ses tiroirs, conséquence logique de la dominance d’un discours haineux et de l’absentéisme exagéré de nos élus des plénières et des travaux de commissions, nous osons espérer un sursaut d’orgueil, un engagement qui leur permet de rattraper le temps perdu et de regagner la confiance perdue des Tunisiens.
Enfin, nos organisations nationales assument une grave responsabilité dans le contexte actuel annonciateur de tous les dangers. Alors que le pays croule sous les difficultés, ses caisses sont presque à plat, ses entreprises sont menacées de cessation de leur activité et son équilibre social se trouve sérieusement compromis, il est grand temps de redonner au dialogue social tout son sens. Un dialogue qui ne devrait aucunement se transformer en diktat ou des épreuves de force à répétition dont personne n’en sortira vainqueur. La politique du bras de fer qui a prévalu dans le pays depuis 2011 a montré son inefficience, ses limites. En sept ans, la pauvreté n’a fait qu’augmenter, le chômage aussi, le pouvoir d’achat ne s’est pas amélioré et la compétitivité de nos entreprises s’est gravement érodée. Tout le monde est perdant et tout le monde a péché par des excès qui se sont avérés destructeurs.