Les islamistes et la «liberté de conscience»

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Depuis la montée des islamistes au pouvoir, les lois dites d’«émancipation» de la société tunisienne se sont multipliées sans empêcher les tentatives intentionnellement organisées pour qu’elles restent lettre morte. Leur logique est pourtant dévoilée. Susceptibilité extrême, extension identitaire et enfin défouloir collectif et violent sur un bouc émissaire commode.
Passés experts dans l’«art» de mentir au peuple et à eux-mêmes, afin de supporter, le temps d’une période limitée, l’opprobre, le désaveu et l’accroissement de l’ampleur de la défiance, ils ont assumé, tout au long de la décennie de braise, un risque forcément très élevé, celui de l’ambiguïté. La vérité est que la suspicion régnante dans leur camp est si forte qu’ils ont préféré laisser le temps faire le boulot tout seul. Peine perdue. Le spectacle offert aux Tunisiens était celui d’un naufrage. En ignorant certains fondements de la «personnalité tunisienne», ils se sont obstinés dans une manipulation des valeurs humaines qui n’atteindra aucun de leurs objectifs.
Prenons un exemple concret : la «liberté de conscience», c’est-à-dire la liberté effective pour chacun de choisir sa religion au sein d’une société d’égaux. Faut-il rappeler que c’est une proposition des islamistes ! La question, pour eux, n’est pas de prôner et défendre la «liberté de conscience», mais plutôt comment empêcher leurs adversaires de les traîner dans les ravages d’une susceptibilité religieuse dont ils voudraient bien éviter l’exposition ! Les islamistes, comme tous les tyrans, essayent toujours de tirer la substantifique moelle d’une valeur humaine pour la manipuler. Alors qu’ils savent pertinemment que la différence entre une proposition trompeuse et la réalité sur le terrain est triviale. Le slogan ne fait pas forcément une politique, mais il arrive qu’il conduise à une campagne de propagande mensongère, dont l’effet de surprise tiendra davantage de l’inattendu de ses détours qu’à l’efficacité de son intrigue. C’est ainsi que la proposition des islamistes a fait couler beaucoup d’encre. Et qui n’a pas fini de nourrir maintes querelles. Chaque fois que la société fut secouée par un évènement qui est en rapport avec la religion, la polémique sur la «liberté de conscience» est de nouveau à l’ordre du jour. Ce fut le cas, par exemple, de la présence d’un Tunisien de confession juive dans la liste des islamistes à Monastir pour les élections législatives de 2014 ou de la polémique soulevée par la désignation d’un ministre juif dans le gouvernement de Youssef Chahed. En dépit de tout cela, on n’est jamais arrivé à débarrasser la «liberté de conscience» de tout ce qui lui collait comme interprétations dont certaines lui sont inhérentes alors que d’autres ont été créées par les surenchères propagandistes des islamistes et de leurs idiots utiles.
À la fin des années cinquante, Bourguiba a voulu faire de ce concept un principe fondateur de la modernisation politique et sociale, mais cette démarche avait été dénoncée par les islamistes et les «archéos» comme une volonté autoritaire de changer l’identité de la société. Il a évité la confrontation pour ne pas donner l’occasion aux islamistes de pouvoir surfer sur la tempête. Malheureusement, même les esprits les plus affûtés trébuchent sur le rapport au fait religieux de nos élites.
Plusieurs mouvements sont apparus alors pour revendiquer la «liberté de conscience» comme valeur cardinale de la civilité. Chacun d’eux a utilisé cette définition comme base fondamentale. Ceci n’a fait qu’accentuer le flou de ce concept. Mais l’interprétation la plus fâcheuse est celle qui consiste à associer la «liberté de conscience» aux slogans trompeurs d’une théocratie. Ce sont en effet, les islamistes qui ont inventé la «carnavalisation» de cette valeur humaine. Il faut reconnaître que de leurs robinets de série ne peuvent couler que des flots de mensonges.

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