Les médias tunisiens et le déluge d’experts fantoches

Par Mohamed Ali Bensouilah

On dit que tout ce qui émane de la création humaine possède un coté obscure, la liberté telle que nous l’avons définie n’échappe pas à la règle, depuis le 14 janvier 2011, la Tunisie a connu l’explosion intellectuelle d’un peuple qui a vécu depuis des décennies sous l’oppression, un régime qui a aboli les libertés fondamentales de l’être humain. Un terrain vierge où les plus opportunistes auraient facilement exploité la situation pour instaurer de nouveaux concepts, la plupart du temps venu d’ailleurs…

Les médias, qui vivent un âge d’or et ce, depuis le 15 janvier 2011, nous ont offert, durant ces dernières années, un déluge d’opinions, de talk-shows à l’américaine animés par des visages presque inconnus de la majorité d’un peuple, qui vient tout juste de renaître ,exposant leurs points de vue, leurs idéologies et philosophies. Nous nous sommes retrouvés submergés par des dizaines d’experts venus de je ne sais d’où.

En tant que citoyen, j’ai été un fervent adepte de ces émissions, stéréotypées certes,  mais qui étaient, à mon avis, l’incarnation vivante de la liberté d’expression, c’était la belle époque où, en tant que tunisien j’avais enfin découvert les splendeurs de la liberté, cependant, le temps a fini par révéler le mécanisme machiavélique de cette machine médiatique.

Avec le temps, je me suis rendu compte que ces « experts » qui ont envahis nos médias, et qui continuent à le faire jusqu’à aujourd’hui, ne sont là que pour défendre l’idée du présentateur ou pire, pour faire entendre à la masse ce qu’elle veut entendre, se cachant derrière l’étiquette d’ « Expert » pour mieux faire passer leurs points de vue, dans une société qui, malheureusement, ne jure que par les apparences et qui aime endosser le rôle d’analyste.

Qui sont-ils ? Pour qui travaillent-ils ? À qui font-ils allégeance ? N’ont-ils pas été à l’origine des plus grandes polémiques qui ont ébranlé ce pays depuis la révolution ? N’ont-ils pas contribué implicitement à fragiliser le tissu social d’une société qui, pendant la révolution, a montré au monde entier sa solidarité magnifique ?

Sommes-nous entrain de découvrir le coté obscure de la liberté d’expression ? Est-ce inévitable ? Nos médias ne doivent-ils pas mieux choisir leurs « experts » ? Et pire, vont-ils continuer à manipuler l’avis publique en crédibilisant leurs invités avec le statut d’ « expert » ?

Ces trois dernières années on en a vu de toutes les couleurs, des avocats qui se sont reconvertis en chroniqueurs, d’autres en « experts », des présentateurs télé spécialisés dans la presse à scandales ou le sport qui nous offrent, désormais, des talk-shows qui parlent de politique et de sujets sensibles qui touchent aux fondements mêmes de notre société ,telle que la religion ou l’économie et ce, en exploitant la phase critique par laquelle passe notre Tunisie et surtout un peuple hypnotisé par la liberté, qui est très réceptif, et c’est normal surtout après avoir vécu trop longtemps dans l’obscurité de la dictature.

N’est-il pas temps pour nos médias de mûrir ? De comprendre l’énormité de leur responsabilité envers la Tunisie ?  Envers son futur ? N’est-il pas temps de commencer à bâtir au lieu de semer la zizanie dans une société qui est au bord du chaos ?

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