«Révolution commence par « rêve». L’onirique précède, la logique suit», soulignait l’écrivain Régis Debray, connu pour son célèbre livre « Révolution dans la révolution «, écrit en 1966 avec Fidel Castro en «correcteur d’épreuves», selon ses dires ! En Tunisie, dix ans après le «rêve», le désenchantement est total, la foule enthousiaste du début finit par se sentir flouée. Les opposants de l’ancien régime, qui ont pris le pouvoir, ont dilapidé non seulement le capital de confiance dont ils disposaient en tant que «victimes de la tyrannie », mais aussi la capacité de la première et seule démocratie dans le monde arabe à construire un avenir plus égalitaire pour ses habitants. Il s’est avéré qu’ils sont forcément atteints d’une pathologie rare et atroce qui les pousse à trahir les idéaux du soulèvement populaire. Une pathologie obsidionale voyant ennemis et traîtres partout. Quelle idiotie de réduire ce soulèvement de l’espoir, comme le font nos politicards, à une jalousie vengeresse et mesquine ! Le « rêve» est brisé, tout a déraillé, et nous voilà face à une machinerie, au pays de l’échec bête, pesant, obstiné, l’échec bas du front et absurde où les responsables au pouvoir sont satisfaits de leur ratage, entêtés dans leurs nullités. Plus ça rate, plus ils ont l’espoir que cela marche. Mais leur comportement est suicidaire : aux yeux de l’opinion publique, ils apparaissent désormais, comme des usurpateurs de l’espoir d’une jeunesse d’en bas! Ce cirque politique local me frappe comme une mascarade aux acteurs interchangeables sans idéaux ni projets. C’est comme dans la pièce théâtrale de Maxime Gorki «Les Bas-fonds» qui raconte les épisodes d’une lutte acharnée, menée par des pseudo-révolutionnaires contre eux-mêmes. Et voilà ! À l’heure de l’enlisement total et des fractures sociales et après les propos misogynes d’un député salafiste sous la coupole du Parlement, un autre député non moins obscurantiste a décidé, lui aussi, de s’en prendre aux femmes, les qualifiant de «machines à procréer» et les appelle à se marier à l’âge de la puberté, puisque «la machine est déjà en marche depuis l’âge de quatorze ans». Rares sont ceux qui se sont inquiétés de cette violence contre les femmes et l’on se souviendra longtemps de ces «gauchistes» et «modernistes» qui ont pris fait et cause pour des obscurantistes qu’ils identifiaient à des «révolutionnaires», de ces responsables au pouvoir qui, devant ce spectacle désolant, insistent à se mettre la tête dans le sable. Ces misogynes déchaînés me rappellent la fameuse secte islamiste des «hachachines» (les assassins) qui ont commis les crimes les plus abominables contre les femmes musulmanes entre les douzième et treizième siècles. C’est le grand explorateur Marco Polo et à sa suite les historiens du Moyen-Âge qui leur ont donné cette appellation, parce qu’ils prenaient des drogues avant de s’adonner à leurs crimes contre des femmes sunnites au nom d’Allah. Nombreuses sont leurs victimes parmi les notables et les gens du peuple, et à leur tête le calife abbasside Al-Moustarchid, sa femme et ses filles. De même que Saladin qui a failli tomber dans l’un des complots qu’ils ont ourdis contre lui. Une lecture approfondie des évènements historiques et de l’interprétation des relations douteuses entre les sectes religieuses dans le monde musulman depuis le septième siècle jusqu’à nos jours, est susceptible de nous faire découvrir combien les obscurantistes sont imbibés de l’esprit de leurs co-sectaires, «les hachachines». Beaucoup de charlatans ont émergé du lot, dont la descendance ne s’est pas tarie jusqu’à ce jour de grâce. C’est que le député, qui se vante sur les ondes d’une radio clandestine, les yeux fermés, la tête chancelante, la langue pâteuse, d’être misogyne n’est que la continuité «objective» de ceux qui ont écrit les pages les plus sombres de l’histoire de la nation musulmane.
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