Les partis en hors-jeu  !

Ce 25 juillet 2020 va certainement rester dans les annales comme une date mémorable. Et pour cause : 63è anniversaire de la proclamation de la république, recueillement à la mémoire des martyrs Belaïd et Brahmi et commémoration du premier anniversaire du décès de Beji Caïd Essebsi. Le hasard a fait qu’ils ont coïncidé avec le dernier délai pour la désignation d’une personnalité pour former le nouveau gouvernement.
La journée aura été surtout chargée pour le président de la République au regard de tout ce qu’il avait à faire ce jour là même s’il a évité de se déplacer au Palais du Bardo pour l’anniversaire de la proclamation de la république. Mais, à coup sûr, elle aura été stressante pour les partis politiques concernés par la désignation du nouveau chef de gouvernement, d’autant que tous les partis représentés au parlement sont allés de leurs candidats, à une exception près.
De l’effervescence dans certains milieux au bouillonnement chez d’autres en passant par le désarroi, la panique et la hantise à Montplaisir, la journée a été longue et l’attente assez dure en raison des supputations autour de la personnalité devant être choisie par Kaïs Saïed qui aura fait durer le suspense jusqu’en début de soirée. C’est à croire qu’il voulait faire languir les partis politiques pour les laisser dans l’hors-jeu et sortir un candidat de son chapeau que personne n’attendait ou ne voyait venir. La décision lui appartenait, la constitution lui accorde ce droit et il en a fait usage à sa manière.
Si la surprise était totale pour certains, pour d’autres, le choix fait par le président s’inscrivait dans sa propre logique. Et la satisfaction cette fois-ci a changé de camp, elle a été du côté des citoyens et des citoyennes, toutes catégories confondues. Le choix semble être fait sur un homme irréprochable, sur lequel on n’avait aucun dossier pouvant l’impliquer dans des conflits d’intérêts ou autres.
Insensible aux pressions de quelque ordre que ce soit, hermétique aux surenchères et autres marchandages de tous genres, Kaïs Saïed a pris sa décision en n’écoutant que sa conscience et en faisant abstraction de toutes les piques qu’on lui lançait, jusqu’à la dernière minute.
Il y va de l’intérêt de la Tunisie pas de celui des partis politiques qui ont perdu toute crédibilité auprès du peuple en raison du spectacle désolant qu’ils ne cessent d’offrir même à leurs électeurs.
Kaïs Saïed a retenu la leçon de la fois précédente et ne veut plus perdre de temps. Un temps précieux qu’il voudrait consacrer à sauver le pays de la situation dans laquelle il se trouve.
Et il l’affirme, « Je dis, en ce jour de la fête de la proclamation de la République, en m’adressant à certains : Jusqu’à quand ? Jusqu’où ? Depuis le mois de novembre dernier, les consultations autour de la formation du gouvernement se poursuivent. Beaucoup de temps a été perdu. Certains ont pensé à enfreindre la loi et aller vers la guerre, mais ils rêvent ! La préservation de la paix civile est un devoir sacré. Aucune tolérance n’est permise à ce niveau et le respect de la loi n’est pas moins sacré ».
Le message est clair et la réponse à toutes les piques et autres allégations est précise. Il est temps de se tourner vers l’essentiel. On l’avait précisé ici-même. En demandant à son poulain, Elyes Fakhfakh de démissionner, Kaïs Saïed avait en fait signé la fin de la récréation pour reprendre les choses en main. On ne joue plus.
Il fallait mettre fin aux magouilles, aux marchandages et aux chantages de tous genres. Mettre fin à tout ce qui a été à l’origine de la crise qui sévit dans le pays depuis 2011. « Le peuple n’en peut plus d’attendre », a-t-il précisé pour ajouter qu’il faut se mettre au travail pour « répondre aux revendications des plus démunis … répondre aux revendications légitimes de notre peuple, et nous ferons tout pour y répondre parce que ces demandes sont légitimes … ».
Le choix de Hichem Mechichi semble répondre à ces soucis du chef de l’Etat qui affirme  ne vouloir que« respecter la volonté de la majorité dans le cadre de la légitimité».
Aujourd’hui le choix est fait et il s’est engagé à œuvrer « à former un gouvernement qui puisse répondre aux aspirations de tous les Tunisiens et à leurs revendications légitimes tant attendues ».
La tâche ne sera pas aisée, certes, le temps lui étant imparti est court. Les partis politiques sauront-ils dépasser, voire digérer, leur déception et agir positivement pour la formation rapide d’une équipe gouvernementale pour remettre le pays en marche ? La question se pose avec insistance, surtout qu’il s’agit là d’un défi qui leur est lancé. Ne pas le relever, déboucherait sur l’inconnu et tous, ils ne s’en cachent pas, le craignent. Pourtant, les réactions de certains n’augurent rien de bon. Déçus, sans doute, mal dans leur peau, car laissés hors-jeu, Ennahdha, Qalb Tounes et Attayar, en l’occurrence, vont réunir leurs états généraux pour décider de la position à prendre en réponse au choix du président. Les partis satellites se sont exprimés les premiers, comme à leur habitude. Cela ne va sans doute pas changer le cours de l’histoire, le ridicule n’ayant jamais tué personne.
Les consultations démarrent ce dimanche 26 juillet, le bal va se rouvrir à Dar Dhiafa et ce ne seront pas les surprises qui vont manquer.

Related posts

La Tunisie lance un projet d’irrigation à grande échelle avec des eaux usées traitées

Réunions de printemps FMI-Banque mondiale : La Tunisie en quête de soutien à Washington ?

FMI: Perspectives économiques contrastées pour la Tunisie et ses voisins en 2025