La colonie tunisienne à l’étranger compte aujourd’hui plus d’un million de personnes et joue un rôle non négligeable mais insuffisant dans le développement du pays.
En effet les transferts financiers des TRE ont totalisé en 2014 près de 4 milliards de dinars, un montant nettement supérieur aux apports du tourisme. Ce chiffre concerne les transferts par voie officielle (banques et poste) alors qu’en réalité, il y a beaucoup plus si l’on inclut les montants non déclarés ainsi que les importations en nature : voitures, véhicules utilitaires, toutes sortes d’appareils ménagers, équipements divers, meubles,…
On peut doubler ce montant moyennant des incitations ciblées, ainsi que la mise en place de réformes et d’institutions appropriées. D’abord le coût des transferts est très élevé, il faut trouver des formules différentes pour le réduire. Ensuite orienter les TRE vers l’ouverture de comptes en dinars convertibles.
En matière de promotion de l’investissement, de création d’entreprises et de lancement de nouveaux projets il y a beaucoup à faire : les chefs d’entreprises tunisiens installés à l’étranger peuvent investir et créer des entreprises économiques en Tunisie soit en partenariat, soit à titre individuel.
Il faudrait que l’Etat puisse accorder des incitations et des encouragements pour favoriser ces investissements.
Parmi les obstacles rencontrés par les TRE qui veulent créer des projets économiques en Tunisie, figure en première ligne la bureaucratie avec ses lenteurs et sa complexité. Bien que l’acte d’investir a été libéralisé : il n’y a plus d’agrément à obtenir pour réaliser un projet, à l’exception de certains secteurs jugés stratégiques, il y a une multitude de documents à fournir pour implanter un projet industriel.
Cela finit par décourager des dizaines de TRE, hommes d’affaires, qui au bout d’un ou deux mois de formalités improductives finissent par renoncer. Déception amère.
La colonie tunisienne a beaucoup changé dans son contenu humain depuis une dizaine d’années. D’abord, il y a émergence de la 3e et de la 4e génération de l’émigration, qui ont fait des études, accédé à des emplois de cadres supérieurs et à des situations enviables sur le plan financier et social. Nés en Europe, ils ne connaissent pas le pays. Il faut savoir les attirer et les intéresser au développement de leur patrie.
En effet, plus de 30% de cette colonie sont des cadres supérieurs, des professions libérales, des enseignants du supérieur, des chefs d’entreprises qui disposent d’un pouvoir d’achat élevé et qui peuvent créer des projets économiques en Tunisie.
Toutes ces corporations professionnelles, à titre collectif ou individuel, doivent en particulier en ces moments difficiles, contribuer au développement du pays, soit en investissant leurs économies dans des projets économiques ou sous forme de portefeuille boursier ou en les déposant sur un compte-épargne ou encore en créant des projets de partenariat avec des entreprises tunisiennes. Pourquoi ne pas créer en Europe une ou des centrales d’achat spécialisées dans l’importation et la distribution en Europe de produits agroalimentaires originaires de Tunisie. Ne serait-ce que l’approvisionnement des épiciers tunisiens installés en France qui constitue un marché fructueux.
Nous devons élaborer une véritable stratégie de l’émigration à moyen et long termes avec des objectifs clairs, des mécanismes opérationnels et des organes consultatifs mais aussi des étapes dans la réalisation des objectifs.
On parle depuis des années de créer un conseil national de l’émigration, pour assumer un rôle consultatif en la matière. Le projet de loi concernant sa création vient d’être examiné par le conseil des ministres en vue de le transmettre pour adoption à l’ARP.
Il faudrait probablement créer ou rétablir le secrétariat d’Etat à l’émigration afin de prendre en charge tous les aspects relatifs à l’émigration et assurer la coordination entre toutes les institutions ayant un rapport avec l’émigration : Office des tunisiens à l’étranger, direction des douanes, ministère des Affaires étrangères, sociétés nationales de transport, associations des hommes d’affaires tunisiens à l’étranger.