Après le 25 novembre 2015, on s’attendait à des manifestations d’unité nationale, où les Tunisiens, arrivent à exprimer non seulement leur colère, mais une inébranlable volonté de ne pas céder à la peur et à la résignation face à la menace terroriste. Cela, partant du fait que dans l’adversité, les hommes trouvent les bonnes occasions pour se réunir, se rapprocher et réinventer les meilleures voies qui les immunisent contre la haine, la violence aveugle et la barbarie.
L’unité nationale, ce souhait ardent, est malheureusement loin de faire l’unanimité chez nous. En théorie, chacun en fait son cheval de bataille, son exigence incontournable et la voie du salut pour que notre pays, qui n’a eu de cesse de subir les coups bas de groupes obscurantistes n’hésitant pas à semer la mort et la désolation.
Dans la pratique, on décèle très peu de manœuvres sérieuses, une absence de vision cohérente, d’appréciation sereine des véritables défis qui guettent le pays et, par voie de conséquence, une dispersion des rangs qui cache des calculs politiciens et des visées partisanes en net décalage avec les aspirations populaires.
Alors qu’on espère en un véritable sursaut d’orgueil de toute la classe politique tunisienne, des organisations de la société civile et des citoyens pour dénoncer ce crime odieux et administrer la preuve, que face à la dure épreuve, toutes les forces vives du pays pouvaient parler d’une même voix et agir en front uni, plus grande fut notre déception en constatant quelque peu décontenancés l’ampleur des divergences qui continuent de les diviser.
Certes, toutes les composantes de la société tunisienne se sont empressées de dénoncer le crime abject, l’acte barbare, mais cette expression a surpris par sa mollesse et son manque d’imagination. On a eu l’impression que surpris, les partis politiques et les organisations de la société civile, n’ont pas trouvé les bons arguments qui leur permettent d’exploiter ce drame pour exprimer une colère, un refus, une plus forte cohésion et adresser un message fort de confiance aux Tunisiens pour qu’ils affrontent ce péril avec un esprit de vainqueur.
Résultat, l’unité nationale qui devait être l’émanation d’une volonté générale et que sa consécration devait découler d’une démarche consensuelle, est perçue sous l’angle réducteur des intérêts propres que chacun cherchait, d’où la cacophonie qui continue de régner au sujet des pistes qui permettent au pays d’engager une guerre totale contre le terrorisme. Tout en apostrophant, les réactions enregistrées, qui étaient loin de surprendre dans le contexte post révolutionnaire de la Tunisie, nous ont confortés dans l’idée de l’extrême division de la classe politique tunisienne plus prompte à la surenchère et aux règlements de compte qu’aux discours porteurs de messages clairs.
Incontestablement, tous les drames que la Tunisie est en train de connaitre trouvent leur source dans l’absence d’une vision convergente des défis que rencontre le pays, d’une appréciation objective des moyens et des stratégies à mettre en œuvre en période de crise majeure et d’une réaction coordonnée et ordonnée, à l’effet de susciter une union qui aide à préserver la stabilité du pays, sa sécurité et à servir ses intérêts.
Si au bout de quatre ans, le pays a perdu de nombreuses opportunités pour aller de l’avant sur la voie de la construction de sa démocratie, de l’enracinement des libertés et des droits, de la conception d’un modèle de développement inclusif et de la définition d’un compromis social, aujourd’hui, il lui est interdit de faire un faux pas en termes de lutte contre le spectre terroriste. Une menace qui vise frontalement son modèle sociétal, son unité, sa sécurité et peut l’entraîner dans un cycle de violence aux conséquences catastrophiques.
Pour cette raison évidente, l’union sacrée de tous les Tunisiens devient non seulement une exigence, mais une condition essentielle pour poursuivre la construction de l’Etat civil, des institutions républicaines et pour le raffermissement des droits et des libertés.
Pour cette raison évidente, également, tous les acteurs politiques sont appelés à se réveiller de leur torpeur en comprenant que le chemin qu’ils ont jusqu’ici suivi est sans issue. Un chemin qui procède d’une courte vue, parce que fondé sur des calculs étriqués et ne peut laisser apparaitre qu’un pays qui va à vau-l’eau, avec, une classe politique mue uniquement par les privilèges et l’appât du pouvoir.