L’essentiel et l’accessoire

 

Alors que le temps presse, le pays courant des risques terroristes de plus en plus graves et les difficultés économiques et sociales gagnant en intensité, la classe politique ne semblait pas être perturbée outre mesure, par la perte de plus de trois mois dans un marchandage interminable pour la formation d’un gouvernement de coalition. Un gouvernement qui fait plutôt une unanimité, de façade et d’intérêts divergents.

Trois mois qui auraient pu être mis à profit pour élaborer un programme cohérent et consensuel, un cadre de travail clair et engager des réformes urgentes en adéquation avec les exigences de l’étape. Un laps de temps qui aurait pu, également, permettre d’entamer la nouvelle année en entrant dans le vif du sujet en prenant la mesure des défis qui se posent. En effet, il aurait mieux valu lancer rapidement des signaux clairs qui permettent aux Tunisiens de reprendre le chemin de l’action et du travail, aux régions intérieures et aux  jeunes de sortir de la désespérance et à l’économie de trouver de nouvelles pistes pour créer des richesses et gagner en compétitivité, que de s’embrouiller dans des guerres de partage de positions.

Au regard d’une réalité, dont les contours restent imprécis et d’une grande complexité, Habib Essid et son équipe vont marcher sur un véritable champ de mines, où chaque faux-pas peut provoquer des conséquences néfastes. Pour cette raison objective, ce gouvernement est condamné à accomplir un parcours sans fautes et, surtout, à convaincre par la qualité de son programme et l’efficacité de son action.

Même si la nouvelle équipe gouvernementale pourrait se prévaloir de sa compétence, de sa volonté et de son engagement, aurait-t-elle les moyens pour aller jusqu’au bout des attentes des Tunisiens, de leurs aspirations et serait-elle en mesure de traduire toutes les promesses en réalisations concrètes qui transformeraient radicalement le vécu des Tunisiens et leur désenchantement en espérance ?  Là est toute la question.

Une chose est sûre, le nouveau gouvernement aura à accomplir les douze travaux d’hercule pour relever les défis et desserrer les fortes contraintes politiques, économiques et sociales qu’il aura à affronter dès les premiers jours de son entrée en activité.

Manifestement, quelles que soient la qualité du programme que Habib Essid va s’ingénier à  présenter et la portée des mesures qu’il aura à défendre, il sera invariablement astreint à définir des solutions urgentes, directement applicables et dont l’effet peut être ressenti à court terme. C’est à l’aune des politiques qui seront menées et des programmes qui seront mis en œuvre et des solutions qui seront proposées à des problématiques difficiles, que ce gouvernement jouera sa crédibilité, voire même sa survie.

Sur le plan politique, la poursuite de la mise en place des institutions constitutionnelles, qui viendraient renforcer l’édifice de la démocratie et l’Etat de droit, continuera à occuper le premier rang des priorités. La  consécration  et la préservation des libertés et des fondements de l’Etat civil  seront une véritable épreuve pour le nouveau gouvernement qui sera constamment soumis à l’appréciation et à la pression de l’opinion publique et de la société civile.

La question  sécuritaire ne manquera ni d’intérêt, ni d’insistance. De la poursuite de la guerre contre le terrorisme, l’insécurité et le crime organisé que dépendront la viabilité et la durabilité du modèle démocratique tunisien. A quel développement la Tunisie pourrait-elle postuler, si son image reste associée au terrorisme, si l’insécurité et l’anarchie perdurent ? Seule l’éradication de cet hydre donnerait au pays de nouvelles perspectives et participerait à rétablir la confiance, condition indispensable pour remettre l’activité à flot.

Au plan économique, quelles réponses efficaces faut-il concevoir pour corriger les déséquilibres macroéconomiques, relancer l’activité économique, restaurer la confiance des opérateurs et investisseurs et  repenser un modèle de développement qui a montré ses limites ?

Le dossier social  nécessite à la fois audace, sagesse et clairvoyance. L’éradication du chômage, de la pauvreté, la préservation du pouvoir d’achat et l’assurance d’une qualité d’éducation, de formation, d’enseignement et de santé constituent de lourds dossiers nécessitant un engagement clair et des actions coordonnées et bien réfléchies.

Face à ce lourd fardeau, l’on consent que le gouvernement ne possède pas une potion magique. Néanmoins, il est dans l’obligation de savoir susciter un préjugé favorable prouvant et sa compétence et sa volonté de réformer et de changer.

A contrario, il courra à sa perte et le pays ne pourra s’épargner l’anarchie !

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