Qui, d’Al-Ahly ou des Kaizer Chiefs, va s’installer sur le toit du foot des clubs africains ? Réponse à Casablanca ce samedi soir.
La finale de la Ligue des champions africaine, qui se tiendra ce samedi soir à Casablanca, opposera deux équipes aux saisons totalement distinctes mais aussi deux des clubs parmi les mieux structurés du continent : Al-Ahly, champion en titre, et les Kaizer Chiefs. Déjà vainqueur de la plus prestigieuse compétition africaine de clubs et considéré comme le plus profitable du continent, Al-Ahly et son latéral gauche international tunisien veulent asseoir leur domination sur le football africain avec le but de disputer à nouveau la Coupe du monde des clubs. Lors de la dernière édition, Al-Ahly a obtenu la médaille de bronze à la suite d’une élimination contre le Bayern Munich en demi-finale, et une victoire devant le club brésilien de Palmeiras en match de classement. Désormais, le club égyptien a des ambitions qui dépassent le continent africain.
Club centenaire, Al-Ahly est tout simplement l’un des clubs les plus titrés de la planète : 42 titres de champion d’Égypte, 37 Coupes d’Égypte, 9 Ligues des champions africaines, une Coupe des confédérations, 7 Supercoupes d’Afrique. Ce palmarès impressionnant lui a permis de générer une fanbase de plus de 70 millions de supporteurs à travers l’Égypte et l’Afrique, et d’être considéré comme un modèle à suivre pour l’ensemble du continent.
Jamais deux sans trois pour le géant égyptien ? Au cours de sa glorieuse histoire, Al-Ahly a fait face à deux reprises à un club sud-africain en finale de la Ligue des champions africaine. Les deux rencontres se sont soldées par des victoires : la première en 2001 face aux Mamelodis Sundowns : 1-1 en Afrique du Sud pour le match aller, victoire 3-0 à domicile au retour ; et la seconde contre les Orlando Pirates en 2013 : match nul 1-1 à Johannesburg puis une victoire 2-0 une nouvelle fois à domicile pour le retour.
Cette finale permet donc au club du Caire de faire son grand chelem des grands clubs sud-africains en ayant cette fois-ci les Kaizer Chiefs sur sa route. Face au club de Soweto, une connaissance du football sud-africain se présente : l’entraîneur Pitso Mosimane, ancien sélectionneur de l’Afrique du Sud, mais surtout ancien entraîneur des Mamelodi Sundowns, surnommés les Brésiliens. C’est avec ce club qu’il a écrit sa légende : 5 fois champion d’Afrique du Sud et vainqueur de la Ligue des champions en 2016, vainqueur de la Supercoupe de la CAF en 2017, mais aussi 5 fois meilleur entraîneur du championnat sud-africain et coach de l’année de la CAF en 2016. Une stature et un succès lui qui lui ont permis d’attirer l’œil du géant du Caire, notamment à la suite d’une véritable humiliation infligée au club cairote en 2019, une victoire sur le score de cinq buts à zéro lors du match aller des quarts de finale de la Ligue des champions.
Le président Mahmoud El Khatib compare l’entraîneur sud-africain à un véritable diamant, et prévient qu’il ne le laissera pas lui filer entre les mains, en témoigne le juteux contrat de près de 3 millions d’euros annuel avec un bonus de 480.000 euros en cas de victoire en Ligue des champions ou dans le championnat égyptien. « Je suis allé seul le ramener ici alors que personne ne croyait en Pitso Mosimane. Le conseil d’administration a été émerveillé par cette décision. Mon équipe venait de passer six ans sans gagner la Ligue des champions de la CAF. Quand je l’ai amené au Caire, les portes de l’Afrique se sont ouvertes et il m’a apporté la médaille d’Afrique tant désirée », dit-il, plus que jamais séduit par le football attractif et progressif proposé par l’entraîneur sud-africain.
*Prudence face aux Kaizer Chiefs
Une chose est sûre, Pitso ne prend pas le match pour acquis : « Vous devez faire attention aux détails contre Kaizer Chiefs. C’est une très bonne équipe en termes d’organisation. Ils ne donnent pas facilement des buts. Ils n’ont pas encaissé de but dans leur stade. Ils ne marquent pas beaucoup de buts », a déclaré Pitso Mosimane. « Mais ils peuvent vous vaincre. Ils ont marqué quatre buts à domicile contre Simba. Et nous ne l’avons pas fait. Donc nous devons les respecter ». Face aux exigences d’un tel club, Pitso ne se pose pas de questions. À Al-Ahly, il faut gagner : « Ici, si vous ne gagnez pas la Ligue des champions et que vous ne gagnez pas le championnat, vous pouvez tout de suite aller voir ailleurs. C’est pourquoi je suis ici, je suis sur le fil du rasoir. J’aurais pu rester dans ma zone de confort en Afrique du Sud », a déclaré Pitso Mosimane dans un entretien accordé à la Société des journalistes sud-africains.
Actuellement à la deuxième place du championnat égyptien derrière le rival de toujours, le Zamalek, Al-Ahly a encore 5 matchs à rattraper pour combler son retard de 10 points. Son parcours africain a été un quasi-sans-faute avec un bilan positif sur 12 matchs : 8 victoires, 3 matchs nuls, 23 buts inscrits et 6 encaissés, des qualifications face aux Sundowns en quarts de finale (victoire 3-1 sur les deux matchs), et l’Espérance de Tunis dans le dernier carré de la compétition (victoire 4-0 sur les deux matchs), et seulement une défaite en phase de poules sur la pelouse du Simba SC en février dernier. Compte tenu des hautes exigences du géant cairote, Pitso ne se fait pas d’illusions. Dans un tel club, seule la victoire est tolérée.
Les Kaizer Chiefs tiennent à sauver une saison mitigée
De son côté, le club du Soweto a une opportunité unique d’inscrire son nom parmi les lauréats de la principale compétition interclub africaine avant une possible instauration d’une Super League africaine dont le projet est toujours en réflexion. Il s’agirait là de son deuxième succès continental après la défunte Coupe des vainqueurs de coupe remportée en 2001. Les Chiefs joueront cette finale avec un nouvel entraîneur, Stuart Baxter, lui aussi ancien sélectionneur des Bafana Bafana (entre 2004 et 2005 puis 2017et 2019). Il effectue là tout juste son retour sur le banc des Chiefs qu’il a entraînés de 2012 à 2015 avec un certain succès : deux titres de champions d’Afrique du Sud en 2013 et 2015.
Les supporters du club sud-africain Kaizer chief’s encouragent leur équipe lors du match contre le Bloemfontein Celtic club au stade Moses Mabhida, à Durban, le 7 décembre 2019. (Image d’illustration)
© ANESH DEBIKY / AFP
Avec une fanbase de 16 millions de supporteurs en Afrique subsaharienne, un budget de 23 millions d’euros, il s’agit du club africain au plus grand potentiel économique, après Al-Ahly, et l’investissement consenti pour bâtir une grande équipe le prouve bien. Son joueur star Samir Nurkovic, attaquant serbe formé au Partizan Belgrade, est rémunéré à hauteur de 58 000 euros mensuel, et trois de ses coéquipiers figurent dans le top 10 des joueurs les mieux payés du championnat : l’international zimbabwéen Billiat, l’ancien gardien de la sélection Khune ou encore Bernard Parker. C’est la raison pour laquelle les insuffisants résultats obtenus en championnat (actuellement 8e de PSL) ont eu raison de l’entraîneur Gavin Hunt, malgré d’excellents résultats en Coupe d’Afrique lui permettant d’atteindre ce niveau de la compétition pour la première fois de son histoire.
*Kaizer Chiefs, un jeu défensif
Sur le terrain, cette équipe se caractérise par une approche des plus conservatrices consistant à défendre de façon très compacte et à saisir les opportunités en contre-attaques, jeu aérien et coups de pied arrêtés où ils ont déjà inscrit six buts dans la compétition, soit 50 % des buts de l’équipe. Les Chiefs ont pour temps forts de leur parcours (6 victoires, 6 matchs nuls, 2 défaites en 14 matchs, 9 buts encaissés) la qualification pour les quarts de finale arrachée contre le cours du jeu sur la pelouse du multiple champion guinéen Horoya lors de la dernière journée des phases de poules, la victoire sur le score de 4-0 contre Simba SC (toutefois tout proche d’arracher la prolongation au match retour des quarts) et enfin une démonstration de leur solidité défensive face au Wydad Casablanca qui s’est retrouvé face à un véritable mur durant 180 minutes (victoire 0-1 au Maroc, 0-0 au match retour à Johannesburg).
*Ousider
Ayant joué son dernier match il y a deux semaines, et sachant que leur adversaire à venir s’est imposé sur le score de 4-1 sur la pelouse de Misr El Mekasa le week-end dernier, un manque de rythme n’est pas à exclure. Cela dit, il est certain que le club du Soweto prépare son match dans le but de frustrer son adversaire, grandement favori, afin de chercher la victoire à l’usure. « On s’attendait à ce qu’Al-Ahly soit là, pas nous. Nous sommes les outsiders pour la plupart des gens. J’ai un grand respect pour Al-Ahly mais nous pensons que nous pouvons obtenir un bon résultat ». Nul doute que ce statut d’outsider convient parfaitement aux hommes de Stuart Baxter.
*Pitso Mosimane aux portes du record de titres
Contrairement à la finale de la Coupe des Confédérations jouée au Bénin (victoire du Raja Casablanca sur JS Kabilye 2-1), la finale de Ligue des champions se jouera à huis clos. Pour Pitso Mosimane, une opportunité cruciale se présente pour remporter une troisième Ligue des champions africaine et devenir le deuxième entraîneur le plus titré de l’histoire de la compétition derrière l’entraîneur portugais Manuel José, ancien coach d’Al-Ahly, quatre fois vainqueur. Il s’agit possiblement de la dernière édition connue sous cette forme avant la probable instauration d’une Super Ligue africaine, qui a été une nouvelle fois évoquée lors du dernier comité exécutif de la CAF. À noter que les droits de diffusion de la finale sur le continent africain ont été attribués à… SuperSport qui avait été le grand perdant du litige opposant la CAF au groupe Lagardère. Sans aucun doute, cette finale de la Ligue des champions marque la fin d’un cycle pour le football africain.
(AFP)