Comment peut-on comprendre cette controverse historique sans nous référer à la Constitution de l’Etat Espagnol parce qu’il s’agit en fait du fond de « la question catalane ». L’Espagne a construit en effet sa transition démocratique sur la base d’un compromis accepté par une écrasante majorité des espagnoles et par également, pratiquement toute la classe politique y compris celle de la Catalogne. Du Pacte de Moncloa à la Constitution, toutes les différentes régions qui composent l’Espagne ont adopté et défendu un model de société et de gouvernance consensuel qui s’articule autour de piliers suivants :
-L’Espagne est une monarchie constitutionnelle et démocratique.
-L’Etat espagnole reconnait les autonomies régionales (basque, andalouse, catalane…) dans le cadre d’une solidarité et d’une complémentarité à l’échelle nationale.
-Toute cession séparatiste unilatérale d’une région autonome implique l’application de l’article 155 de la Constitution ce qui permet à l’Etat centrale de suspendre l’autonomie de la région concernée. Cet article ne constitue pas une réponse spécifique au mouvement séparatiste catalan (comme il a été déclaré par certains « experts » tunisiens). C’est dans ce contexte que le referendum pour l’indépendance de la Catalogne s’est produit en dehors du cadre institutionnel d’autant que la vraie question qui devrait être posée dans ce referendum est : «Est-ce que les catalans souhaitent se séparer de l’Espagne ? »
Aujourd’hui, les événements qui se sont produits ces derniers jours font que la situation est tendue dont l’issue est incertaine, la déclaration unilatérale de l’indépendance du coté du gouvernement séparatiste catalan et l’application de l’article 155, même a titre provisoire, de la part du gouvernement centrale risque de créer une déstabilisation en principe pour une courte durée et ce jusqu’aux élections prévues en décembre 2017.
Mais au de là de ces événements, la déclaration unilatérale de l’indépendance de la Catalogne, l’application de l’article 155, l’exile du président catalan à Bruxelles …Que pouvons nous ajouter ?
-Il s’agit en réalité d’un affrontement entre une logique révolutionnaire et une logique institutionnelle.
– Cette affrontement survenu au grand jour en novembre 2017 n’est pas du tout une surprise, l’infiltration du mouvement séparatiste catalan dans toutes les institutions et les organisations de la société civile s’est déroulé progressivement depuis au moins 10 ans.
L’interrogation qui s’impose alors face à cette mouvance, pourtant bien visible, pourquoi le gouvernement central n’a pas anticipé une réponse politique nationale en vue d’atténuer la logique de l’affrontement et de sédition ?
-Le mouvement séparatiste catalan a développé une rhétorique de victimisation qui porte à faire croire que la monarchie espagnole se comporte vis-à-vis de la Catalogne comme un Etat colonial, cette rhétorique méritait un débat national en vue d’éclaircir la véritable nature des relations entre l’Etat centrale et l’autonomie catalane présentée il y ‘a quelques années comme exemplaire.
-Que c’est-il passé depuis et qui profitera réellement d’une Catalogne indépendante ; la bourgeoisie, le peuple, les milliers de migrants qui vivent depuis des années ?
-Une Catalogne indépendante séparatiste n’est elle pas l’expression d’une région plus riche que ses voisins et qui envisage de mettre fin à la solidarité avec les autres régions de l’Espagne ?
Enfin, en exigeant l’indépendance unilatérale de la Catalogne, n’y a t’il pas un désaveu indirecte au Processus de Barcelone et la complémentarité Euro-Med ?
Ridha Tlili