Loi sur la protection des sécuritaires : « une quasi-immunité » selon une experte en Droit

Le projet de loi sur la protection des sécuritaires continue de faire couler beaucoup d’encre en Tunisie. Les critiques sont, en effet, nombreuses. On craint l’octroi d’un pouvoir illimité aux sécuritaires, ce qui ouvre la voie aux bavures. Qu’en pensent les experts ? Selon Mouna Kraïem, Docteure en Droit, le risque de dépassements est bel et bien réel. « Le texte manque de précisions, notamment sur les cas et les sanctions. Or, la précision est primordiale dans le droit pénal. Lorsque nous parlons d’une protection pour les secteurs, il faut éviter qu’elle devienne liberticide et allant à l’encontre de la liberté du citoyen. Un équilibre dans la protection est requis », a-t-elle déclaré à Réalités Online ce jeudi 8 octobre 2020.

« Des bavures au nom de la loi »

L’experte considère qu’il faut protéger tous les secteurs d’activités dans notre contexte actuel, et non seulement celui des sécuritaires. Leur protection, poursuit-elle, ne doit pas être synonyme d’un pouvoir illimité. De fait, ce dernier risquerait de les pousser à commettre certains actes au nom de la loi et de leur protection. Or, cette loi, selon Mouna Kraïem, comporte de nombreuses failles, et ce sont ces dernières qui risquent de mener vers des actes arbitraires.
« Les sécuritaires ont, certes, besoin de protection compte tenu de la conjoncture du pays et des agressions qu’ils subissent. Toutefois, en les protégeant, il faut éviter de leur octroyer des pouvoirs qui leur permettent de porter atteinte aux libertés d’autrui. Il s’agit d’une quasi-immunité », a-t-elle expliqué.

Un texte imprécis

Que faut-il faire ? Tout d’abord, la Docteure en Droit a insisté sur l’importance de la précision. En effet, le projet de loi relatif à la protection des sécuritaires en manque. Dans cette optique, il est nécessaire de définir les infractions, les actes et les sanctions, tout en évitant de tomber dans l’arbitraire. « Il faut savoir que le Droit tunisien comporte déjà un arsenal juridique qui protège les sécuritaires, à l’exemple de la loi anti-terroriste et du code pénal. Ces derniers comprennent des failles, mais ce n’est pas une raison de proposer une loi qui ouvre la voie vers l’arbitraire. L’imprécision constitue son plus grand défaut. Les sanctions infligées aux « agresseurs » des sécuritaires sont très lourdes. Encore faut-il définir ce qu’est une agression. Or, le droit pénal, en Tunisie, est basé sur la précision de l’acte, de la sanction et sur la proportionnalité de la sanction par rapport à l’acte. Il faut protéger toutes les catégories professionnelles, mais sans que cela puisse porter atteinte à autrui », a encore expliqué Docteure Mouna Kraïem.

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