Luck : la Série qui n’a pas de chance…

De quoi ça parle ?

Avant toute chose, sachez que cette série a été annulée et qu’elle ne comportera, pour le moment qu’une seule saison. Faut-il pour autant visionner une « série morte née » ? Oui ! Pourquoi ? Vous le saurez en lisant les lignes qui suivent.

Les courses hippiques… soit le tiercé, des mecs en survet’ dépareillés et piliers de comptoirs, des tenues de jockeys fluo… Tel est souvent l’image que l’on se fait du monde hippique. Alors imaginez une série sur des courses de chevaux, sur le crottin et autres réjouissances…

Toutefois, cependant, malgré tout… quand un des meilleurs créateurs de séries, David Milch (New York Police Blues, Deadwood), rencontre l’un des meilleurs filmeurs d’Hollywood, Michael Man (Heat, Collateral…) cela donne Luck. Et ça, ça change tout.

 

A voir ou à zapper ?

Comme toutes les nouvelles séries, les pics d’intensité sont judicieusement situés au début (retenir et mettre une bonne baffe au téléspectateur) et ce que les Américains appellent le « final », soit l’épisode final. Et entre les deux ?

Eh bien entre les deux, tout se tient. Pour ma part, le test est simple, si j’arrive à regarder un épisode sans me lever, sans consulter mon téléphone ou sans aller chercher quelque chose à grignoter, c’est bon. Et Luck est comme un bon scotch, il s’hume, se savoure, flatte le palais et réchauffe.

Le générique est un excellent indicateur du « tempo » de la série. Hypnotique, lumineux, sensuel… Mais surtout, il montre clairement que sous les lumières se trament des choses beaucoup moins glamour. Et c’est que montre Luck, l’envers du décor.

L’histoire tourne donc autour de passionnés hippiques. Mais, l’intelligence principale de la série réside dans la différence des points de vue. Il n’y a pas, à proprement parler, de « héros ». Certes, « Ace » Bernstein (Dustin Hoffman), tout juste sorti de prison, semble être le point focal des différentes intriques, de manière directe ou indirecte, il n’empêche que Luck entremêle les trames. Il y a ainsi quatre grands groupes dont on suit les aventures.

Tout d’abord, les parieurs. Une bande de loosers (un handicapé moteur, un séducteur de pacotille, un lunaire, un accro au poker autodestructeur) qui passent leurs journées entre Junk-Food et tribunes, mangent et respirent chevaux.

Ensuite, vient le monde des jockeys. Un monde où le moindre kilo en plus est synonyme de disqualification, un monde où la bière prise est tout de suite regrettée, un monde où seuls les desiderata des entraineurs lunatiques comptent. Un monde où Rosie, femme jockey, a bien du mal à sortir de sa condition de palefrenière.

Après, arrive logiquement l’univers des entraineurs où l’on retrouve ex-æquo, au sommet, Turo Escalante, latino toujours sur les nerfs, à fleur de peau et « Le vieil homme » Walter Smith, posé et observateur.

Enfin, au « sommet de la pyramide hippique »  trônent les « chefs », soit la mafia, le milieu du banditisme, les indiens profitant à plein des largesses fiscales des réserves… soit les gangsters que l’on retrouve toujours quelque part. « Ace » fait ainsi face à ses anciens alliés (avec à leur tête le flippant « Mike »), son contrôleur judiciaire avec qui il diserte sur le jazz (scène similaire vue dans Collatéral de Michael Mann, logique) et le reste du « monde réel ».

Le nombre d’intrigues, en vrac : scène des carottes/poker/l’accro aux cougar/le corps repêché/la drogue… sont autant d’éléments qui pourraient donner le tournis mais qui confinent à une beauté plastique (recours à la caméra HD, obsession de Michael Mann) et aux personnages fouillés que l’on découvre au fur et à mesure (patte de David Milch).

Luck draine ainsi une tension de tous les instants, moite, palpable. La violence pointe mais elle reste à la périphérie de l’intrigue, elle se montre peu à peu, rampante et visqueuse, ce qui accentue le malaise. Sous les sourires de façades, la faiblesse humaine

 

Final

Luck est une série, ou plutôt était une série dont on parle au passé, elle n’existe déjà plus, fauchée en plein vol par son diffuseur HBO. Prétexte officiel et vérifiable : la mort de trois chevaux sur le tournage. Prétexte officieux : un échec d’audience irrémédiable et un coût de production trop élevé. Il existe donc neuf épisodes de Luck et c’est tout. C’est néanmoins assez pour en faire une série importante et remarquable, aussi bizarre qu’attachante. Comme un amour sans retour, elle vaut la peine d’être aimée.

Buffon affirmait que «La plus noble conquête que l’homme ait jamais faite est le cheval. ». Luck donne envie de s’acheter un cheval, peut-être de parier…

F.B.

 

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