Lutte contre le tabagisme en Tunisie: vers une approche de réduction des risques

Tabac

Le tabagisme représente un enjeu majeur de santé publique en Tunisie. Les résultats de la dernière enquête MICS montrent qu’environ 50 % des hommes tunisiens fument régulièrement, avec un taux particulièrement préoccupant de 49,9 % chez les jeunes adultes âgés de 20 à 24 ans. Cette prévalence baisse chez les hommes de 15-19 ans ainsi qu’en milieu rural, et augmente en milieu urbain. En revanche, le tabagisme chez les femmes reste marginal, atteignant seulement 1,9 %. L’enquête par grappes à indicateurs multiples (MICS) est un programme international d‘enquêtes élaboré par l’UNICEF. La Tunisie a déjà connu cinq vagues de cette enquête depuis 2000, la dernière en 2023. La MICS Tunisie 2023 s’appuie sur un échantillon de 11 000 ménages, dont deux tiers en milieu urbain et un tiers en milieu rural, une étude récente indique. Cette persistance du tabagisme résulte en partie de l’inefficacité des programmes de lutte anti-tabac important plaide pour repenser le modèle de lutte actuel.

État des lieux et mesures adoptées

Pour faire face à ce fléau de santé publique, la Tunisie a mis en œuvre une série d’initiatives ciblées. Parmi celles-ci, l’augmentation des taxes sur le tabac a été adoptée dans le but de rendre les cigarettes moins accessibles, surtout pour les jeunes et les populations à faible revenu. Par ailleurs, l’interdiction de fumer dans les lieux publics et notamment dans les établissements relevant de plusieurs ministères tels que le Ministère de l’Éducation et le Ministère de la Jeunesse et des Sports vise à protéger les non-fumeurs des effets néfastes de la fumée secondaire, tout en créant un environnement moins propice à la consommation de tabac.

Des messages d’avertissement sur les paquets de cigarette, des campagnes de sensibilisation incluant des messages éducatifs sur les dangers du tabagisme, des challenges impliquant le cercle familial, des concours destinés aux plus jeunes, et tant d’autres actions ont été lancées pour sensibiliser la population sur les risques pour la santé associés au tabac et dissuader le plus grand nombre de personnes de fumer. L’Organisation mondiale de la santé (OMS), par le biais de la convention cadre pour la lutte antitabac (FCTC), a joué un rôle primordial en soutenant ces initiatives, en aidant à établir un réseau multisectoriel impliquant des ministères, des organisations non gouvernementales et des acteurs de la santé.

Cependant, malgré ces efforts concertés, les résultats demeurent mitigés. Le taux de tabagisme bien qu’il ait diminué au fil des années, reste très élevé.

Des études récentes indiquent que la prévalence du tabagisme demeure préoccupante, notamment chez les jeunes adultes. Cela souligne la nécessité de renforcer les stratégies existantes et d’explorer de nouvelles approches, comme l’intégration de programmes de sevrage tabagique dans les soins de santé primaires, ainsi que la promotion d’alternatives sans fumée. La lutte contre le tabagisme en Tunisie nécessite donc un engagement soutenu et une adaptation continue des mesures en réponse aux comportements changeants de la population.

Vers une stratégie de réduction des risques

Dans cette optique, de nombreux scientifiques tunisiens plaident pour l’adoption d’une stratégie de réduction des risques en matière de tabac, une approche qui a déjà montré son efficacité dans d’autres pays. Explorer de nouveaux leviers s’impose, à l’instar des stratégies adoptées ailleurs, qui ont donné des résultats probants. Ces stratégies s’appuient sur une approche de réduction des risques qui complète les efforts de prévention et de sevrage. Par exemple, la Suède est souvent citée comme un modèle en matière de réduction des risques grâce à l’utilisation de produits alternatifs comme le Snus, les sachets de nicotine et le tabac chauffé. Cette approche innovante a permis au pays de réduire la prévalence du tabagisme à seulement 5,6 %, bien en dessous de la moyenne européenne de 23,5 %. En conséquence, la Suède a également observé une baisse significative des maladies liées au tabagisme.

De même, le Royaume-Uni a mis en place une approche proactive, intégrant des produits de substitution et des programmes de sensibilisation pour encourager les fumeurs à opter pour des alternatives moins nocives. Les résultats de ces deux pays montrent qu’une approche pragmatique et axée sur la réduction des risques peut avoir un impact significatif sur la santé publique.

Il est essentiel que la Tunisie envisage d’intégrer ces modèles éprouvés dans sa propre stratégie antitabac, en tenant compte des spécificités culturelles et sociales du pays. L’adoption de telles mesures pourrait non seulement contribuer à réduire le taux de tabagisme, mais également à améliorer la santé globale de la population.

En somme, l’approche de réduction des risques constitue une alternative prometteuse pour lutter contre le tabagisme, en particulier en Tunisie. Il sera intéressant d’observer comment ces initiatives pourront s’intégrer dans une stratégie globale de lutte contre le tabagisme.

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