Depuis l’élection de Kaïs Saïed à la présidence de la République en 2019, la Tunisie a connu une succession de chefs du gouvernement, marquée par des mandats relativement courts. Sarra Zafrani Zenzeri a été nommée hier jeudi 20 mars 2025 nouvelle cheffe du gouvernement dans un contexte socio-économique difficile.
Bien que Youssef Chahed ait été nommé chef du gouvernement en 2016 par Feu Beji Caied Essebsi, son mandat a été prolongé de près de cinq mois après l’élection présidentielle prenant ainsi fin en février 2020.
Elyes Fakhfakh, membre du mouvement Ettakatol, a été nommé chef du gouvernement en février 2020, en pleine crise sanitaire mondiale due à la pandémie de COVID-19. Son arrivée n’a pas été sans défis : la Tunisie, à l’instar de nombreux pays, était confrontée à un contexte sanitaire et économique très difficile. Le gouvernement de Fakhfakh a dû prendre des décisions d’urgence pour faire face aux conséquences de la pandémie, en plus de la gestion des tensions politiques internes.
La gestion de la crise sanitaire a été une priorité, mais les tensions politiques avec Ennahdha ont conduit à sa démission en juillet 2020, soit après un mandat de 5 mois.
Après le départ de Fakhfakh, le chef de l’Etat a opté pour des personnalités indépendantes pour gérer l’exécutif. Hichem Mechichi, un haut fonctionnaire indépendant, a été nommé à la tête du gouvernement en août 2020. La gestion de Mechichi a été marquée par des désaccords croissants avec le président Kaïs Saïed. Ces tensions se sont intensifiées, culminant avec la décision de Saïed de limoger Mechichi en juillet 2021 après de vives divergences sur la gestion de la crise politique et sanitaire, marquant la fin de son mandat après presque un an.
Najla Bouden : La Première femme à la tête du gouvernement, détentrice du plus long mandat depuis 2019
La nomination de Najla Bouden en octobre 2021 a été un moment historique pour la Tunisie. Elle est devenue la première femme à occuper le poste de cheffe du gouvernement. Sa nomination a été symbolique dans un pays où la question de l’égalité des genres reste un enjeu central. Bouden, sans affiliation politique partisane, a pris ses fonctions dans un climat politique déjà fragilisé notamment après la dissolution de l’Assemblée des Représentants du Peuple par le chef de l’Etat et la mise en place d’une série de mesures exceptionnelles. Après près de deux ans, elle a vu son mandat écourté en août 2023.
Après le départ de Bouden, Ahmed Hachani, un indépendant et ancien fonctionnaire à la Banque Centrale de Tunsie, a pris les rênes du gouvernement en août 2023. Son mandat a été relativement court, ne durant qu’un an. En août 2024, Kamel Madouri a été nommé à son tour à la tête du gouvernement, mais son mandat a également été de moins de huit mois, jusqu’à sa démission en mars 2025. Ces périodes ont été marquées par des ajustements politiques constants et une pression croissante pour répondre aux attentes de la population face à une économie en crise.
Bilan des mandats de chefs du gouvernement sous Kaïs Saïed
| Nom du Chef du Gouvernement | Durée du Mandat (mois) | Date de Nomination | Date de Fin de Mandat |
|---|---|---|---|
| Youssef Chahed | 40 mois (4 mois sous Kaïs Saïed) | Août 2016 | Février 2020 |
| Elyes Fakhfakh | 5 mois | Février 2020 | Septembre 2020 |
| Hichem Mechichi | 11 mois | Septembre 2020 | Juillet 2021 |
| Najla Bouden | 22 mois | Octobre 2021 | Août 2023 |
| Ahmed Hachani | 12 mois | Août 2023 | Août 2024 |
| Kamel Madouri | 7 mois | Août 2024 | Mars 2025 |
| Sarra Zafrani Zenzeri | En cours | Mars 2025 | – |
Sous la présidence de Kaïs Saïed, la Tunisie a connu une succession rapide de chefs du gouvernement, chacun ayant des mandats relativement brefs, souvent marqués par des périodes de crise politique et économique. En moyenne, la durée des mandats des chefs du gouvernement depuis Elyes Fakhfakh jusqu’à Kamel Madouri est de 11 mois. Le mandat de Kamel Maddouri en tant que chef du gouvernement a été l’un des plus courts de l’histoire de la Tunisie, occupant le poste pendant seulement 7 mois, ce qui en fait le deuxième mandat le plus court après celui d’Elyes Fakhfakh, qui a démissionné à peine six mois après sa nomination. À l’inverse, le mandat de Najla Bouden, la première femme à occuper ce poste, a duré 22 mois, en faisant le plus long sous la présidence de Kaïs Saïed.
En tant que sixième cheffe du gouvernement nommée par Kaïs Saïed et deuxième femme à occuper ce poste après Najla Bouden, Sarra Zafrani Zenzeri fera donc face, à l’instar de ses prédécesseurs, à un défi de taille : instaurer la stabilité politique dans un contexte complexe. La durée de sa nomination, tout comme la manière dont elle parviendra à équilibrer les attentes du peuple et les contraintes socio-économiques et politiques, sera déterminante pour la solidité de son mandat.