L’évolution des principaux indicateurs de la Bourse de Tunis durant les dernières semaines est préoccupante. L’indice de référence de la bourse « TUNINDEX » n’est en effet pas sorti du rouge depuis pratiquement quatre semaines consécutives.
Clôturant la dernière semaine du mois de septembre avec la valeur de 7088,49 points, le TUNINDEX a enregistré une décrue de 0.23% par rapport à la semaine précédente et de 2.52% en glissement annuel. Dans la même lignée, le « TUNINDEX 20 », représentant la performance des 20 plus grandes valeurs les plus liquides cotées sur les marchés des titres de capital de la Bourse de Tunis, a clôturé la semaine du 23 au 27 septembre écoulé respectivement par une baisse de 0.13% et de 4.14%.
A l’évidence, la réalité de la bourse est un miroir intégratif qui est en mesure de bouleverser les perspectives économiques.
Les derniers développements qu’a connus le marché financier tunisien notamment à travers des émissions inédites des obligations islamiques « sukuk » par WIFAK Bank et la création des obligations vertes ne semblent pas être encore aptes à revigorer la Bourse de Tunis et susciter l’inflexion attendue.
La modification récente du règlement général de la Bourse, visant à moderniser l’organisation des marchés de la cote en introduisant le marché des fonds et le marché des sukuk, doit servir de jalon pour la promotion de la finance directe. Néanmoins, la performance générale du marché laisse à désirer. De quoi s’agit-il au juste ?
Au-delà de l’impératif des réformes du cadre institutionnel et réglementaire régissant la Bourse de Tunis, dont les effets se font sentir à moyen et long termes, le comportement des opérateurs du marché demeure tributaire des données spécifiques dont l’évolution reste le déterminant majeur de la dynamique d’ensemble surtout sur le court terme.
Autrement dit, si l’on veut faire du marché financier un vrai levier du financement de l’économie en général et de l’investissement privé en particulier pour relever les défis du chômage et de la compétitivité, il est question de considérer fondamentalement un nombre de variables clés.
La réalité est que les variations des cours boursiers sont le reflet de la révision des anticipations sur les dividendes futurs. Les opérateurs de marché cherchent en fait à identifier dans un premier temps la nature des informations auxquelles s’intéressent leurs confrères, puis à modifier la nature de la réaction à leur diffusion. Ces informations que les opérateurs analysent toujours ont trait aux données microéconomiques relatives à la performance de l’entreprise, mais surtout aux données macroéconomiques et politiques.
Premièrement, les données macroéconomiques paraissaient influentes sur le comportement de la Bourse. Faiblesse de la croissance du PIB trimestriel, taux de chômage élevé, persistance de l’inflation… autant de grandeurs macro, dont les réalisations demeurent en moyenne en deçà des « anticipations » du marché. Ce qui incite à des révisions à la baisse des cours.
Deuxièmement, les données politiques qui ne cessent de « brider » le nécessaire regain de confiance. Le marché financier réagit en effet à la diffusion d’informations délivrées par les autorités publiques sous des formes très variées. Les cours des actions fluctuent au gré des déclarations des responsables à la tête des institutions publiques.
Les résultats récemment affichées par l’Instance supérieure indépendante pour les élections de la Présidentielle anticipée ont dû affecter les prix sur le marché financier. L’attentisme béant, qui entoure les prochaines élections législatives, ne peut qu’ajouter aux « incertitudes » qui marquent l’arène politique, voire le processus de consolidation démocratique dans le pays.
La poursuite du flou qui gagne le paysage politique dans le pays, ainsi que l’acharnement partisan ne pourraient favoriser la décision d’investir dans la bourse et susciter l’engouement d’agents supposés être rationnels.
Tant que la classe politique n’est pas encore « consciente » de l’enjeu de la stabilité politique, condition sine qua non à la stabilité macroéconomique, l’aspiration à une bourse active et contributrice à l’effort de financement de l’économie nationale ne peut être qu’un leurre. Si la sophistication des produits offerts sur le marché et le développement du cadre réglementaire régissant la finance directe, sont nécessaires à la promotion du rôle de la bourse, la quête de la stabilité politique, ainsi que la sortie du désarroi économique demeurent toujours la condition préalable de tout revirement au vert de la Bourse.
Telle est la principale leçon à retenir de l’évolution de la performance de la Bourse de Tunis, dont la variation des prix du marché reste toujours sensible aux données du contexte politico-économique du pays.
Autant les techniciens sont appelés à poursuivre leur œuvre de réforme, autant les politiques et responsables publics sont invités à s’inscrire dans la positivité et s’approprier la logique de l’intérêt national aux fins de stabilité institutionnelle, seule gagnante du rétablissement de la Bourse.
Alaya Becheikh