Non, le type de cet article ne fait pas référence à un match de football mais bien à la redoutable régression qu’a subie le cinéma tunisien ces dernières années après avoir été indiscutablement dans les années 80 et 90 à l’avant-garde des cinémas du Maghreb et du monde arabe, étant salué à l’échelle internationale pour le courage de ses sujets et sa grande créativité formelle et esthétique. Le meilleur baromètre de cet «âge d’or » de la créativité tunisienne dans le domaine du septième art, a été sans conteste le plus grand festival du cinéma de la planète et le plus exigeant du point de vue artistique : le festival de Cannes, qui a sélectionné et révélé au monde « les Silences du Palais » et « la Saison des hommes » de MoufidaTlatli, « l’Homme de cendres » « les Sabots en or” et « Bezness » de Nouri Bouzid, «L’ombre de la terre » de Taîeb Louhichi, “Chich Khan” de Mahmoud ben Mahmoud, et Fadhel Jaîbi, « Arab » co-réalisé par le même Jaîbi avec Fadhel Jaziri et cela après «Soleil des hyènes » et « les Anges » de Ridha Béhi, « une si simple histoire » et « Aziza » de Abdelatif Ben Ammar, entre autres, (sans omettre le film “Halfaouine» (Asfourstah) de l’auteur de ces lignes, sélectionné en 1990 après la sélection officielle de «Camera d’Afrique» et «Camera arabe» en 1983 et 1987…)
C’était le bon vieux temps des années 80 et 90… Depuis, faute d’un encadrement législatif et fiscal adéquat, comme celui que nos collègues marocains ont réussi à installer des 1997, le cinéma tunisien qui était le seul cinéma arabe à être présent pratiquement chaque année à Cannes à « disparu des écrans radar» du festival, pour y être remplacé en toute logique et de façon méritée par… celui de nos confrères marocains: la session 2015 ( 13 au 24 mai 2015 ), ne fera pas exception à la règle avec trois films marocains sélectionnés, le long-métrage « Much loved » de Nabil Ayouch, (déjà sélectionné il y a deux ans pour « les Chevaux de Dieu »), et les deux courts-métrages « Rate me” (évaluez moi) de Fayçal Boulifa, ( dont le film “the Curse”, la Malédiction, avait été sélectionné en 2012) et “ Quelques Secondes» de Nora El Hourchi , (dont c’est la première réalisation).
Du côté tunisien de nouveau… zéro film sélectionné, ce qui est malheureusement devenu le cas dans les grandes sections du festival depuis l’année 2001, ( à l’exception , actualité politique oblige, du documentaire sur la révolution tunisienne «Plus jamais peur» de Mourad Ben Cheikh, projeté hors compétition en 2011..)
Le paradoxe est que la Tunisie a été dans les années 80, non seulement à l’avant-garde du point de vue artistique mais également du point de vue de l’encadrement législatif du cinéma, en étant le premier pays du continent africain à soutenir ses créations cinématographiques, non pas uniquement par l’agent public mais surtout par les ressources provenant des bénéfices du secteur audiovisuel .
L’« inventeur » de ce système qui a fait aujourd’hui de la France le premier producteur de films en Europe n’est autre que… le Général De Gaulle !
De Gaulle : précurseur de la défense du cinéma national
Il est de notoriété publique que le Général De Gaulle ne s’entendait pas bien avec les Américains, qui lui avaient préféré le Général Giraud, pendant la deuxième guerre mondiale: Constatant l’hégémonie grandissante d’Hollywood ( aujourd’hui premier poste d’exportation des USA , avant même Boeing!) sur les écrans d’Europe et des pays du Sud, (au détriment de la rentabilité des cinémas nationaux dans leurs propres salles ! ), et déclarant refuser que «tout l’argent des spectateurs français aille enrichir la Mecque du cinéma californien» De Gaulle décréta une mesure révolutionnaire: Qu’un prélèvement de 11% des recettes des salles soit versé à un “Fonds de soutien” à la production de films français, fonds qui sera géré par le CNC ( Centre national du cinéma français,) et distribué par des commissions d’artistes, d’écrivains et de professionnels sur des critères de qualité artistique: c’est grâce à ce fonds que seront financés entre autres les films de la célèbre « Nouvelle Vague» française des années 60, ceux de François Truffaut ou de Jean-Luc Godard, qui deviendront des icônes au niveau mondial.
Avec l’arrivée de François Mitterrand au pouvoir en 1981, son ministre de la Culture, Jack Lang, constatant que les Français regardaient dorénavant plus la télévision qu’ils n’allaient au cinéma, et prolongeant cette logique que ce ne sont pas les caisses de l’État mais les ressources de l’audiovisuel qui doivent financer l’audiovisuel, va ajouter aux prélèvements sur les recettes des salles un prélèvement de 6% sur les recettes publicitaires des télévisions, puis celle des fournisseurs d’Internet, et cela armé d’une philosophie plus que légitime : «Qui tire profit de la diffusion d’images étrangères doit contribuer, même à petite échelle, au financement des images nationales »
En Afrique, la Tunisie sera le premier pays, précurseur a décréter des 1981 un prélèvement sur les recettes des salles pour alimenter un fonds de soutien à la production cinématographique nationale, géré par le ministère de la Culture:
C’est justement ce fonds qui a permis de soutenir financièrement ce fameux «âge d’or » du Cinéma tunisien cité précédemment et qui l’a révélé à l’échelle internationale.
Alors, d’où vient la grave régression économique actuelle de notre cinéma national qui ne manque surtout pas de talents, particulièrement au sein de sa jeune génération ?
Tout simplement de ne pas avoir opéré le nécessaire recyclage de son système d’encadrement par rapport à l’évolution de l’audiovisuel moderne, virage que d’autres pays africains ont , eux, réussi à prendre à temps : le premier à le faire sera le Maroc, (dont les responsables cinématographiques ont toujours déclaré s’être inspirés de l’exemple tunisien pour leur premier fonds ,alimenté par le prélèvement sur les recettes des salles, ) qui a vite constaté que face à la prolifération tolérée des DVD pirates et des décodeurs TV pirates dans tout le Maghreb, les salles de cinéma fermant une à une n’étaient plus sources de recettes suffisantes : s’inspirant cette fois du modèle mis en place par la France ( rejointe depuis par l’Espagne, ce qui a été décisif pour la carrière d’un Pedro Almodovar), Nour Eddine Saïl, Directeur du Centre du cinéma marocain, après avoir été président de la fédération marocaine des ciné-clubs et de la télévision 2M, et considéré comme le véritable “père” du cinéma national, obtient en 1997 un décret qui par un simple ajout à la loi de Finances, fait que, dorénavant 5 % des recettes publicitaires des télévisions publiques et privées sont versées au fonds du soutien au cinéma national. Ce tout petit pourcentage, qui laisse aux télés 95 % de leurs recettes, a pourtant suffi pour faire décupler la production de films marocains, qui est passée d’une moyenne de trois longs-métrages par an comme la Tunisie, à 25 et même parfois 30 films annuels: la quantité favorisant statistiquement plus de qualité possible, le Maroc a en toute saine logique pris dorénavant la place qui était majoritairement celle de la Tunisie sur les podiums internationaux. Et cela tout en surclassant également notre pays, ( où avaient pourtant été tournés les premiers « Star Wars » et « Indiana Jones » à la fin des années 70 ), sur le plan législatif, par une série de mesures attractives, favorisant dans le pays, les tournages des films étrangers, gros pourvoyeurs de devises, qui ont fait du Maroc un véritable « eldorado » de tournage du cinéma international
Qui est le responsable du blocage du cinéma tunisien ?
On peut dès lors, en toute logique se poser la question :“qu’est-ce qui a empêché la Tunisie de recycler, comme le Maroc son système d’encadrement du cinéma par rapport à l’évolution de l’audiovisuel moderne ?“
Il y a à cela deux raisons principales : tout d’abord en Tunisie, le cinéma était géré jusqu’à la Révolution par une direction du ministère de la Culture qui, en tant que service administratif, ne possédait pas comme le Centre du cinéma marocain « l’autonomie financière », nécessaire et indispensable pour pouvoir recevoir directement des prélèvements provenant du marché audiovisuel: Devant la diminution des recettes des salles, la Tunisie avait fini par budgétiser son fonds de soutien, désormais fourni directement par le Trésor public au ministère de la Culture , avec un montant plafonné fixe , non lié aux améliorations possibles des recettes de l’audiovisuel .
Ensuite, et surtout, le succès marocain découle d’un détail tout simple mais décisif : au Maroc, en 1997, le même ministère (Culture et Communication) gérait en même temps le cinéma et la télévision : le même ministre pouvait donc tout à fait ordonner à la télévision de soutenir sur le plan économique son grand frère le cinéma, indispensable miroir de sa société pour le spectateur marocain, et pourvoyeur potentiel de prestige à l’État sur le plan international!
Par contre en Tunisie le “ gérant” du secteur cinéma, le ministère de la Culture a depuis très longtemps été séparé du ministère de la Communication, qui est resté lui, le gérant du secteur de la télévision.
Le signataire de ces lignes a eu le privilège d’être le président de la commission de réforme du cinéma, puis le coordinateur de toutes les organisations cinématographiques tunisiennes, nées avant et après la Révolution: cela probablement pour mon expérience d’universitaire, doctorant d’État en cinéma, mais surtout en tant que vieux routier du militantisme cinématographique, membre fondateur, avec Hassan Daldoul entre autres, de l’Association des cinéastes tunisiens, et de la Fédération panafricaine des cinéastes ( Fepaci) à Tunis en 1970, ainsi que rédacteur, entre autres résolutions, du “Manifeste de Niamey des cinéastes africains” en 1982
Je suis donc tout à fait à l’aise pour témoigner qu’à chaque fois que nos différentes commissions mêlant toutes les générations de jeunes ou moins jeunes cinéastes, préconisait d’instaurer, ( à l’instar de la France, de l’Espagne ou.. du Maroc), un faible prélèvement sur les recettes de la publicité télévisuelle, pour soutenir la production cinématographique, et notamment celle des nouveaux cinéastes, le représentant du ministère de la Communication y opposait, sur ordre de son ministre, son veto absolu
Notre seule victoire aura été d’obtenir, en été 2011 comme première étape , la création d’un Centre national du cinéma tunisien (CNCI), enfin pourvu de l’indispensable autonomie financière : cependant, en l’absence de décret du ministère des Finances pour alimenter son fonds de soutien à partir de prélèvements sur les recettes de l’audiovisuel global, ce qui permettrait entre autres de créer une seconde commission de soutien, réservée aux “premières œuvres”, le CNCI risque de demeurer longtemps dans sa mission d’augmentation du soutien financier à tous les secteurs du cinéma , une « coquille vide », un simple établissement de gestion administrative du secteur, succédant à la Direction de cinéma du ministère de la Culture.
Or la situation du cinéma en Tunisie est devenue d’autant plus dramatique, voire explosive, que dans une étrange logique de « fuite en avant », moins on avançait vers une solution pour soutenir le financement des nouvelles productions à venir, plus on multipliait les écoles de cinéma et centres de formation audiovisuelle, dans tous le pays, multipliant ainsi les futurs «chômeurs» involontaires, faute de marché de production audiovisuelle qui soit organisé , régulé et encadré par l’État
Ce qui fait, qu’ avec plus de 300 nouveaux diplômés par an arrivant sur un marché de travail quasi-inexistant, malgré l’apparition de quelques nouvelles chaînes TV, on peut constater, comme le note avec justesse sur les réseaux sociaux, le réalisateur intègre et grand défenseur du documentaire tunisien, Hichem Ben Ammar, que toute une partie de la nouvelle génération reporte trop souvent sa rancœur contre la génération précédente de cinéastes, accusés à tort de monopoliser, le faible « magot” limité géré par le CNC.I, voire même en les accusant parfois d’être tous des” suppôts de l’ancien régime » alors que leur cinéma a toujours été un lieu de résistance et de dévoilement des tabous (y compris celui de la torture policière, comme dans le film «les Sabots en or», mutilé à sa sortie).
Quels sont les recours de la nouvelle génération ?
Faute de soutien fiscal national enfin organisé, les jeunes cinéastes, pourraient-ils en attendant se tourner vers l’un des trois « fonds panafricains » récemment créés ou en voie de création ?
-Le premier, le FPCA ( fonds panafricain du cinéma et de l’audiovisuel) a vu, sur la demande de feu Charles Mensah, alors président de la Fédération panafricaine des cinéastes, sa fondation légale à Tunis en juillet 2013, suite à l’engagement de la Tunisie, sollicitée en ce sens par son excellence Abdou Diouf, Secrétaire général de l’organisation internationale de la francophonie( OIF) et ex-président du Sénégal ; Mais ce fonds, faute de donations prévues par les Etats africains, n’est pas encore entré dans son stade exécutif.
-Le second fonds panafricain, le FSICA ( fonds de soutien aux industries cinématographiques africaines) va être relancé au niveau de l’Union africaine ( qui sollicitée en ce sens en 2003 et 2006 ne l’a pas encore mis sur pied ) par le nouveau secrétaire général de la FEPACI, le malien Cheik Oumar Sissoko, qui constatant que son prédécesseur avait réclamé un organisme autonome et transparent, échappant donc à son pouvoir financier direct, refuse de reconnaitre le FPCA , et se tourne pour la troisième fois vers l’UA, pour essayer de créer un organisme similaire qu’il pourrait piloter à sa guise du point de vue financier.
-Le troisième fonds panafricain, le FCA, ( fonds du cinéma africain) lancé cette année par le « père » du cinéma marocain, Nour Eddine Saïl, à présent retraité du CCM, ( lequel avait puissamment soutenu sous sa direction la finition technique de très nombreux films d’Afrique noire et du Maghreb), est encore à l’état de projet, et sera financé lui, uniquement par des fonds privés marocains
En attendant, tandis que la Tunisie reste bloquée au niveau de son projet de réforme, on a vu d’autres pays, tel le Tchad, pourtant un des pays les plus pauvres d’Afrique, réussir à aller encore plus loin, que les exemples cités précédemment, dans l’utilisation des ressources de l’audiovisuel moderne pour soutenir leur culture nationale: C’est ainsi que le film «Gris -Gris » du Tchadien Mahamat-Saleh Haroun, sélectionné en compétition officielle à Cannes, il y a deux ans à peine, a été produit grâce à un fonds de soutien à la production culturelle, prélevé… non pas sur les salles de cinéma (inexistantes au Tchad) ni sur une télévision aux trop faibles ressources, mais … sur 10 % des recettes du seul secteur désormais capable de diffuser des images, qui soit extrêmement rentable en Afrique: celui de la téléphonie mobile.
C’est également à la téléphonie mobile, grâce à l’intervention décisive de la ministre de la Culture de l’époque Khalida Messaoudi, que l’Algérie avait eu recours, pour un prélèvement sur son chiffre d’affaires, destiné à soutenir l’ensemble des industries culturelles du pays.
Une mini réforme de la fiscalité est nécessaire
D’autres actions de soutien au financement de la culture sont possibles et ont été évoquées dans les commissions de 2011 : les innombrables « vidéoclubs » de Tunisie qui ont causé du piratage toléré « tirent profit de la diffusion d’images étrangères », mais sans « jamais contribuer au financement des images nationales », selon la philosophie moderne de soutien à l’audiovisuel, devrait pouvoir le faire indirectement tout simplement par l’instauration d’une petite taxe (ne serait-ce que 20 millimes) sur le prix de vente du DVD vierge ( du moins sur la partie contrôlable vendue de façon officielle et non sur le marché parallèle) : ainsi chaque copie de film étranger, par un vidéoclub ou par la gravure après téléchargement sur Internet par des particuliers, encore plus nombreux, ferait rentrer une petite somme dans le fonds de soutien à la création et aux industries culturelles : d’autres sources légitimes, comme la réaffectation au « fonds » d’une partie des taxes sur la TV et l’ audiovisuel prélevées directement sur la facture de la STEG, ou également ce qui est tout à fait tout aussi légitime, la réaffectation au ministère de la Culture des ressources du « fonds de l’essor culturel » qui était prélevé au début des années 80 sur les recettes de la bière et autres boissons alcoolisées, et qui, sous le gouvernement de Rachid Sfar en 1986, avait été détourné vers le Trésor public.
Si bien qu’ on se prend aujourd’hui à rêver qu’en Tunisie , au sein de notre nouveau gouvernement d’union nationale, notre nouvelle ministre de la Culture, qui ne manque pas de détermination ni d’ intégrité, puisse, soutenue par les commissions concernées des députées de l’ARP, obtenir de son collègue des Finances un simple ajout à la future loi de Finances permettant, à l’instar de l’Algérie, qu’ un faible pourcentage des taxes sur la téléphonie mobile, (appelons le « 5 % pour la culture ! ») puisse soutenir sérieusement tous les secteurs de la création et des industries culturelles tunisiennes, chacune selon ses besoins spécifiques (sachant que le cinéma, qui est le plus coûteux de tous , aura pas la force des choses la part majoritaire qui lui est nécessaire), ce qui permettrait enfin, entre autres,à toutes nos nouvelles générations de cinéastes tunisiens de renouer avec le Grand public, ce dialogue particulièrement fécond, porteur de fierté nationale, et de tolérance envers toutes les diversités de notre pays, qui était celui de notre création cinématographique dans les années 90 ! et également, à l’échelle internationale, de redonner une image plus juste de la richesse des réalités tunisiennes , en espérant dans ce cadre, faire très vite nouveau « match nul » ( au moins deux à deux?) avec les pays frères et amis!
Les cinémas du Sud à cannes 2015
Ce premier article, consacré à la 68e session du festival de Cannes nous aura surtout servi comme vous l’avez constaté à tenter d’éclaircir, pour les lecteurs de “Réalités » la situation de blocage dans laquelle s’est enlisé le cinéma tunisien, qui est toujours dans l’attente de l’indispensable « coup de pouce » législatif et fiscal opéré avec succès par d’autres pays, et également a fournir une des explications possibles des raisons de son absence des sélections de Cannes 2015.
Fort heureusement, le ministère de la Culture a maintenu sa tradition d’ouvrir le stand « Tunisie, » au “marché du film” du festival, stand autrefois tenu par les différents syndicats de producteurs, et aujourd’hui géré par le CNCI, et qui, même en l’absence de sélections officielles, a le mérite de proposer chaque année et souvent avec succès, toutes les dernières productions tunisiennes aux acheteurs éventuels
En attendant nos article des prochaines semaines, qui présenteront les nouveautés de cette nouvelle session cannoise, dont l’affiche rend hommage au centenaire de la naissance de la grande actrice suédoise Ingrid Bergman (dont l’une des deux filles qu’elle a eues avec le réalisateur Roberto Rossellini, génie du « Néo réalisme » italien, l’actrice Isabella Rossellini, va présider cette année, à cette occasion, le jury de la section « un certain regard ») penchons-nous, en priorité, ( en citoyen du pays fondateur des JCC oblige !) , d’abord sur les cinémas du Sud et précisément sur la présence arabo-africaine à Cannes 2015:
Outre la forte présence citée du Maroc cette année, qu’en est-il des cinémas de l’Afrique noire ? Faute de grands films en compétition comme l’an dernier “Timbuktu” du mauritanien Abderrahmane Sissako, grand triomphateur des César 2015, (et qui a atteint le record unique pour un film africain de 1 200 000 spectateurs en France,) l’Afrique noire semble cette année avoir fait l’objet d’une séance de “rattrapage”:
Tout d’abord avec la présence de la chanteuse malienne Rokia Traoré dans le Grand jury des longs-métrages, présidé cette année par les Américains Joël et Ethan Coen, et par la présidence du jury des courts-métrages attribué à Abderrahmane Sissako, ensuite par la présence de deux vétérans africain hors compétition : le Malien Souleymane Cissé, dont le documentaire “Oka” sur la spéculation financière dans son pays aura droit à une “projection spéciale”, et le père du cinéma africain, feu le réalisateur sénégalais Sembene Ousmane, , dont l’une des œuvres restaurée sera présentée dans la section « Cannes classics”. Fort heureusement, la sélection en toute dernière minute, ( non annoncée lors de la conférence de presse du festival ) dans la section “un certain regard” du film “Lamb” premier long-métrage du jeune cinéaste éthiopien Yared Zeleke, ( dont on avait vu il y a quelques années le film de fin d’études dans la section des films d’étudiants “ciné fondation”), est venu corriger cette impression de rattrapage avec cette année, une main franchement tendue du festival vers la nouvelle génération qui émerge au sud du Sahara, et de surcroît, ce qui est rare, venant d’un pays africain non francophone!
– Pour le monde arabe, outre les trois cinéastes marocains présentés au début de cet article, tous sélectionnés par « la quinzaine des réalisateurs”, laquelle présentera également le court-métrage “Pitchoune” réalisé par le nouvel acteur franco-algérien qui monte Reda Kateb (petit-neveu du célèbre écrivain algérien Kateb Yacine) , il faut noter la percée du jeune cinéma palestinien avec “ Dégradé » le premier long-métrage des frères Arab et Tarzan Nasser, sélectionné par la section “Semaine de la Critique”, et le 1er court-métrage du jeune palestinien Basil Khalil “Ave Maria”, sélectionné dans la compétition officielle des courts-métrages, aux côtés du 1er court-métrage du libanais Ely Dagher “ Waves ’98 “.
En attendant de pouvoir vous parler en détail de tous ces films, une fois que nous les aurons vus à Cannes, nous vous présenterons dans une prochaine livraison , quelques uns des grands noms du cinéma international attendus cette année, dont quelques « inconnus » nommés Woody Allen ou Nanni Moretti !
Par Férid Boughedir