Maroc : le discours offensif du roi Mohammed VI

Sans jamais citer de pays, le roi du Maroc a dénoncé vendredi 20 août « des attaques méthodiques » contre le royaume.
Manifestement, le roi du Maroc, Mohammed VI, avait beaucoup de choses à dire. Dans un discours à la Nation, à l’occasion du 68e anniversaire de la Révolution du roi et du peuple, il a dans un premier temps fustigé les « attaques méthodiques dont le Maroc a été dernièrement la cible de la part de certains pays ». Un thème qui lui a permis de dire le fond de sa pensée sur la position qu’occupe le Maroc dans le concert des nations, et tout particulièrement dans son environnement immédiat.
*Un discours droit au but
Selon lui, le Maroc est visé « du fait qu’il est un État pleinement constitué depuis plus de douze siècles, outre une histoire amazighe au long cours, et que depuis plus de quatre siècles, il est gouverné par une monarchie citoyenne, présidant à la destinée du pays et la façonnant dans une symbiose totale entre le Trône et le peuple ».
Plus largement, « le Maroc, au même titre que certains pays du Maghreb arabe, fait face à une agression délibérée et préméditée. Agrippés à […] des considérations obsolètes, les ennemis de l’intégrité territoriale du royaume ne souhaitent pas que le Maroc demeure la nation libre, forte et influente qu’il a toujours été », a-t-il dit. Selon le monarque, certains pays, notamment européens, « craignent pour leurs intérêts économiques, leurs marchés et leurs sphères d’influence dans la région maghrébine ».
Ce discours royal intervient dans un contexte de fortes tensions autour du Maroc. D’abord avec son voisin direct, l’Algérie. Plus tôt cette semaine, le 18 août, Alger a annoncé « revoir » ses relations avec le Maroc, accusé d’être impliqué dans les incendies meurtriers qui ont ravagé le nord du pays. Les relations entre Rabat et Alger sont tendues depuis des décennies en raison du soutien de l’Algérie au Front Polisario qui réclame un référendum d’autodétermination dans le territoire disputé du Sahara occidental, tandis que le Maroc propose un plan d’autonomie sous sa souveraineté. Le 31 juillet, à l’occasion de la fête du Trône, Mohammed VI avait invité, dans un discours direct, le président algérien « à faire prévaloir la sagesse » et « œuvrer à l’unisson au développement des rapports » entre les deux pays. Le monarque avait également réitéré son appel à rouvrir les frontières entre les deux pays, fermées depuis l’été 1994 à l’initiative de l’Algérie.
Sur le plan international, récemment, le royaume a été accusé d’avoir utilisé le logiciel d’espionnage Pegasus, conçu par la société israélienne NSO, dans le cadre d’une vaste enquête menée par un consortium de 17 médias internationaux sur la base de données obtenues par l’organisation Forbidden Stories et par Amnesty International. Rabat a catégoriquement démenti « ces allégations mensongères et infondées » et enclenché plusieurs procédures judiciaires en France, en Espagne et en Allemagne. Des journalistes de différents pays ont, eux aussi, déposé des plaintes après l’enquête publiée en juillet par ce consortium, démontrant que le logiciel Pegasus aurait permis à plusieurs pays, dont le Maroc, d’espionner des journalistes, des hommes et des femmes politiques, des militants des droits humains ou encore des chefs d’entreprise.
Le souverain y a vu « une vaste campagne de dénigrement à l’encontre de [leurs] institutions sécuritaires », a-t-il défendu. « Ils ne veulent pas admettre que les règles du jeu ont changé, que, désormais, nos pays sont totalement aptes à gérer leurs affaires, à mettre en valeur leurs ressources et leurs potentialités, dans l’intérêt bien compris de nos peuples. »
*Repartir sur de nouvelles bases
Mohammed VI a néanmoins ensuite souhaité « fonder des relations solides, constructives et équilibrées, notamment avec les pays voisins », en citant l’Espagne, mais aussi la France et l’Allemagne, dans ce discours. Pour le monarque, la sortie de crise ne peut se faire que par le haut, que ce soit dans la récente crise avec l’Espagne ou dans les rapports avec les organisations internationales. Et d’expliquer que certains des dirigeants de ces pays « ne saisissent pas encore que le problème ne réside pas dans les régimes des pays du grand Maghreb, mais bien dans les leurs, toujours teintés d’un passéisme désespérément rétif aux évolutions du temps ».
« Bien plus, plutôt que d’appuyer les efforts du Maroc dans le cadre d’un équilibre souhaité entre les pays de la région, des rapports ont franchi toutes les limites de l’acceptable, allant jusqu’à recommander que soit freinée la dynamique de développement de notre pays, au motif captieux qu’elle crée une dissymétrie entre les États maghrébins », a par ailleurs dénoncé le roi dans son discours.
Pas de quoi freiner l’agenda interne. En effet, ce discours intervient dans un contexte de préparatif des prochaines élections législatives, régionales et locales du 8 septembre. En attendant ce rendez-vous électoral, le royaume s’est engagé dans un train de réformes et de projets dans le cadre de la mise en œuvre du Modèle de développement et du Pacte national pour le développement.
(Le Point)

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