Le Conseil européen a organisé lundi dernier un débat autour de deux thématiques : la violence à l’encontre des femmes et le traitement qui lui est consacré dans les médias et la traite des êtres humains en Tunisie. Plusieurs représentants de la société civile, des médias et des juristes ont pris part à ce débat.
Les présents ont tous pointé du doigt la banalisation de la violence à l’encontre des femmes dans les médias. La critique n’a pas seulement porté sur la façon avec laquelle les animateurs évoquent certains sujets, notamment la violence dans le couple, mais aussi les choix éditoriaux des directions qui choisissent le sensationnel. A cela s’ajoute l’inexistence de formation en psychologie et en sociologie des animateurs traitant de ces sujets. Ces derniers n’invitent pas des professionnels dans les plateaux.
Aujourd’hui, les droits élémentaires de la femme sont menacés, mais y remédier ne fait pas partie des priorités des politiques ni du débat public. Il existe aussi un manque d’implication des femmes elles-mêmes quand il s’agit de défendre leurs droits, ainsi qu’une gène quand on les appelle à témoigner.
Bochra Bel Haj Hmida, avocate et présidente de la commission “droits et libertés” au sein de l’ARP, présente au débat a souligné « la rétrogradation des mentalités en Tunisie a commencé dix ans avant la chute du régime de Ben Ali qui a choisi une politique à double faces. D’un côté, élaborer des lois pour répondre aux attentes des institutions internationales et véhiculer une image émancipatrice des femmes et de l’autre, faire rétrograder les mentalités. Je cite l’exemple de la loi qu’on a exigée contre le harcèlement sexuel et qui a été adoptée tout en incluant un volet portant sur l’atteinte aux mœurs. Aujourd’hui, on entend de nouveau parler du devoir de l’obéissance de la femme à son mari alors qu’elle a été abolie en 93 et de la tutelle de la femme bien que la loi tunisienne ne parle de tutelle que pour les mineurs. Depuis 1993, la femme a le droit de voyager librement avec ses enfants, depuis 1997 jusqu’à aujourd’hui, une mère se retrouve obligée de recourir à une autorisation accordée par le juge pour voyager avec ses enfants alors que la loi ne stipule pas cela. S’il y a quelque chose qui peut changer les choses, c’est un observatoire commun constitué des médias, de l’Etat représenté par la justice et les ONG, conciliant la liberté d’expression aux valeurs à véhiculer au sein de notre société. »
En effet, aujourd’hui en Tunisie, il ne suffit pas d’élaborer des lois. Un travail commun s’impose impliquant un travailau niveau des mentalités, un traitement correct des problèmes que rencontre la Femme dans les médias et une institution contrôlant cela. Il est aussi à relever que l’appel des femmes victimes de violence ou de viol à témoigner, devrait être élaboré avec beaucoup de prudence car il peut conduire à leur agression, voire à leur assassinat en représailles.
Il est aussi à souligner que les retombées d’un viol sur une écolière, par exemple, touchent toute une communauté féminine, comme le retrait des autres filles des bancs de l’école pour les protéger.
Quant à la traite des humains, il s’agit de réseaux internationaux qui recrutent surtout en Afrique de l’Ouest, des femmes qu’ils ramènent, entre autres en Tunisie. Elles voient leurs passeports confisqués et se retrouvent réduites à l’esclavage. Elles sont surexploitées professionnellement, chez des particuliers, mais aussi sexuellement. Il n’existe pas de lois en Tunisie sanctionnant la traite des humains.
Hajer Ajroudi