Mise à niveau du secteur agricole: Une urgence

A l’époque punique, du temps de l’agronome Magon, notre pays était le grenier de Rome. Entre-temps, l’agriculture est devenue le parent pauvre de l’économie tunisienne, au point d’être contraint d’importer des céréales pour notre alimentation, même durant les années à pluviométrie généreuse lorsqu’il y a de bonnes récoltes de céréales.
C’est dire que le secteur agricole a été marginalisé au profit d’autres secteurs économiques comme le tourisme pour exemple, qui a prouvé cependant sa fragilité aux évènements sécuritaires, malgré le coût élevé des investissements consentis en infrastructures de base et en crédits bancaires.
En effet, les grands commis de l’Etat qui conçoivent les politiques de développement qui sont enfermés dans des bureaux feutrés et“nourris” par les “retombées hypothétiques” de la mondialisation galopante, oublient souvent les vertus cardinales de l’agriculture.
Attachement à la terre, ce qui réduit l’exode rural et la désertification des zones rurales autosuffisance alimentaire des populations rurales, création massive d’emplois moyennant des investissements modestes surtout lorsqu’il s’agit de cultures irriguées et intensives.
Les produits agricoles tunisiens peuvent et doivent être exportés, ce qui rapporte des devises.
Ils sont également à l’origine d’industries alimentaires, génératrices de valeur ajoutée.
L’Aleca, c’est pratiquement pour demain, ce sera alors le déferlement massif sur notre marché des produits agricoles et alimentaires fabriqués de façon industrielle et compétitive en Europe.
Les conséquences seront évidentes sur les structures et la population agricole : un démantèlement rapide. C’est pourquoi, nous devons mettre à niveau d’urgence notre agriculture pour la préparer à faire face à cette mondialisation, avec bien sûr, le soutien financier, la technologie et l’expertise des pays de l’Union européenne. Il faut bien enrober la pilule avec du sucre.
Certes, notre agriculture souffre de plusieurs faiblesses structurelles telles que l’effritement de la propriété foncière et de l’exploitation, ainsi que le vieillissement des chefs d’exploitation, qui sont de véritables entraves à la modernisation et au développement de l’agriculture tunisienne. Celle-ci manque d’investissements pour améliorer la qualité de ses produits et sa rentabilité, faire baisser ses coûts et intensifier ses systèmes de culture.
Or les petits paysans sont surendettés à cause des intempéries tandis que le taux de pénétration du crédit agricole est très réduit : 11% des agriculteurs accèdent au crédit bancaire. C’est scandaleux
Cependant, notre pays dispose d’atouts naturels et humains considérables que nous devons mettre à profit : proximité de l’Europe, climat et sols favorables aux produits d’arrière-saison et aux primeurs, multiplicité des produits du terroir, très appréciés par les consommateurs pour leurs saveurs spécifiques telles que raisin muscat de Rafraf, oranges maltaises, deglet Ennour, grenades de Gabès et Testour,…
Nous devons miser sur les cultures biologiques, la qualité et l’originalité de nos produits. C’est pourquoi le savoir-faire de nos vieux paysans doit être préservé.
Les investissements étrangers qui n’ont pas dépassé 800 MD en 4 ans sous forme de partenariats noués avec des agriculteurs tunisiens portant sur des transferts de technologies en vue de favoriser l’exportation des nos produits agricoles vers l’UE, doivent être développés et encouragés. Dans le même ordre d’idées, à savoir l’intensification de l’agriculture, le ministère des Domaines de l’Etat et des affaires foncières vient de récupérer comme par “une baguette magique” 68.000 hectares de terres domaniales sous forme de 120 fermes couvrant de vastes superficies agricoles et 5000 ha en petits lots, suite à des décisions de déchéance qui ont frappé sociétés de mise en valeur et de développement agricoles (SMDA) et particuliers qui étaient des locataires contractuels.
Il s’agit de manquements constatés aux cahiers des charges souscrits par les exploitants : engagements d’investir non respectés, programmes de travaux non réalisés, montants de loyers non versés,…
Il faut dire que l’OTD qui exploite 156.000 ha dont 72.000 ha de, parcours extensifs non cultivés situés dans le sud tunisien, n’a pas les moyens d’investir. D’ailleurs sa production ne dépasse pas les 2% de la production nationale.
Selon les déclarations de Béchir Khfiri, Directeur général de l’Office des terres domaniales à Express FM, les 120 fermes récupérées seront exploitées par l’Office à titre provisoire (cultures extensives) en attendant la préparation des dossiers de location de ces 120 fermes.Cahiers des charges, études, expertises et appels d’offres en vue de leur location à des particuliers ou à des sociétés de mise en valeur agricole, opération qui nécessite 4 longues années d’attente, car la capacité de l’Office est de 30 fermes par an.
Cela signifie que durant quatre ans, le potentiel de production de richesses et de création d’emplois  extraordinaires de ces 120 fermes, va être gelé et inexploité parce que certains services de l’OTD, fonctionnent à un rythme ralenti de fonctionnaires respectueux des horaires et des congés, alors que notre pays vit une crise économique aiguë ?
Il y a là une situation irrationnelle et anormale qui mérite une solution vigoureuse. Par exemple, mettre en place une task-force, avec plusieurs équipes d’ingénieurs agronomes qui remplissent les bureaux du ministère de l’Agriculture et les charger chacune de visiter les fermes en l’objet, gouvernorat par gouvernorat, et d’élaborer en trois mois maximum les dossiers requis pour lancer les 120 appels d’offres.
Il suffit d’adopter les mêmes normes pour les rendements des cultures et pour les prix, lors des études de rentabilité. Cela est parfaitement possible, une mission de “sécurité alimentaire”, quitte à accorder une prime pour les ingénieurs en l’objet qui seront assistés par des juristes et des économistes pour veiller à la conformité des contrats.

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