Le coup d’envoi de la dixième édition du Forum international de la santé numérique à été donné dans la soirée de ce jeudi 20 février sous le thème « Intelligence naturelle et intelligence artificielle au service du patient ». Lors de la séance inaugurale, le ministre de la Santé, Mustapha Ferjani, a mis en avant les transformations profondes que connaît le secteur médical grâce à la digitalisation et l’essor de l’intelligence artificielle (IA).
Il a estimé que l’intégration de l’intelligence artificielle dans le domaine de la santé n’est plus un simple concept futuriste. Aujourd’hui, des outils basés sur l’IA permettent déjà d’améliorer la précision des diagnostics, notamment en mammographie et en dépistage précoce des cancers. L’essor de la télémédecine, des chatbots médicaux et des plateformes de suivi des patients à distance constitue une avancée majeure, ouvrant la voie à une médecine plus personnalisée et accessible.
« L’IA dépasse parfois l’expertise humaine, notamment dans le diagnostic précoce des cancers. Ce n’est plus une hypothèse, c’est une réalité », a affirmé Mustapha Ferjani, insistant sur l’importance d’adapter les pratiques médicales aux nouvelles technologies.
La Tunisie à l’avant-garde de la télémédecine
Consciente des défis liés à l’accessibilité des soins, la Tunisie accélère le développement de la télémédecine. Une nouvelle plateforme numérique a été inaugurée par le ministère de la Santé, dotée de 12 postes dédiés à l’interprétation d’imageries médicales, y compris les mammographies réalisées dans les régions. L’objectif est d’optimiser l’utilisation des équipements disponibles et de pallier le manque de spécialistes dans certaines zones.
Des initiatives locales innovantes voient également le jour. Le ministre a salué le travail des équipes tunisiennes qui développent des logiciels d’intelligence artificielle appliqués à l’imagerie médicale. « Grâce à ces avancées, nous pouvons améliorer l’accès aux soins pour les populations des régions intérieures et réduire les inégalités médicales », a-t-il souligné.
La modernisation du système de santé passe également par la digitalisation des dossiers médicaux. Selon Mustapha Ferjani, 95 % des hôpitaux tunisiens sont désormais informatisés, bien que la transition vers une gestion sans papier reste un défi.
Autre avancée majeure : la mise en place d’un système de traçabilité des médicaments grâce à un QR code, en collaboration avec l’ambassade des États-Unis. Ce dispositif permettra de lutter contre la contrefaçon et le marché parallèle, tout en garantissant une meilleure disponibilité des médicaments.
« L’informatisation de la gestion hospitalière et des finances publiques est un levier essentiel pour améliorer la transparence et rationaliser les dépenses de santé », a ajouté le ministre.
Entre opportunités et risques, l’IA sous surveillance
Si les perspectives offertes par l’IA sont prometteuses, elles soulèvent également des questions éthiques et sécuritaires. La confidentialité des données médicales, l’impact des algorithmes sur les assurances santé et l’éventuelle disparition de certaines spécialités médicales figurent parmi les préoccupations évoquées lors du forum.
Des experts, comme Geoffrey Hinton, l’un des pionniers de l’intelligence artificielle, ont déjà mis en garde contre les risques d’une dépendance excessive aux technologies. Mustapha Ferjani a insisté sur la nécessité d’un encadrement strict et d’une approche éthique : « L’IA doit rester un outil au service des soignants et non les remplacer ».
Face à ces enjeux, le ministre a appelé à une collaboration entre chercheurs, médecins et ingénieurs pour garantir une utilisation responsable des nouvelles technologies. Il a également mis en avant les initiatives récompensées lors du forum, qui encouragent le développement de solutions innovantes en santé numérique.
« Le futur de la santé, c’est aujourd’hui, et nous devons l’écrire ensemble », a-t-il conclu, affirmant que la transformation du système de santé tunisien passe par une adoption réfléchie et maîtrisée des avancées technologiques.