ONFP : 42 ans de bons et loyaux services rendus à la famille

En ce mois de mars 2015, l’Office national de la famille et de la population fête son 42e  anniversaire.  Qu’il est long et fructueux le chemin parcouru par cette institution unique en son genre. Retour sur cette épopée des temps modernes, ses défis et ses perspectives.

Créé en 1973, l’ONFP, établissement public  doté de la personnalité civile et de l’autonomie financière, placé sous la tutelle du ministère de la Santé est chargé   de conduire la politique du gouvernement en matière de population visant à assurer un développement  harmonieux  de la population et du secteur économique et social.

Maîtriser la croissance démographique

Il faut rappeler que dès l’indépendance de la Tunisie, l’une des priorités des  politiques était  de maîtriser au mieux la procréation.  A l’époque, la dure réalité était que 80 % de la population était analphabète, deux Tunisiens d’âge actif sur cinq étaient au chômage; 62% des Tunisiens étaient sous alimentés, l’état du logement était déplorable, les conditions d’hygiène déficientes, l’équipement sanitaire minimal. La population était de 3,8 millions d’habitants en 1956 avec un accroissement naturel qui approchait les 3%. Les taux bruts de natalité et de mortalité étaient respectivement de 48% et de 20%. La moitié de la population avait moins de 15 ans et le nombre moyen d’enfants par femme âgée entre 30 et 39 ans était de 5,9. Les impératifs du développement économique passaient inévitablement par une meilleure maîtrise des de la croissance démographique.

Dès le début des années soixante, l’Etat prend un certain nombre de mesures préalables au lancement d’une politique de planification familiale: libération de la propagande anticonceptionnelle et importations des produits contraceptifs (1961), qui seront distribués gratuitement. La femme tunisienne se trouvait  être la première bénéficiaire de cette politique de contrôle des naissances : elle n’était plus née pour procréer, mais avait la possibilité de choisir le moment de sa maternité, la taille de sa famille.

Création de l’ONFP et  légalisation de l’avortement 

En 1973 un pas de géant est réalisé en légalisant l’avortement et en créant l’Office national de la famille et de la population. C’était un  autre cadeau à cette Tunisienne, à qui, dès les premiers jours de l’indépendance (1956), on avait offert, sur un plateau d’argent,  le Code du statut personnel. Faut-il rappeler que ce fut fait bien avant la proclamation officielle de la République (1957)  et le texte de la Constitution (1959) .

Selon les textes qui la réglementent, cette nouvelle institution ne s’occupera pas uniquement du planning familial, mais de tout ce qui a trait à la promotion du bien-être familial. Ses missions sont diverses, elles concernent la recherche, l’orientation, la coordination et la prestation des activités de population et de planning familial.

Si la décennie 1964-1974 était celle de la limitation des naissances (adéquation entre la croissance démographique et le développement socio-économique), celle de 1974-1984, sous l’égide de l’ONFP, fût celle des espacements des naissances avec comme objectif la protection du couple mère-enfant.

De 1984 à 1994, la promotion de la santé de la famille fût le fer de lance des activités de l’Office. Mais à partir de 1994 et pour une dizaine d’années, la santé de la reproduction a été à l’honneur. C’était une  nouvelle  orientation du programme, tourné vers une perspective centrée sur le concept du droit à la santé de la reproduction, un droit universel fondamental initié par les conventions internationales et ratifiées par les États dont la Tunisie

Depuis 2004, le programme de  l’ONFP est la consolidation des acquis avec de nouvelles orientations qualité et spécificités (Déclaration du millénaire pour le développement (OMS))

Plusieurs domaines d’intervention

En matière de santé de la famille et de la reproduction, l’ONFP, intervient dans plusieurs domaines : consultation prénuptiale, consultations pré et postnatales consultations de planning familial, prévention et prise en charge des IST (infections sexuellement transmissibles)/SIDA prise en charge de l’infertilité, dépistage des cancers du col de l’utérus et du sein prise en charge de la ménopause, assistance médicale aux femmes victimes de violence, prise en charge médicale des adolescents et des jeunes, etc.

L’ONFP s’est également investi dans les services d’éducation. Il œuvre pour le changement de comportement, des mentalités et des attitudes. Les jeunes sont particulièrement ciblés. Ainsi il s’est doté de structures spécialisées à cet effet : les «Espaces amis  des jeunes » 21 sont fonctionnels, 3 sont en cours de création et qui sont implantés sur tout le territoire.

La recherche est un autre des nombreux domaines de prédilection de l’ONFP. Le Centre de formation internationale et de recherche en santé de la reproduction et en population (CEFIR) est une structure au sein de l’ONFP, créée en 1978 qui veille sur l’élaboration et l’application des stratégies de l’ONFP en matière de formation et de recherche. Parmi ses missions : dispenser des cycles de formation nationale et internationale au profit du personnel médical, paramédical, éducatif et administratif en vue d’une meilleure qualité des services en santé de la reproduction, appuyer  les efforts d’autres pays du Sud en matière de renforcement des compétences et leur apporter une assistance technique, mener des recherches biomédicales et sociodémographiques se rapportant aux composantes de la santé de la reproduction.

La liste des domaines d’intervention et des réalisations de l’ONFP est encore très longue, mais nous n’omettrons pas de parler de la coopération Sud-Sud. En effet, grâce à une stratégie de partenariat avec les organismes bilatéraux et multilatéraux, la Tunisie a mis en place une stratégie d’échanges avec les pays du Sud, suivant une approche de coopération triangulaire Sud-Sud-Nord.

Défis et perspectives de l’ONFP

Avec les changements profonds que connait la société tunisienne (recul de l’âge au mariage), l’ONFP se doit de s’adapter aux nouvelles exigences du développement. La première des perspectives est le renforcement  les prestations au profit des jeunes pour répondre à leurs besoins spécifiques  et la prévention des comportements à risques en santé sexuelle et santé de la reproduction ( IST/SIDA et des grossesses précoces, comportements addictifs).

L’ONFP a été l’investigateur de la lutte contre les violences faites aux femmes. Le  renforcement des dispositifs en matière de prévention et de prise en charge de la violence basée sur le genre sera une priorité.

Si la vocation première de l’ONFP était le contrôle des naissances et la maitrise de la croissance démographique, il est impératif aujourd’hui de ne pas lâcher prise et d’être vigilant à ce propos. Il faut garantir le maintien de la fécondité à son niveau actuel, légèrement au dessus du seuil de remplacement des générations, pour maitriser le vieillissement de la population  et l’accroissement du taux de dépendance

Des services toujours gratuits ?

Les prestations de l’ONFP sont toutes gratuites, mais jusqu’à quand ? Face a des coûts de plus en plus onéreux (gamme diversifiée de service : échographie, mammographie, unité de cytologie), une régression de l‘apport de la coopération (contraceptifs, médicaments, instrumentations), la pérennité de la gratuité des prestations est –elle menacée ? Ce serait dommage pour une institution qui a rendu de bons et loyaux services pendant plus de 4 décennies, sur tout le territoire de la République.

Samira Rekik

Related posts

Charles-Nicolle : première kératoplastie endothéliale ultra-mince en Tunisie

Monastir : un adolescent de 15 ans meurt noyé dans un bassin d’eau

Sousse : Saisie d’une quantité de cocaïne chez un étranger