On dit que ce sont les grandes pensées qui mènent le monde. En effet, les principaux événements de l’histoire moderne, et même ancienne, ont toujours apporté la preuve que l’esprit était souvent le moteur des plus importantes métamorphoses que l’humanité ait jamais connues. Cependant, aujourd’hui, il apparaît de plus en plus évident que les évolutions advenues dans le monde actuel n’ont fait que neutraliser ces croyances et changer totalement le cours de l’histoire afin d’éviter que le monde ne soit le jouet des caprices des grands.
Sans doute, cela est-il l’autre visage de cet ordre mondial, (Pax Americana), établi en 1945 à la suite de la défaite de l’Allemagne nazie, dont il faut démasquer les fâcheux desseins et les dangereux projets. Il vise à unifier l’univers autour d’une culture monolithique et standardisée. Il s’agit en fait de la culture de l’hégémonie qui affecte aussi bien l’histoire nationale de chaque pays que ses références culturelles et civilisationnelles. Le terme «Pax Americana» contient nécessairement une virtualité de puissance, donc une approbation de supériorité d’une nation par rapport aux autres. C’est la plus avilissante entreprise de haine conçue par l’humanité. Kafka, en son temps, avait décrit de manière sidérante l’injustice d’un monde administré par les puissants. Les attaques contre le droit international, les valeurs universelles et les institutions internationales n’ont jamais été aussi criantes. L’Occident subit une érosion inquiétante qui se manifeste dans un déplacement désastreux des limites obligatoires de l’acceptable. La justice, l’équilibre, le droit, la mesure sont devenus aux yeux de la plupart des dirigeants occidentaux des mots obscènes. Il ne faut pas croire que, derrière ce spectacle dérisoire, leur autorité morale demeure intacte, bien au contraire, celle-ci est désormais l’objet d’un fâcheux discrédit et risque de perdre une part de sa «bonne dimension», selon la formule d’Aristote, pour laisser place au soupçon.
Aujourd’hui, alors que les industriels de la mort ont transformé les territoires palestiniens en charnier dont plusieurs organisations occidentales à caractère soi-disant humanitaire voudraient bien éviter la vue, les criminels de guerre se dressent sur leurs ergots pour pilonner le droit international que leurs alliés occidentaux avaient déjà piétiné d’une manière scandaleuse en soutenant massivement le génocide. On a tort de croire que l’apocalypse est à venir. Les néonazis l’ont déjà réalisé sur une terre bénie par le bon dieu et elle a pour nom la Palestine. C’est une cruelle collision d’agendas qui donne à voir toute l’étendue du cynisme et de la duplicité d’un Occident en dérive, prenant la mesure du poison de la haine. Haine idéologique, haine religieuse, haine de l’autre, injectées dans des discours racistes et islamophobes très dangereux. En tout cas, la grande surprise, c’est la quasi-unanimité avec laquelle les peuples du monde entier épousent la cause palestinienne. L’histoire humaine ne manque pas de combats, militairement, politiquement et médiatiquement inégaux, mais ceux-ci promettent d’être nécessaires à gagner, surtout que les peuples qui manifestent quotidiennement contre cette guerre pensent qu’elle mérite d›être menée.
Au cours de cette prise de conscience s’est opéré un retournement du risque géopolitique dans la mesure où l’Occident apparaît comme la principale source du mal, alors que plusieurs pays émergents comme l’Afrique du Sud et le Brésil représentent le droit humain et la cohérence. Il ne faut jamais abandonner l’espérance, telle celle que notre grand poète Abou El Kacem Chebbi plaçait en tout combattant pour la liberté : « Lorsque je tends vers un but/ je me fais porter par l’espoir/ ».
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