Peine de mort et discours de Kaïs Saïed : l’avis d’une experte en Droit

Le président de la République, Kaïs Saïed, s’est exprimé au sujet de la peine de mort lors de la réunion du Conseil de Sécurité Nationale de la soirée du lundi 28 septembre 2020. Ses propos ont suscité de nombreuses réactions, puisque le Chef de l’État a, selon les observateurs, presque dit qu’il était favorable à la peine de mort. Que peut-on dire des propos du président et que dit la loi à propos de la peine capitale ?

« Le président de la République a parlé en son nom »

Pour la Docteure en Droit, Mouna Kraïem, le président de la République a parlé en son propre nom et non au nom de l’État. Elle considère, dans une déclaration accordée à Réalités Online, que le Chef de l’État a justifié la peine capitale par des versets du Saint Coran. « A-t-il pris en considération les lois en vigueur et les engagements internationaux de la Tunisie ? A-t-il parlé en son nom personnel ou au nom de l’État ? Était-il dans l’émotion ou dans l’objectivité ? On peut être favorable ou défavorable à la peine de mort. Toutefois, quand on est président de la République, on parle au nom de l’État et non au nom de son engagement personnel », a-t-elle expliqué.

Peine de mort : un sujet à débattre

L’experte rappelle que la Tunisie a signé, en 2012, un moratoire par lequel elle s’est engagée à ne pas appliquer la peine de mort. Il ne s’agit pas d’une abolition, mais uniquement d’une suspension de la sentence. Il existe, bien entendu, des cas extrêmes où l’on ne peut demander à des parents, dont l’enfant a été assassiné, que la peine de mort ne doit pas être appliquée.
Par ailleurs, Docteure Mouna Kraïem estime qu’il faut éviter d’établir un lien entre la question de la peine de mort et la religion. Il s’agit, plutôt, de garantir un procès équitable pour l’accusé tout en prenant en considération les engagements internationaux de la Tunisie. « C’est la réputation de la Tunisie qui est en jeu. Le discours du président de la République était, hier, personnel, religieux et en dehors de la loi et des engagements internationaux de la Tunisie », a encore souligné la spécialiste.
S’il faut appliquer la peine de mort, poursuit-elle, il faudra le faire pour les 45 détenus condamnés à mort dans le cadre de la loi anti-terroriste. En aucun cas, il ne faudra l’appliquer suite à un appel populaire ou populiste. Bien entendu, la question doit faire l’objet d’un débat. « La peine de mort est implicitement consacrée dans la Constitution car celle-ci permet d’ôter la vie dans des cas extrêmes. Cependant, la loi ne définit pas ces cas. Il faut respecter les engagements internationaux de la Tunisie », a encore expliqué Docteure Mouna Kraïem.

F. K

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