Repartira, repartira pas ? L’économie tunisienne est-elle au bord du gouffre ? Sans doute pas même si les raisons d’être pessimiste ne manquent pas. Cette inquiétude est compréhensible dans la mesure où les éléments requis pour un redémarrage ne sont toujours pas réunis. Ce rendez-vous manqué de la reprise aura sans aucun doute des conséquences sur les perspectives et les prévisions de 2015 et 2016.Que cela plaise ou pas, l’économie tunisienne est entrée dans une zone de croissance faible. Un ralentissement qui n’est plus une mauvaise passe conjoncturelle mais c’est la manifestation d’un mal profond et qui nécessite des révisions douloureuses dans nos façons de produire et de redistribuer.
L’horizon à court et moyen termes apparaît malheureusement bouché. Une réalité bien perçue par la force des choses par les acteurs économiques, ménages et chefs d’entreprises mais encore largement niée par les politiques. Les partis politiques au pouvoir s’accrochent encore au scénario de la reprise prochaine auquel beaucoup d’économistes n’y croient. Les trois moteurs de la croissance – consommation, exportation, investissement – sont à l’arrêt et l’espoir d’un redressement en cours d’année 2015 s’est évanoui.
Nous devons en effet observer une grande prudence sur le rythme de la reprise économique. Il n’y a aucun doute que la croissance ne retrouvera pas rapidement ses rythmes antérieurs dans la mesure où les équilibres macroéconomiques ont atteint des limites critiques. Ce scénario «en L « demeure très probable. Ainsi, à mesure que s’envolent les illusions de reprise rapide en V des plus optimistes, le consensus s’établit sur, au mieux, une trajectoire en L. Nous retenons ce schéma comme scénario central, mais nous privilégions l’hypothèse d’une reprise peu vigoureuse accompagnée de plusieurs risques qui pourraient conduire au report de la reprise économique. Ce scénario est considéré par beaucoup comme devant être le type de passage obligé à notre économie vers le rétablissement de ses grands équilibres macroéconomiques. De toute manière, et quels que soient ses facteurs déclenchant et la réaction de l’économie aux chocs, cette période sera économiquement et socialement coûteuse.
Aujourd’hui, il n’est pas inutile de rappeler que les composantes de la demande extérieure et intérieure semblent fortement touchées. Du côté des exportations, et même si nos partenaires commerciaux, essentiellement la zone euro, se rétablissent doucement, les perspectives économiques ne sont pas encore au beau fixe.
Du côté de la demande intérieure, la situation de la consommation et de l’investissement privé n’est guère plus encourageante. En effet, côté entreprise, le climat d’incertitude économique freine encore l’investissement. Du côté de la consommation privée, la situation est relativement sombre dans la mesure où le pouvoir d’achat ne cesse de se dégrader. De plus, et sous l’angle monétaire et budgétaire, les marges de manœuvre sont réduites alors que des freins à la croissance demeurent. En d’autres termes c’est le potentiel de la croissance économique de la Tunisie qui est atteint durablement. Il se situe désormais dans une fourchette comprise entre 1 % et 2,5 % maximum. Une chose est sûre, l’année 2015, sera l’une des années les plus difficiles de l’histoire de la Tunisie.