PME: Restructuration et dynamisation urgentes

Malgré des signaux incontestables de résilience depuis sept ans face aux difficultés multiples, le tissu des PME dans notre pays souffre d’un état avancé de détérioration de sa situation économique et sociale.
Cette détérioration se manifeste de plusieurs façons. D’abord, la fermeture de centaines d’entreprises et la cessation d’activités dans plusieurs secteurs et dans toutes les régions du pays.
Ensuite, un surendettement bancaire alourdi avec l’amoncellement des échéances impayées.
Enfin, la non-réalisation de projets d’extension et de développement, donc la stagnation des PME par rapport à leurs prévisions de croissance.
Il y a également une baisse du chiffre d’affaires et une réduction des effectifs de personnel. C’est ainsi que dans le secteur du textile-habillement, près de 200 entreprises ont cessé toute activité, d’où 30.000 pertes d’emploi, difficiles à récupérer par la suite.
Les principaux motifs étant l’augmentation des charges des PME suite à la multiplication des revendications salariales ainsi que la contraction drastique des concours bancaires, outre la progression de la pression fiscale. En effet, les banques donnent de plus en plus la priorité aux emprunts consentis en faveur de l’Etat (Bons du Trésor) plus rémunérateurs et sans risques, ce qui n’est pas le cas pour les crédits bancaires accordés aux PME, les Bons du Trésor étant mobilisés ensuite auprès de la BCT.
En conséquence, les banques ne disposent plus de liquidités confortables à accorder aux PME. Il y a également la concurrence déloyale de la contrebande et du commerce parallèle.
Rappelons que les PME constituent 97% des tissus entrepreneurial et économique du pays. C’est grâce à leur vitalité et à leur dynamisme qu’il y a une croissance du PIB dans le pays.
Car elles sont capables, grâce aux circuits courts de décision, de s’adapter aux mutations rapides et profondes des marchés. Ce sont elles qui exportent, créent de la valeur ajoutée et engendrent la création d’emplois.
Le gouvernement est certes conscient de cette situation, c’est pourquoi il a prévu certaines mesures qui restent cependant insuffisantes pour faire face avec efficacité à la dégradation de la situation.
Les projets de Budget et de loi de Finances pour 2018 ont prévu pour les PME un régime fiscal préférentiel avec deux catégories.
Pour les PME réalisant moins  de 600.000 D de chiffre d’affaires annuel dans le secteur de la transformation et de l’achat pour la revente, ce sera un régime forfaitaire.
Lorsque les ventes ne dépassent pas 300.000 dans le secteur des services et des activités non commerciales, la TVA sera réduite de 25%.
Il est prévu également la mise en place d’une ligne de financement au profit des PME en vue de contribuer à leur restructuration financière, sauf lorsqu’il s’agit de promotion immobilière, d’activité commerciale ou financière.
Au cours d’une visite récente au guichet unique de l’APII, le ministre de l’Industrie a cherché à impliquer l’institution dans l’accompagnement des PME dans la réalisation de leurs projets d’investissement en vue de les aider à venir à bout de leurs difficultés.
Il a recommandé la réalisation d’une étude sur les “réalités et les perspectives des PME”, ainsi que l’élaboration d’une stratégie de leur développement.
Il a demandé également la préparation d’un projet de création d’une agence nationale des PME dont les prérogatives sont vagues pour le moment. Le temps que cette étude soit réalisée et que cette agence se mette en place et élabore une stratégie, il faudra 4 à 5 ans ; il coulera entre-temps beaucoup d’eau sous les ponts et il ne restera plus grand-chose de notre tissu entrepreneurial de PME.
Il est évident qu’il s’agit de mesures disparates, partielles, peu cohérentes et insuffisantes pour redresser un “édifice chancelant”.
Les PME ont besoin d’une stratégie puissante et cohérente qui s’attaque tout de suite à tous les maux à la fois.
Celle-ci pourrait comporter les mesures suivantes :
– Renforcement des fonds propres et facilités d’accès au crédit bancaire bonifié.
– Avantages fiscaux et financiers significatifs, par exemple exonération totale ou partielle de la TVA et/ou partielle de l’impôt sur les bénéfices.
– Accompagnement au niveau de la gestion financière et de la gouvernance des ressources humaines par des experts.
– Facilités pour accès à la Bourse afin de lever des capitaux pour financer les projets de développement.
– Aide spécifique pour l’accès aux marchés extérieurs.
– Priorités pour l’accès aux appels d’offres lancés par l’Administration au niveau des régions.
Si le projet du Budget 2018 prévoit une ligne de crédit à dispenser par la banque de financement des PME pour assurer un fonds de roulement à celles qui en ont besoin, pourquoi le ministère des Finances n’autoriserait-il pas les fonds d’investissement et les SICAR, qui se sont regroupés dans l’ATIC, à restructurer le capital d’une partie des 1000 PME présélectionnées qui en ont besoin ?
En effet, les adhérents de l’ATIC disposent de 500 millions de dinars, capitaux non encore affectés ; ils pourraient consacrer la moitié, soit 250 millions de dinars, pour renforcer les fonds propres, ce qui relancerait leur dynamisme.
En effet, cette injection d’argent frais serait accompagnée par une bonne gouvernance, des conseils en stratégie et une expertise en gestion financière salutaires pour des PME en mal de vitalité et de ressources financières.    

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