Politiques d’emploi – Lutte contre l’inégalité : Quelles armes contre l’informalité ?

Dresser le tableau vivant de l’emploi en Tunisie, c’est pénétrer un labyrinthe où l’ombre de l’informel s’étend. Dans son intervention, Fakher Zaibi a dessiné les contours d’un paysage professionnel complexe, où la formalisation devient un impératif indiscutable.

Au cœur de la 37ᵉ édition des Journées de l’Entreprise, qui se tient cette année du 07 au 09 décembre à Sousse sous le thème « L’Entreprise et l’Informalité : Inégalités et Solutions en Suspens », Fakher Zaibi, Directeur général de l’Observatoire National de l’Emploi et des Qualifications, s’est imposé comme une voix éminente dans le débat crucial sur l’emploi informel en Tunisie.

Lors de sa participation à la première session sur “Les solutions pour résoudre les difficultés d’implémentation”, Zaibi est revenu sur les politiques d’emploi pour réduire l’inégalité et l’informalité et a dévoilé les résultats percutants d’une enquête d’envergure menée par son observatoire, fournissant une radiographie saisissante de l’étendue de l’informalité dans le pays.

“ L’Observatoire national de l’emploi et des qualifications a récemment mené une enquête d’envergure sur l’emploi informel en Tunisie, interrogeant une vaste cohorte de 12.000 individus. Les conclusions sont saisissantes : environ 1,8 million de personnes, englobant des travailleurs salariés, indépendants, employeurs et même des infirmiers, sont enclins à l’emploi informel. Ces chiffres colossaux dévoilent l’ampleur du défi auquel est confronté le pays”, a-t-il indiqué, tout en soulignant l’impératif de politiques novatrices pour lutter contre l’inégalité et l’informalité.

Entre dilemmes et découvertes

Cette enquête exhaustive a jeté aussi les bases d’une révision des programmes et initiatives existantes. Dans ce cadre, Zaibi a souligné l’impératif d’une information pertinente, un pilier indispensable à la conception et au développement de politiques efficaces. Le manque criant d’informations a été particulièrement mis en lumière, mettant en avant l’initiative proactive de l’Observatoire national de l’emploi et des qualifications pour pallier cette lacune.

Dans une analyse approfondie des déterminants de l’informalité, Zaibi a mis en avant l’âge des entreprises comme un facteur clé. Il a noté avec perspicacité que les unités de production, au-delà de cinq ans, rencontrent des obstacles significatifs à la formalisation. Cette observation a conduit à une recommandation stratégique : l’importance d’un soutien précoce, dès la genèse d’une idée entrepreneuriale, pour favoriser la formalisation et prévenir l’ancrage dans l’informalité.

La sensibilisation, la communication et l’information ont émergé comme des éléments cruciaux dans cette lutte. Zaibi a souligné un déficit significatif dans ces domaines lors des tentatives de formalisation par les employeurs et les indépendants.

En outre, il a attiré l’attention sur le niveau de développement, mesuré par le chiffre d’affaires, et le niveau de qualification des acteurs économiques, soulignant leur rôle central dans le processus de formalisation.

Dans ses recommandations stratégiques, Zaibi a insisté sur la nécessité de reconnaître la diversité de l’informalité. Il a souligné que chaque secteur présente des spécificités distinctes, un aspect qui doit être pris en compte dans la conception des politiques.

Les initiatives en cours, notamment celles du ministère de l’Emploi, ont également été évoquées, démontrant un engagement tangible en faveur de l’accompagnement et de la motivation des acteurs vers la formalisation de l’emploi.

Malgré les défis inhérents aux ajustements législatifs et techniques, Zaibi s’est montré optimiste quant à l’évolution des projets. Il a souligné la volonté d’ouvrir une plateforme en mars 2024 pour enregistrer légalement les entrepreneurs, notant que des progrès significatifs ont déjà été réalisés.

“Ces chiffres concrets renforcent l’urgence de politiques adaptées pour faire face à l’ampleur de l’emploi informel en Tunisie”, a-t-il encore précisé tout en soulignant la nécessité d’une action concertée pour relever ce défi socioprofessionnel majeur.

 

M.BB

 

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