Pour convaincre, la vérité ne peut suffire !

 

La vérité peut-elle suffire pour redresser la barre, remettre le pays au travail, favoriser une accalmie sur le front social, éviter les affres d’une politique d’austérité et d’un scénario que tout le monde redoute, mais que très peu œuvrent pour y échapper ?
Le tableau de bord dressé par le nouveau Chef du gouvernement dans son premier discours pour l’obtention de la confiance, a été implacable, montrant qu’à moins d’un miracle, le pays se dirige vers la banqueroute. Les données sont claires, elles témoignent qu’à force de vouloir rafistoler, troquer la paix sociale contre des mesures improvisées et non compatibles avec les moyens du pays, de tourner le dos à une réalité complexe, de retarder la mise en œuvre des réformes, de trembler quand il s’agit d’appliquer la loi, la voie de sortie de la crise devient très étroite, incertaine même.
A l’évidence, ce n’est pas par hasard que le pays est arrivé au bord du précipice, mais par la faute de tout le monde.
D’abord, par la gestion calamiteuse des affaires par les gouvernements successifs qui, en raison de leur faiblesse, de leur incompétence et de leur propension à se renvoyer la balle, ont favorisé le statu quo, n’ont pas réussi à remettre de l’ordre dans les affaires du pays, à établir un ordre de priorités et à redonner espoir et confiance aux Tunisiens. Au bout de plus de cinq ans, les sept gouvernements qui se sont relayés à la Kasbah ont, sous la pression sociale constante et des revendications salariales interminables, enfoncé le pays, lentement mais sûrement, dans une crise structurelle sans précédent. Ils se sont livrés à un exercice périlleux qui, à la faveur de mesures improvisées et parfois à des calculs politiques étriqués, a fini par faire de l’Administration tunisienne, un obstacle à tout changement et à toute réforme, un véritable gouffre pour le budget de l’Etat et une source d’inquiétude permanente pour les opérateurs économiques. L’attentisme, le manque de visibilité, l’hésitation, l’absence de projet, d’une vision et l’incapacité à faire face aux difficultés avec courage et diligence ont obligé ces gouvernements, qui se sont évertués à perdre un temps précieux dans la meilleure façon de partager le gâteau que de servir, sont derrière la voie sans issue de laquelle le pays peine actuellement à sortir.
Ensuite, l’incohérence de la classe politique, qui a privilégié le jeu du positionnement, du calcul, des règlements de compte et des surenchères qu’autre chose. Outre un débat public d’une extrême indigence, nos partis politiques, de la majorité comme de l’opposition, ne finissent pas de se livrer à des guerres sans merci et des luttes qui les ont détournés des vrais problèmes du pays ne leur permettant pas souvent de jouer pleinement le rôle qui leur est imparti en matière d’encadrement de leurs adhérents, de promotion de choix alternatifs et de solutions consensuelles pour relever les défis du terrorisme, de la corruption ou de l’atténuation des tensions sociales.
Le débat public, tel qu’initié par les formations politiques, au lieu de stimuler l’esprit de contradiction, la recherche de la vérité et la quête des voies qui renforcent la construction de la jeune démocratie, a favorisé la division de la société tunisienne, ravivé les vieux démons du régionalisme, de la haine et de la vindicte.
Enfin, l’aveuglement des organisations nationales et de la société civile qui n’ont pas tout le temps pris en considération les intérêts du pays cherchant vaille que vaille à saisir toute opportunité pour montrer leur force de nuisance à un moment où le pays avait plus que jamais besoin de compromis, de stabilité et de paix sociale. Obtenir par la force des augmentations salariales, vouloir tout le temps imposer son diktat à l’Etat et aux chefs d’entreprises se sont révélés contreproductifs. Le pouvoir d’achat du Tunisien, loin de s’améliorer, s’est davantage érodé, le rang des chômeurs s’est encore renforcé, la confiance en le pays entamée et les opérateurs n’investissent plus ou peu.
Aujourd’hui, avec l’entrée en lice d’un gouvernement d’union nationale, le premier diagnostic fait montre l’étendue de la casse et la complexité de la tâche qui reste à accomplir. La difficulté réside nécessairement dans la conscience de toutes les parties, en premier lieu les signataires de l’accord de Carthage à joindre la parole à l’action, à miser sur l’efficacité des thérapeutiques à administrer et à assumer pleinement leur responsabilité pour éviter l’irréparable en nous épargnant des volte-face inutiles et préjudiciables. En effet, pour redonner espoir et confiance aux Tunisiens, on a besoin aujourd’hui d’action et d’engagement, non de simples paroles. Ne dit-on pas que « c’est justement la possibilité de réaliser un rêve qui rend la vie intéressante ».

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