Le professeur Didier Raoult a réservé au président de la République française l’exclusivité de son étude de suivi sur 1.061 patients passés par ses services. La guérison virologique a été obtenue chez 973 patients en 10 jours. Le débat sur la chloroquine suit son cours.
C’est un déplacement explosif qu’a fait ce jeudi Emmanuel Macron pour rencontrer le professeur controversé Didier Raoult, chez lui à Marseille, à l’IHU Méditerranée Infection. A l’abri des regards, le président de la République française s’est longuement entretenu avec le chercheur et aurait notamment visionné la présentation de sa dernière étude, d’après les propos tenus par le scientifique dans une vidéo postée dans la foulée.
Depuis la publication d’un essai préliminaire contesté conduit sur 24 patients, Didier Raoult s’est affranchi de la doctrine gouvernementale, dépistant et traitant systématiquement les patients qui se rendent par centaines à l’institut. Au total, 66.000 tests ont été pratiqués, desquels le chercheur a tiré une nouvelle étude publiée dans la soirée sur le site pré-prints de l’IHU .
Devenu l’une des figures de cette crise, Didier Raoult a publié deux études sur l’hydroxychloroquine (dérivé de la chloroquine, un médicament contre le paludisme) qui prouvent, selon lui, « l’efficacité » de ce traitement contre le coronavirus. Mais nombre de scientifiques estiment impossible de tirer cette conclusion sur la seule base de ces études, notamment en raison de la manière dont elles sont élaborées.
*Une position sur la chloroquine attendue
Le professeur a présenté au président français la dernière étude de ses services, pas encore officiellement publiée. Mais l’Élysée a insisté sur le fait que cette rencontre ne représentait pas « une reconnaissance » de la méthode du Pr Didier Raoult. « Le président a la volonté de prendre en compte l’ensemble des essais et des études, dont celle du professeur Raoult (…) Ce n’est pas à lui de trancher le débat, qui doit être tranché scientifiquement », a souligné son entourage
Emmanuel Macron n’a jusqu’à présent pas pris position sur la controverse autour de la chloroquine , qui agite aussi l’opinion et la classe politique. Mais, comme le ministre de la Santé Olivier Véran, il s’est déjà entretenu avec le professeur Raoult depuis le début de la crise.
Ce déplacement s’inscrit dans une séquence de consultations, que mène le président, afin de préparer l’allocution télévisée prévue lundi soir, notamment en vue de confirmer la prolongation du confinement.
*Macron à l’écoute des chercheurs
L’Élysée a expliqué, mercredi, que le président allait, avant ce rendez-vous avec les Français, « consulter un grand nombre d’acteurs publics et privés, français, européens et internationaux, afin d’échanger avec eux sur les grands enjeux relatifs au Covid-19 et de préparer les décisions qui seront annoncées lundi aux Français ».
Pour l’expert Frédéric Dabi, la rencontre avec le professeur Raoult est « un acte fort » qui montre qu’Emmanuel Macron « consulte tout le monde » et pas seulement les membres du Conseil scientifique ou du CARE.
C’est à la fois « une manière de contrôler la parole de Didier Raoult, parce qu’il ne pourra pas dire qu’il n’a pas été écouté », mais aussi « une formidable légitimation de ce chercheur », pourtant controversé, précise pour l’AFP le directeur général adjoint de l’institut de sondage Ifop.
Face aux pressions, le ministre de la Santé Olivier Véran a appelé le week-end dernier à ne pas brûler les étapes, en soulignant qu’on connaîtrait prochainement les premiers résultats intermédiaires d’études cliniques, qui visent à déterminer si la chloroquine mais aussi « d’autres médicaments prometteurs » sont efficaces, quand ils sont pris dès le début de la maladie.
Par rapport à d’autres molécules, la chloroquine et l’hydroxychloroquine ont l’avantage d’être déjà disponibles, bon marché et bien connues.
(France 24 avec AFP)