Il est vrai que l'annonce d'une version corrigée, même si précision faite par le président que cela ne toucherait pas le fond du texte si ce n'est quelques précisions et l'ordre de certains articles, a suscité plutôt que de l'espoir d'un retour à la raison, une curiosité de savoir jusqu'où le chef de l'Etat pouvait aller pour soumettre un texte à même de contenter une large majorité.
"Des erreurs d’orthographe et des erreurs de numérotation. Elles doivent être corrigées et rectifiées" avait-il reconnu pour ajouter qu'.une "nouvelle version sera publiée au JORT afin de lever toute équivoque et mettre un terme aux campagnes de mise en doute". Plus encore, il souligne que "parallèlement à ces correctifs, des explications s’avèrent nécessaires pour éviter certaines interprétations et amalgames, même si tout texte de loi peut être sujet à interprétation d’où l’existence de jurisprudence et de commentaires juridiques". On s'attendait donc à un nouveau texte de loi fondamentale qui comporterait des réponses aux réserves émises et sur les risques de dérapages ou tentation dictatoriale.. Cela n'a pas été le cas.
Le texte publié sur le JORT indique les corrections apportées sur la forme (fautes d'orthographes et autres) et une nouvelle lecture de certains articles dont la formulation a été légèrement changée pour en orienter l'interprétation et un nouvel ordre de certains articles. Le nouveau texte du projet de constitution se trouve dans le dernier numéro du journal officiel.
Pour ce qui est des quelques modifications apportées par le président de la république, on relève la suppression de la restriction aux droits et libertés en rapport avec la protection des droits d’autrui et les bonnes mœurs.
Autre point légèrement modifié et qui montre qu’il s’agissait d’une omission, il concerne les élections législatives où la composante genre a été précisée. Ils sont désormais possibles pour les électeurs et les électrices, avec l’ajout d’une condition pour la candidature aux élections législatives concernant l’absence de tout empêchement prévu par le Code électoral. Il est précisé que le scrutin pour les députés de l’assemblée des représentants du peuple est universel, libre, direct et secret.
Idem pour la présidence de la République. Le genre est précisé et la femme retrouve son droit de candidature. Il est possible à tout tunisien et tunisienne de candidater. Le président de la république est élu par la majorité absolue des voix déclarées. La nouvelle version ajoute que le candidat ou la candidate doit être parrainé par un nombre des membres des assemblées élues, conformément au Code électoral. Le président de la République ne doit pas cumuler ses hautes responsabilités avec n’importe quelle responsabilité partisane.
Au final, et sans se hasarder dans une analyse technique de ce texte qui, il faut le souligner; n'a pas apporté du nouveau s'agissant des articles objets de toutes les polémiques. Cela laisse libre cours à toutes les interprétations même les plus hasardeuses et aux amalgames les plus rocambolesques.
Aucune modification n’est enregistrée au niveau des prérogatives du président de la République. Son hégémonie est maintenue et aucun mécanisme de contrôle en cas de dépassements du chef de l’Etat n’est prévu par la nouvelle version. Le président détient donc tous les les pouvoirs : nommer le chef du gouvernement dont les prérogatives ne sont pas indiquées, désigner les membres du gouvernement et les révoquer, dissoudre l'une ou l'autre chambre sans avoir de compte à rendre à personne.
Question équilibre des pouvoirs, transformés en fonctions, circulez il n'y a toujours rien à voir. Pour ce qui est de l'entrée en vigueur du nouveau texte cela reste flou laissant libre cours aux interprétations hasardeuses. Le nouveau texte ajoute que le président de la république promulgue le nouveau texte et ordonne sa publication dans le JORT. Rien n'indique qu'en cas d'un vote négatif de quoi sera fait le 26 juillet.
Les premières réactions à ces changements ne sont pas heureuses d'autant qu'elles proviennent de ceux qui se sont érigés en opposants majeurs mais sans aucune alternative. L'UGTT, quant à elle, a publié un document critiquant la nouvelle constitution et faisant part de ses reproches et réserves.
On n'est pas encore sorti de l'auberge. Si le nouveau texte a surpris certains, il en a offusqué bien d’autres, et risque de susciter des controverses qui risquent d’accaparer les attentions d'ici le 25 juillet. Controverses dont on n'a nullement besoin en ces temps de disette.
Le président nous a donné l'impression dans son allocution qu'il avait écouté tout ce qui a été dit à propos du projet proposé. Avec la publication du texte revu et corrigé, il semble n'avoir rien entendu, même les appels les plus sensés.
Dieu préserve notre Tunisie.
F.B