Vers le retour de la maladie ?

Le 17 juillet, le ministre de la Santé, Abdellatif El Mekki, a annoncé  que 4 cas de paludisme avaient été détectés à Tunis, précisément  dans le quartier des Berges du Lac. L’information a fait l’effet d’un choc.

 

Les premières informations confirment qu’il s’agit de ressortissants tunisiens n’ayant jamais voyagé. Donc les cas détectés ne font pas partie de la cinquantaine de cas importés recensés chaque année. Si ces personnes signalées comme porteuses du paludisme n’ont vraiment jamais quitté le territoire tunisien, on peut alors dire adieu à un travail colossal qui a duré près de 45 ans  pour éradiquer cette maladie de la Tunisie !

 

Qu’est-ce que le paludisme ?

C’est une maladie grave, qui peut être mortelle. Elle est due à un parasite transmis à l’homme  exclusivement par  piqûre de moustiques anophèles infectés.

Donc le cycle du  paludisme nécessite  un parasite (le plasmodium) un moustique (anophèles)  et un hôte (homme, oiseau). Quand on dit que la maladie a été éradiquée en Tunisie cela signifie que ce cycle a été  rompu. Le parasite n’existe plus chez la population tunisienne  (qui n’a pas voyagé  dans des zones endémiques) depuis 1979. Des dépistages sont effectués régulièrement et aucun cas autochtone n’a été détecté.

Le moustique, vecteur de transmission du paludisme, existe  en Tunisie, comme dans tous les pays du monde, mais il est localisé à certaines zones bien connues qui font l’objet de  traitements  insecticides réguliers. Il faut préciser que les anophèles ne peuvent pas se déplacer à plus de quelques mètres de leur environnement, en général autour de flaques d’eau douce.

Chaque année, on dépiste en Tunisie une cinquantaine de cas de paludisme dit importé. Il s’agit de visiteurs africains venus en voyage ou étudier chez nous, ou alors de Tunisiens ayant séjourné dans des pays où le paludisme est encore à l’état endémique.  Tant que ces cas sont dépistés et traités  (le traitement est gratuit en Tunisie, car il fait partie d’un programme national de santé) tant que les moustiques anophèles sont éliminés, il n’y aura pas de transmission de la maladie. Pour ces cas importés, une forte surveillance  sanitaire  a toujours existé  au niveau des frontières,  et pratiquement personne n’y échappe.

 

Des cas locaux : quelle explication ?

Pour expliquer l’existence de quatre cas locaux, annoncés par le ministre, il y a deux pistes possibles.

Soit  ces personnes, malgré leurs dires, ont voyagé, mais de façon illégale,  dans les pays frontaliers africains. Soit elles n’ont jamais quitté le territoire, ce qui signifie la réintroduction du paludisme en Tunisie. Autrement dit, les moustiques transmetteurs du paludisme sont à Tunis en train de se multiplier et de transmettre les parasites à la population locale. Ainsi nait le paludisme autochtone !

L’histoire de moustiques venant des pays subsahariens,  évoquée par  le ministère, ne tient pas la route. Car les anophèles ne sont pas une espèce migratrice. Il est possible, toutefois, que certains de ces insectes aient survécu en étant cachés dans la soute d’un avion en voyage vers Tunis.

Cette question ne sera clarifiée qu’à la suite de l’enquête épidémiologique. Attendons de voir…

 

* Toutes les affirmations scientifiques ont été vérifiées et  puisées dans le «Guide technique de la lutte et de la prise en charge du paludisme en Tunisie» élaboré par le professeur  Bouzouaia  Noureddine.

Samira Rekik

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