Avec un cheptel estimé à 129 millions de têtes, le Tchad se classe parmi les puissances animales mondiales, révèle un récent rapport de la Commission économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA). Ce chiffre astronomique place le pays sahélien loin devant ses voisins dans la course aux troupeaux.
Un exportateur clé, mais limité à la première transformation
Premier fournisseur de bétail vivant en Afrique centrale, le Tchad alimente depuis des décennies les marchés nigérians, camerounais et congolais. Pourtant, ce commerce florissant – essentiellement constitué de bovins sur pied – présente un paradoxe : les pays importateurs captent l’essentiel de la valeur ajoutée, privant le Tchad des bénéfices liés à la transformation de la viande et à la création d’emplois industriels.
Le rapport de la CEA souligne pourtant un atout majeur : sa situation géographique unique. Carrefour entre l’Afrique du Nord, l’Afrique centrale et l’Afrique de l’Ouest, le pays pourrait devenir un hub régional pour l’industrie carnée. Les pistes de bétail qui sillonnent le Sahel convergent naturellement vers ses marchés, mais cette manne ne profite qu’aux circuits informels.
La valeur ajoutée en question
« Le Tchad exporte du bétail, pas de la viande », résume un expert de la CEA sous couvert d’anonymat. Cette spécialisation primitive prive le pays des revenus liés à l’abattage, à la découpe et à la commercialisation des produits finis. Un manque à gagner considérable pour une économie qui peine à diversifier ses sources de croissance.
Alors que la demande régionale en protéines animales explose, le défi consistera à monter en gamme. Moderniser les abattoirs, développer des chaînes du froid et miser sur la transformation locale : autant de chantiers qui pourraient transformer ce potentiel brut en véritable moteur économique. Reste à savoir si les investissements suivront pour que le pays passe du statut de simple pourvoyeur de bêtes à celui d’acteur majeur de l’agro-industrie régionale.