Quel rôle pour le Quartet après les élections ?

Le dialogue national qui a eu lieu en cette même période, il y a juste une année, et qui a suivi le légendaire sit-in du départ du Bardo, s’est soldé par un échec. Le recours au vote au lieu du consensus était un échec en soi et le non-alignement du gouvernement Jomâa sur la feuille de route préalablement établie avant l’installation dudit gouvernement a stigmatisé plus cet échec. Malgré les énormes efforts qu’a fourni le Quartet, l’échec était prévisible parce que la station du dialogue national et les stations qui ont suivi, dans leur configuration originelle, contenaient dans leurs mécanismes un paradoxe de poids: celui de faire endosser au Quartet le rôle de médiateur ; « un honnête homme qui veut plaire et se rendre utile » comme disait Dumarsais.

 

Une aventure sans garantie

Tout le monde savait que les partis politiques n’arriveraient jamais à conclure de consensus. Égoïstes, individualistes, et opportunistes à souhait qu’ils sont, renforcés par un sentiment illusoire de supériorité à l’infini, ils avaient la ferme intention, dès le départ, d’amoindrir voire ridiculiser le poids du Quartet. Les temps étaient difficiles et les marges de manoeuvre très restreintes. Cette dernière donne a fait que le Quartet s’est laissé faire et a pris la forme du moule en attendant des jours meilleurs… Malheureusement, le Quartet a accepté et s’est contenté du carré limité et sans plus qu’on lui offrait. Les choses placées dans leur contexte historique, le Quartet s’est fait un peu rouler dans la farine mais s’en est sorti vainqueur comme quoi l’important n’est pas d’être de grande taille mais d’être à la hauteur. Curieusement, le Quartet qui jouissait d’une représentativité écrasante auprès de la population à laquelle les partis politiques ne pouvaient pas prétendre et qu’ils n’auront probablement jamais, s’est laissé entraîner dans une aventure sans garantie de succès dans laquelle les petits narguaient et snobaient les grands et où le rôle de médiateur était en contradiction avec l’énorme poids que représentait le Quartet dans le pays.

 

Le Quartet, une force de proposition et d’opposition

Nous voilà en 2015, les instances politiques du pays sont élues et stables, la Constitution est établie et la 2e République en marche. La suppression de la haute chambre du parlement d’après la nouvelle Constitution, entendez par là, la chambre des conseillers, laisse le champ libre à l’Assemblée des Représentants du Peuple de dominer le pouvoir législatif sans contrepoids. Il serait légitime de se demander si cette absence d’antichambre dans le premier parlement de la 2e République est un point faible pour ce passage fatidique à la démocratie ? Est-ce que le passage d’un parlement bicaméral comme institué dans l’ancien régime à un parlement monocaméral, fruits de la Révolution et de longue gestation avec leurs lots incompressibles de malheurs et autres péripéties inoubliables… signe une avancée vers une progression humaine et politique en  Tunisie ? Il est probablement très tard d’évoquer cette question de la suppression de la chambre haute du parlement mais dans la mesure où l’équilibre nécessite un contrepoids à la chambre unique, la solution ne peut être qu’un contrepoids formé d’organisations de la société civile. En effet, l’institution d’une chambre unique renforce le Quartet afin qu’il joue le rôle d’une force de proposition et d’opposition (si besoin est) et lui ouvre la voie grande ouverte après l’installation du nouveau gouvernement pour jouer un rôle historique comme il l’a fait pendant l’été 2013, prendre une position forte et mettre l’Assemblée devant ses responsabilités.

En ce qui concerne le prochain gouvernement, le Quartet doit veiller à ce que les ministres nommés soient compétents, indépendants et au-delà de tout soupçon. En outre il doit aller chercher le succès là où le gouvernement Jomâa a échoué, autrement dit par rapport aux problèmes trottant de la cherté de la vie et des affectations partisanes qui ont atteint les 11 000 — selon nos sources — et le décompte est encore en cours sans oublier la neutralité des mosquées.

Le rôle du Quartet doit, aussi, survoler celui des partis politiques, qui ressemblent plus, dans la mosaïque politique actuelle, à des sectes qu’à des représentants du peuple. Il ne doit pas se laisser piéger encore une fois par ces partis ni s’abaisser à leurs niveaux de querelles, disputes et invectives de bas étage. Il est certain que pendant la prochaine étape, les partis vont continuer leurs éternelles querelles et prises de bec, futiles aux yeux de l’opinion publique mais tellement utiles à leurs yeux, s’acharnant à se différencier pour arracher une place au soleil, loin des préoccupations réelles du citoyen, trahissant, au passage, les intérêts de la population.

Anis Somai

 

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