Venus du camp de Choucha près de la frontière libyenne, les migrants originaires du Bangladesh, du Tchad et d’autres pays africains avaient une revendication principale. «Nous voulons que l’UNHCR reconnaisse toute personne qui a fui la guerre en Libye comme réfugié», nous a indiqué Rafiq Emdi. Âgé de 31 ans, cet homme originaire du Bangladesh a fui la Libye pendant la guerre. Il se trouve au camp de Choucha depuis plus d’un an. Rafiq a demandé le statut officiel de réfugié auprès de l’UNHCR qui le lui a refusé à deux reprises. Ils sont plus de 300 individus à être dans la même situation dans le camp de Choucha. Pour obtenir le statut, le réfugié doit remplir les critères formulés dans la convention de Genève. Un critère est à l’origine de toutes les contestations. Le réfugié doit craindre «d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques». D’après l’UNHCR qui a étudié les dossiers au cas par cas et effectué des interviews avec tous les demandeurs d’asile, la «persécution» n’est pas vérifiée pour les cas qui ont été rejetés. Logiquement, ils ne bénéficient pas du statut de réfugié. A fortiori, ils ne peuvent être réintégrés dans un pays hôte. Rafiq Emdi fait part de ses doutes sur l’objectivité de l’UNHCR dans les interviews. «Dès qu’ils ont su que j’étais bangladais, ils ne m’ont plus écouté. C’en était fini», a-t-il expliqué. Comme pour appuyer l’absence de sérieux de traitement des dossiers, d’autres demandeurs d’asile rejetés affirment avoir été «utilisés» en tant que traducteurs pendant les interviews bien qu’officiellement, l’UNHCR devait assurer une traduction professionnelle.
L’Union européenne apportera-t-elle son aide ?
La Tunisie ne dispose pas d’un système d’asile auquel les réfugiés pourraient s’adresser. «Le ministère des Affaires sociales s’en occupe, mais cette loi va mettre du temps pour voir le jour», déplore Nicanor Haon du Forum «Tunisiens pour les droits économiques et sociaux» (FTDES). Toutefois, qu’il y ait loi ou pas, force est de constater que les réfugiés ne veulent pas rester en Tunisie.
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) leur a proposé une prime de 700 dollars pour rentrer dans leur pays d’origine. Cette offre a été rejetée par toutes les personnes concernées. Ils veulent trouver protection dans un pays hôte qui dispose d’un véritable système d’asile. Pour réaliser cet objectif, avant de rentrer à Choucha samedi dernier, ils ont rencontré des représentants de la Délégation européenne. Les représentants de l’UE leur ont promis de proposer à l’UNHCR de revoir les cas des réfugiés rejetés, d’entrer en relation avec le gouvernement tunisien afin d’améliorer les conditions dans le camp et de s’adresser aux pays membres de l’UE pour trouver une solution d’intégration. Pour les acteurs de la société civile, une solution doit être trouvée dans les plus brefs délais. Depuis octobre 2012, les réfugiés non statutaires ne bénéficient plus des prestations du camp. Leurs conditions de vie sont difficiles, si ce n’est misérable. Ils n’ont pas accès aux soins médicaux et partagent la nourriture avec ceux qui sont reconnus comme réfugiés et qui attendent d’être transférés dans un pays hôte. Et le «pire» reste à venir… L’UNHCR a annoncé la fermeture définitive du camp de Choucha en juin 2013.
Jannik Jürgens