Chou blanc ce matin à la recette municipale où je comptais acheter des timbres fiscaux. Devant la porte une employée, visiblement désolée, essayait d’expliquer à une foule houleuse que «ce sont les jeunes qui font grève et ne nous laissent pas travailler». C’est quoi, ces «jeunes», un nouveau syndicat ? On a remarqué depuis quelque temps des groupes se prétendant syndicalistes qui ont fomenté des grèves dans plusieurs corps de métier, comme celle des transporteurs routiers qui a en particulier désorganisé les transports d’essence, pendant deux jours, la semaine dernière.
À cela s’ajoute la renaissance de deux anciens syndicats, l’UTT et la CGTT, auxquels vient de s’ajouter une mystérieuse OTT (Organisation tunisienne du travail). J’ai été partisan d’un pluri-syndicalisme à la suite d’un pluri-partisme qui permettait à chacun d’exprimer ses opinions et pour les salariés d’être plus nombreux à lutter contre ceux qui les exploitent, mais il n’est pas question de monter les uns contre les autres et de faire de la surenchère pour avoir plus d’adhérents, car sinon c’est la classe ouvrière qui perdra sa force.
Justement, dans la foule un jeune homme criait en montrant la Recette close «il faut y mettre le feu, y’en a marre» ! Heureusement plusieurs personnes l’ont raisonné et il s’est tu. C’est ainsi que certains jouent sur l’exaspération populaire, il est vrai compréhensible si chacun ne se penche sur son problème personnel, mais la situation de notre économie est grave et propice à tous les dérapages et à tous les coups pour empêcher la réussite du gouvernement de Mehdi Jomâa, qui a trouvé les caisses vides, comme il l’a expliqué dans sa dernière intervention à la TV.
Il faut à tout prix reconstituer l’union sacrée entre l’UGTT et l’UTICA, montrer au peuple, comme vient de le faire la visite de Mehdi Jomâa à Médenine, qu’un plan va être établi pour chaque région déshéritée, recherchant, avec l’appui de tous, les solutions possibles pour remettre la machine économique en marche si chacun y met de sien.
Quant au chef du Gouvernement qui se prépare à un long périple dans les pays du Golfe, hier si décidés à faire réussir la Révolution tunisienne (?), il va leur expliquer qu’ils devraient enfin tenir leurs promesses, que la Tunisie n’est pas partie prenante dans leurs désaccords… Et ce, avant de repartir chercher de l’aide aux USA et en Europe. La Tunisie est l’amie de tous et notre politique étrangère l’a démontré sous tous les régimes qui se sont succédé. Il n’est pas possible que le pays qui a donné le signal de départ du Printemps arabe devienne une nouvelle Libye ou une nouvelle Syrie.
* Décidément on aura tout vu sous le soleil de la Tunisie, à en juger par ces deux faits surprenants
1/ Imed Daïmi, le porte-parole du CPR, défenseur attitré des
membres des Ligues de protection de la Révolution, accourt maintenant au secours de Lotfi Ben Jeddou ! Il a en effet déclaré que le ministre de l’Intérieur,» qui a prouvé sa neutralité et son intégrité», est actuellement «encerclé» par d’anciens RCdistes qui sont : son ministre chargé de la Sûreté, Ridha Sfar, et son Conseiller pour la Sécurité, Mohamed Lassaad Dorboz. C’est tout de même curieux, quand on se souvient que, le 22 janvier 2014,le même Imed Daïmi a appelé les députés, sur sa page facebook, à ne pas se plier à la feuille de route du Quartet, ce qui suppose qu’il n’a pas apprécié ce ministre issu de cette même feuille de route…
Quant aux deux soi-disant RCdistes, il faut savoir que lorsqu’on parle de «grands flics» (comme à l’étranger), on ne se soucie pas de leurs opinions politiques, mais de leur technicité et de leur formation professionnelle. Or aussi bien Ridha Sfar que M. L.Dorboz sont tous deux sortis de l’École nationale supérieure de Police de Saint-Cyr, en France et sont habitués aux rouages du ministère de l’Intérieur. D’ailleurs c’est à ce staff (et à la Brigade antiterroriste) que l’on doit les récentes arrestations de terroristes dans nos villes et nos montagnes.. Si c’est cela «être encerclé», moi je dirais plutôt que Ben Jeddou est bien «entouré !»
2/Dans une interview au quotidien jordanien Al Doustour, Adnène Mansar, porte-parole de la présidence de la République, a déclaré que l’histoire de Mohamed Bouazizi était «une pure légende et une propagande mensongère et que le jeune marchand de légumes n’était qu’un mythe parce que toutes les révolutions ont besoin de mythes. Il a ajouté que même la photo qui a été publiée avait été trafiquée. Les habitants de Sidi Bou Zid qui ont vu leur compatriote transformé en torche vivante apprécieront certainement les propos d’Adnène Mansar !
* Fièvre électorale
Alors que Mustapha Ben Jaafar déclare à Sfax que la loi électorale doit éviter la dispersion des voix, les partis politiques se mettent en ordre de marche. Qu’importe si c’est trop tôt et si l’heure devrait plutôt être à l’unité nationale qu’à la division, mais la fièvre électorale est bien plus pernicieuse que celles que soignent les médecins et l’attrait des ors du palais de Carthage fait oublier aux «grands» des partis, la tragique situation sociale du pays.
C’est ainsi qu’aux côtés des candidats déjà en lice, officiellement ou à demi déclarés, on retrouve l’éternel Mohamad Hechmi Hamdi depuis son refuge londonien, qui avertit qu’il ne rentrera en Tunisie qu’après son élection… Quel courage !
On parle aussi d’un parti «confidentiel» dont la présidente, Emna Mansour Karoui, déclare être candidate à la présidence «pour consolider la place de la femme aux postes de décision.»
Et pour ne rien perdre, saluons la naissance d’un «nouveau» parti, dirigé par Ahmed Khaskhoussi, qui mène actuellement une branche dissidente de l’ancien MDS et qui s’appellera Mouvement des démocrates sociaux (MDS). On souhaite bien du plaisir à ceux qui voudront voter pour ce sigle !
Raouf Bahri