Au bout de cinq années de revendications salariales, de perturbations sociales et de grèves, la compagnie des phosphates de Gafsa est victime “des pêcheurs en eaux troubles” qui incitent les chômeurs à perturber la production et à empêcher le transport du phosphate par voie ferrée, du laxisme des pouvoirs publics qui ne font rien pour favoriser le bon déroulement du travail par l’application de la loi et des barons de la contrebande qui profitent de l’aubaine : transporter le phosphate par camion 4 fois plus cher que la SNCFT.
La CPG qui a perdu 5 milliards de dinars en cinq ans, a une production dérisoire mais sert chaque mois des salaires élevés à 18.000 salariés qui ne travaillent pas, soit deux fois plus qu’en 2010 lorsque la production était de 8 M de tonnes, elle n’est plus aujourd’hui que de 1,7 MT pour le premier semestre 2016 contre des prévisions de 3,6 MT
Après avoir résisté cinq ans, la CPG est à bout de souffle et risque de faire faillite, si l’autorité de l’Etat continue à être défaillante vis-à-vis de ceux qui empêchent la reprise du travail dans les carrières et les usines de la CPG.
La Compagnie est au bord du gouffre car sa production est dérisoire.
Elle est surendettée, la construction de l’usine de TSP Mdhilla II a coûté plus de 800 MD financée par des crédits extérieurs, alors qu’elle n’est qu’à 80% du taux de réalisation, bloquée depuis cinq ans par les sit-in des chômeurs.
La CPG pourrait entraîner dans sa chute le Groupe chimique qui est un géant du secteur sur lequel repose l’économie de la ville de Gabès ainsi que la quasi-totalité de l’activité du port.
La disparition éventuelle de la CPG serait non seulement un drame régional et national en raison de son impact passé sur le budget de l’Etat, sur la balance des paiements et sur le marché de l’emploi dans le tout le Sud-Ouest du pays, mais elle entraînerait dans sa chute le Groupe chimique, un pan entier de notre agriculture qui a besoin d’engrais phosphatés, notre industrie chimique dont, celle des détergents, qui utilisent la matière première phosphate,…
La SNCFT tire 30% de ses recettes du transport des phosphates. Le diagnostic de la situation actuelle est le suivant :
A Redeyef, les sit-in ont empêché le fonctionnement de la laverie depuis le début de l’année, mais aussi bloqué le transport du phosphate extrait vers les usines de transformation.
Comme par hasard, une contestation foncière a surgi un mois après l’arrêt de l’usine à propos d’un lopin des terre appartenant à la tribu des Akremi qui a provoqué à son tour le transport par voie ferrée du phosphate de Redeyef vers les usines de Sfax. Celui-ci ne dépasse plus les 4 trains par jour alors qu’il devrait être de 14 trains.
La CPG n’est plus en mesure d’assurer les salaires du personnel soit 500 MD/an alors qu’en 2010 c’était 273 MD soit le double de la charge salariale.
Alors que la production était de 8 M de tonnes en 2010, les prévisions pour 2016 sont de 5,2 MT, elles doivent être revues à la baisse soit 3,6 MT donc avec une baisse de 40%.
A ce jour, soit fin du premier semestre elles ne sont que de 1,7 MT : une catastrophe pour l’économie nationale.
Les mesures annoncées récemment par le ministre de l’Energie et des mines au niveau de la CPG, sont partielles et légères, elles ne peuvent en aucune façon résoudre les problèmes structurels dont souffre la région.
Il a annoncé dans les semaines qui suivent, la décision de la CPG de recruter 2773 nouveaux salariés sur concours pour la période 2016-2018, alors que la compagnie est en phase de faillite virtuelle dans le vain espoir de faire baisser la tension, ce serait jeter de l’huile sur le feu.
Il y aura sûrement plus de 20.000 candidats, dont les titulaires de patentes, des affiliés à la CNSS depuis des années qui rêvent de salaires généreux de la CPG, des ouvriers des chantiers, … tous motivés par le succès des sit-in.
Le ministre a confirmé que les subventions de la CPG pour la période 2014-2016 aux services sociaux et culturels de la région, s’élèveront à 20 MD : santé, éducation, action municipale, formation professionnelle, culture en plus de la contribution du groupe chimique soit 6 MD.
Les pouvoirs publics n’ont pas encore compris ou bien ne veulent pas admettre que le problème ne réside pas tellement dans la CPG quoiqu’il y a beaucoup à dire sur la gouvernance et la gestion de la CPG, mais dans la problématique du développement de toute une région marginalisée et négligée depuis plusieurs décennies.
La solution ne peut être circonscrite dans le recrutement de milliers de jeunes au sein la CPG, mais dans la mise en place d’un plan intégré de développement de toute la région avec toutes ses composantes : agricole, environnementale, industrielle, socio-culturelle, prise en charge des structures de santé, d’éducation, de formation professionnelle sans oublier les infrastructure de base.
Une délégation ministérielle comprenant notamment les ministres des Finances, de l’Investissement et du développement, de l’Agriculture, de l’Industrie, de l’Energie et des mines, de l’Environnement, de l’Equipement, de la Santé et des Affaires sociales et présidée par le Chef du gouvernement, devrait séjourner dans le bassin minier durant 2 ou 3 jours pour rendre visite aux différents sites, prendre connaissance des problèmes sur place, prendre le temps d’écouter les doléances de la population et de la société civile, avant d’annoncer un véritable plan de développement de toute la région, réalisable sur cinq ans avec des priorités .
Les objectifs doivent être clairs : l’Etat doit financer des infrastructures de base de grande envergure pour améliorer le cadre de vie et attirer des investissements privés significatifs, de quoi créer dans la région 10 à 15000 emplois durables chaque année durant cinq ans.
Des services sociaux et culturels de qualité dans les différents sites miniers de la région doivent être mis sur pied.
Aussi, bien l’agriculture que l’industrie et l’environnement doivent être réanimés et relancés.
Il faut motiver tous les acteurs économiques et partenaires sociaux et redonner de l’espoir aux jeunes, aux chômeurs pour remettre au travail la CPG et toute la population.
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