Le 4 décembre 2012, jour de la commémoration de l’assassinat de Farhat Hached, marqua l’histoire de l’UGTT. Sur le plan national par contre, les agressions et le vandalisme qu’a connus la Place Mohamed Ali ce jour-là, ne furent qu’une scène de plus des violences secouant notre pays depuis presque deux ans… Ce n’était nullement une première dans les agissements des membres des LPR, ayant déjà assassiné un militant de Nidaa Tounes, Lotfi Naguedh, lynché jusqu’à ce que mort s’ensuive.
La place a rassemblé 1000 personnes dans un affrontement barbare et le bilan fut de 26 syndicalistes blessés. Un comité commun entre UGTT et gouvernement s’est alors chargé de l’enquête. Les travaux ont été entamés le 2 janvier et douze réunions ont été tenues. Le comité a décidé de se baser sur l’étude du dossier juridique des LPR, premier accusé des violences, sur le visionnage de vidéos et sur les témoignages des présents et des concernés.
Parmi les requêtes envoyées, une demande d’accès au dossier juridique des LPR a été présentée au Secrétariat général du gouvernement. Ce dernier n’a répondu que par un document comportant le nombre des associations de protection de la Révolution qui sont au nombre de seize, dont quinze ont été créées avant le décret 88 et une, la Ligue nationale de la protection de la Révolution, la LPR en question, qui a été créée après.
Le manque de détails a retardé le travail du comité qui a dû se rendre sur place afin d’avoir accès au dossier juridique. Les membres du comité ont ainsi pu avoir seize dossiers dont celui de la Ligue de la protection de la Révolution, ainsi que de deux de ses filières, l’une à Kairouan et l’autre à Gabès. Notons par ailleurs qu’il n’existe aucune autre filière des LPR ayant des activités légales en Tunisie.
Ce qui s’est passé …
Le rapport du ministère de l’Intérieur a été quant à lui neutre et équilibré. Se basant sur la chronologie des évènements, il confirme la présence des partisans d’Ennahdha et des membres des LPR d’Ezzahara, de Hammam Lif et du centre de Tunis aux alentours de 12 h 40. Vers 13 h 15, quelque 200 personnes ont attaqué la place, déchirant les banderoles que portaient vingt jeunes du Front populaire, en scandant des slogans contre l’UGTT et en essayant de s’introduire dans les locaux. À 14 h 10, la place comptait 1000 personnes dont 500 citoyens et membres des LPR.
La foule s’est ensuite dirigée vers la Kasbah, braquant la manifestation de l’UGTT, haussant des drapeaux sur lesquels étaient inscrits «il n’y a de Dieu que Dieu» et jetant des pierres et des bouteilles remplies d’eau et de terre.
L’enregistrement visuel fourni par le ministère de l’Intérieur a néanmoins été insuffisant puisqu’il ne comportait que les scènes précédant l’agression et lui succédant sans contenir les scènes de violence en soi.
L’UGTT a de son côté présenté des enregistrements effectués par les caméras de surveillance sur le trajet allant de la place au comité, ainsi que sept certificats médicaux attestant de la gravité des blessures subies.
Le chef du gouvernement, pourtant sollicité afin de fournir ses observations sur les évènements, n’a pas donné suite.
Les témoignages de syndicalistes et de Mohamed Mâalej, président de la LPR, ont été entendus en la présence de cadres du ministère de l’Intérieur et l’enquête a conclu la préméditation de l’agression. En effet, une campagne d’appel au rassemblement a été lancée bien avant le 4 décembre sur les réseaux sociaux et les pages des LPR. Le nombre de personnes venues, égal à celui des syndicalistes, prouve d’ailleurs la volonté d’équilibrer le rapport de force. Les agresseurs brandissaient également des drapeaux et des banderoles sur lesquelles ont été inscrits les mêmes slogans et de la même façon que ceux de l’UGTT.
Les agresseurs se sont organisés en deux groupes, l’un, constitué de 300 personnes était à la Kasbah et le second de 500 place Mohamed Ali. Ce dernier a rejoint le premier groupe une fois l’agression terminée.
Les vidéos démontrent la rapidité et la violence de l’agression, outre le lynchage de syndicalistes qui n’ont pas eu le temps de s’introduire dans les locaux, un policier agressé a perdu conscience. Ainsi, la réaction des syndicalistes fut justifiée par la volonté des agresseurs d’entrer dans la Centrale. La légitime défense a ainsi été prouvée…
Un nom revient parmi ceux qui ont mené l’attaque : Hichem Kanou, chargé de l’organisation du rassemblement et de la communication du bureau exécutif de la LPR et du mouvement Ennahdha.
Soulignons de nouveau l’illégitimité de plusieurs bureaux des LPR n’ayant aucun cadre juridique ni légal. Des mois sont passés depuis le 4 décembre et d’autres drames ont bouleversé notre quotidien. Entre LPR et djihadistes, restés longtemps dans une totale impunité malgré la violence qu’ils ont nourri durant deux ans en Tunisie, notre pays semble être pris en otage…
Hajer Ajroudi