Réconciliation administrative : Mohamed Ben Salem évoque les raisons de son « non »

L’adoption du projet de loi sur la réconciliation administrative fait encore couler beaucoup d’encre. De nombreuses interrogations planent encore sur cette plénière « mémorable » du mercredi 13 septembre 2017, où une tension palpable a été constatée non seulement entre l’opposition et Nidaa Tounes, mais également entre certains députés d’Ennahdha et ceux de Nidaa Tounes.
Mohamed Ben Salem, l’un des députés d’Ennahdha ayant voté contre le texte de loi, rappelle que seuls 6 députés de son bloc étaient absents car ils n’ont pas voulu prendre part au vote. Sa décision, pour sa part, s’explique par plusieurs raisons, notamment la violation de l’article 144 de la Constitution qui oblige l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) à consulter le Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) avant l’examen d’un projet de loi. « Je crains que si on commence dès maintenant à piétiner la Constitution, l’État que l’on tente de bâtir pierre par pierre risque de s’effondrer », déclare Mohamed Ben Salem à Réalités Online ce vendredi 15 septembre 2017. Le CSM, rappelle le député, doit être consulté, mais son avis peut ne pas être forcément appliqué à la lettre par l’ARP.

Les para-fonctionnaires, l’autre point de discorde du texte
Mohamed Ben Salem reconnaît, par la suite, que la version finale de la loi sur la réconciliation administrative est « meilleure » que l’originale qui portait également sur les hommes d’affaires. C’est un point, rappelons-le, qui a été retiré. « D’ailleurs, c’est pour les hommes d’affaires que le projet de loi a été conçu au départ et non pas pour les fonctionnaires. Ce sont ces hommes d’affaires à qui on a promis un texte de loi ! », ajoute-t-il.
L’actuel point de discorde dans le texte, selon Mohamed Ben Salem, est celui relatif aux « para-fonctionnaires » – ministres, ambassadeurs, conseillers, etc. -. « Il aurait fallu définir ce que c’est qu’un para-fonctionnaire. Ce sont, en fait, les donneurs d’ordres. Ces derniers peuvent donc bénéficier de la réconciliation. Ce point aurait dû être retiré », conteste le député d’Ennahdha. La présente loi sur la réconciliation, selon Mohamed Ben Salem, ne comporte aucune obligation pour vérifier la provenance des richesses des fonctionnaires concernés par la réconciliation. « Si un fonctionnaire touche 2 000 TND mensuels et qu’il possède une villa de 1 million de dinars, on est en droit de s’interroger sur l’origine de ses richesses, à moins qu’elles ne proviennent d’un héritage. La loi aurait donc dû imposer l’ouverture d’une enquête sur ce point », explique encore le député.

Le rôle douteux de Nidaa Tounes
Mohamed Ben Salem revient, par ailleurs, sur les conditions de l’organisation de la session extraordinaire consacrée aux postes vacants à l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE) et la loi sur la réconciliation administrative. « Par définition, une session extraordinaire est organisée pour traiter les questions les plus pressantes pour le pays. C’est le cas des postes vacants à l’ISIE, puisque nous avons des élections à organiser. Nidaa Tounes a insisté pour que la session soit consacrée et à l’ISIE et à loi sur la réconciliation, sachant que cette dernière ne constituait pas une urgence. Et puis, la rentrée parlementaire aura lieu dans deux semaines », déclare-t-il.
Le député poursuit en affirmant que l’ARP a fini par décider d’organiser une seule session comprenant les deux points cités précédemment. Dans ce contexte, il est, selon lui, impossible de passer au second point – réconciliation administrative – sans en avoir fini avec le premier – vacances à l’ISIE -. Or, lors de la première plénière, Mohamed Ben Salem rappelle que « par un curieux hasard » plusieurs députés, particulièrement ceux de Nidaa Tounes, étaient absents. De plus, pour pouvoir clôturer la question de l’ISIE, 145 votes favorables étaient requis. « Quelques jours plus tôt, lors du vote de confiance pour le gouvernement Chahed 2, il y avait 170 députés présents, alors que pour l’ISIE, il n’y en avait que 139 », rappelle-t-il encore, ironique. Plus encore : le député souligne que la question des postes vacants à l’ISIE aurait dû être abordée le lendemain. Au lieu de cela, l’ARP est directement passée à la loi sur la réconciliation administrative.

« Ennahdha pas tout à fait prête pour les municipales contrairement à ce qui se dit »
S’agit-il d’une volonté de ralentir le travail de l’ISIE pour repousser la date des élections, puisque les partis craindraient une victoire d’Ennahdha ? Mohamed Ben Salem balaye cette éventualité, affirmant que le parti fait lui aussi face à ses propres soucis à l’approche des élections municipales. L’opposition, rappelons-le d’autre part, a déposé un recours pour souligner l’inconstitutionnalité de la loi sur la réconciliation administrative. « Si on me présente la pétition, je la signerai », affirme Mohamed Ben Salem.
Revenant, à la fin, sur la démission du député Nadhir Ben Ammou, Mohamed Ben Salem souligne que ce dernier a d’ores et déjà présenté sa démission au bureau de l’ARP. « Malgré les explications qu’il a fournies concernant l’inconstitutionnalité du texte, la direction du parti a envoyé des instructions appelant à un vote favorable au texte », explique encore Mohamed Ben Salem.

 

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