Le dernier communiqué publié par le FMI qui a ouvert la porte à de futures négociations entre l’institution de Bretton Woods et notre pays a suscité un grand débat public et quelques controverses. La première des questions concerne l’intérêt et l’utilité d’un nouvel accord. Si certaines voix se sont exprimées contre, un consensus s’est établi sur l’importance et la nécessité de finaliser un accord avec cette institution internationale qui devrait nous ouvrir les portes des autres institutions multilatérales et des marchés financiers internationaux.
Mais, le communiqué du FMI soulève beaucoup de questions et d’inquiétudes. Particulièrement les projections de l’institution de Bretton Woods de la situation économique de 2021 montrent que la crise est encore devant nous et que l’économie va continuer encore à se détériorer au cours de l’année. Ces estimations sont plus pessimistes que celles présentées par le gouvernement lors des discussions de la loi de Finances 2021 au cours du mois de novembre passé. Ainsi, la croissance au cours de cette année, estimée par le gouvernement à 4,2%, ne sera finalement que de 3,2% selon le FMI. Par ailleurs, le déficit public, l’un des plus grands maux de notre économie, et qui n’était que de 6% selon les projections du gouvernement a été révisé par le FMI à 9%. Ces révisions des projections élaborées par le FMI et effectuées par le gouvernement il y a seulement quelques mois, sont significatives de la forte détérioration de la situation économique du fait de la poursuite de la pandémie et de l’ampleur de la seconde vague. En effet, si nos projections et nos priorités de politique économique ont été effectuées sur la base d’une sortie rapide de la crise de la Covid-19, la vigueur de la seconde vague doit nous amener à revoir nos priorités et à faire de la lutte contre les effets sanitaires, économiques et sociaux de la pandémie le centre de nos choix.
Mais, la question qui a suscité le plus d’intérêt dans le débat public concerne les conditions de succès des négociations avec le FMI et les grandes institutions internationales d’une manière générale. Cette question est d’autant plus importante que beaucoup avaient jugé les résultats de ces négociations et les accords ne répondant pas aux attentes et aux priorités de notre pays. Cette question pose le problème de la méthodologie des négociations et des conditions de leur réussite.
De mon point de vue, la réussite des négociations avec le FMI et les institutions internationales d’une manière plus générale, dépend de trois conditions essentielles. La première concerne la disponibilité d’une vision économique et d’un projet économique et social clairement défini qui va constituer la base de négociation pour le gouvernement. La disponibilité de cette vision est essentielle dans la mesure où elle permet d’apprécier la pertinence des propositions de négociation formulées par les institutions internationales par rapport à nos choix et à nos priorités. L’absence de cette vision affaiblit nos positions de négociation et ne fournit pas de raisons solides pour refuser certaines propositions des institutions internationales.
Il faut également souligner que les institutions internationales préfèrent négocier avec des pays qui disposent de visions claires.
La seconde condition de réussite des négociations internationales est plutôt d’ordre technique. Car les négociations internationales ne se limitent pas à des échanges sur les grandes priorités et les grands choix de développement mais incluent également des aspects techniques qui demandent une préparation rigoureuse de la part des experts du gouvernement. Cette dimension technique des négociations prend beaucoup de temps et d’efforts et exige la formation d’un groupe d’experts de très haut niveau ayant une grande compétence technique et qui sera en discussion avec les meilleurs experts qui peuplent les institutions internationales. Contrairement à une idée répandue, les discussions et les échanges techniques sont importants et peuvent influencer le déroulement d’une négociation internationale.
La troisième condition pour la réussite d’une négociation internationale est d’ordre politique et concerne l’appui politique dont dispose le gouvernement. De ce point de vue, la présence d’un fort soutien politique et social de la part des partis politiques et des centrales syndicales ne peut que renforcer le gouvernement dans une négociation.
La présence de ces conditions est un préalable à la réussite d’une négociation internationale. Après avoir entamé les échanges avec le FMI sur les possibilités d’un accord qui lui ouvrira les portes de la coopération financière internationale, il est urgent pour le gouvernement de développer sa vision, de réunir son équipe technique et de renforcer l’appui politique et syndical à ces projets.
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