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Les événements s’accélèrent pour Boris Johnson. Et derrière le « raz-de-marée » Omicron qui s’annonce outre-Manche se cache peut-être la survie politique du Premier ministre britannique. Englué dans un scandale à rallonge sur la tenue, ou non, de plusieurs fêtes de Noël à Downing Street, l’année dernière, en pleine période de confinement, et alors que de nombreux Britanniques étaient contraints de rester seuls à Noël, Boris Johnson n’a eu de cesse, depuis une semaine, d’apparaître martial sur le front sanitaire. Mais les embûches se multiplient et la tension monte.
La diffusion d’une vidéo montrant sa porte-parole Allegra Stratton se moquer des règles de confinement durant ce fameux Noël 2020 n’a pas arrangé les choses. Depuis, Boris Johnson sombre un peu plus chaque jour dans les sondages. Il a donc décidé de jouer son va-tout, donnant l’image d’un chef en guerre contre l’ennemi Omicron.
*Ire des conservateurs
Malmené à la Chambre des Communes mercredi 8 décembre lors des questions hebdomadaires au Premier ministre, il convoquait le soir même une conférence de presse, où il annonçait la mise en place quasi immédiate de son « plan B » contre cette cinquième vague : retour du télétravail, port du masque dans les transports, théâtre et cinémas et obligation de présenter un passe sanitaire dans les boîtes de nuit et rassemblements de plus de 500 personnes.
Soutenues par l’opposition travailliste, ces annonces sanitaires ont cependant enragé la frange libertaire des Conservateurs, qui ne supporte pas l’idée d’avoir à présenter des papiers dans un pays qui n’a jamais voulu avoir de carte d’identité. Tel le député conservateur Marcus Fysh, qui a déclaré qu’il ne voulait pas d' »une société faite d’autorisations de circuler » et que la Grande-Bretagne n’était pas « l’Allemagne nazie. » Alors que ce vote doit être entériné ce 14 décembre, Fraser Nelson, rédacteur en chef du Spectator, hebdomadaire conservateur, estime à 77 le nombre de députés Tory qui voteront contre leur gouvernement. Une rébellion massive qui tient aussi d’un désaveu plus large. Combien de mensonges les Britanniques vont-ils pouvoir encore accepter de leur Premier Ministre ? se demande le parti conservateur, toujours prêt à se débarrasser d’un leader impopulaire qui risque de lui faire perdre les prochaines élections.
*L’armée à la rescousse
Boris Johnson l’a bien compris. Il lui faut à tout prix revenir au temps de la vaccination triomphante du début de l’année 2021 quand l’Europe, à la traîne, apparaissait incapable d’offrir des vaccins à sa population, à l’inverse d’une Grande-Bretagne championne toutes catégories. Dimanche 12 décembre à 20 heures, c’est un Boris Johnson, l’air exténué et le ton sévère, qui s’est adressé au pays pour déclarer que tous ses concitoyens devaient recevoir une troisième dose d’ici à la fin du mois de décembre. Une récente étude britannique indique en effet qu’une double vaccination ne protège de l’Omicron qu’à hauteur de 20%, comparé aux 70% de protection dès la troisième dose. Boris Johnson a mobilisé l’armée et 200 experts militaires en logistique vont prêter main forte au National Health Service.
Dès le lendemain, lundi 13 décembre, et dans un exercice de soutien au chef du gouvernement, son ministre de la Santé, Sajid Javis, annonçait à la Chambre des Communes, qu’il estimait à 200 000 le nombre de Britanniques infectés à l’Omicron. Beaucoup moins dramatique, le NHS faisait, quant à lui, part de l’hospitalisation de seulement dix patients infectés par le variant Omicron âgés de 18 à 85 ans, vaccinés pour la plupart. Seul l’un d’eux est décédé.
*Aussi impopulaire que Thatcher
L’opinion publique britannique, elle, ne semble plus croire son Premier Ministre, quel que soit le sujet. L’institut Ipsos Mori place désormais Keir Starmer, chef de file des Travaillistes, treize points devant Boris Johnson, du jamais vu depuis… 2008. De quoi faire frémir Downing Street. Les plus optimistes se souviendront cependant que Margaret Thatcher était, elle aussi, aussi bas dans les sondages lors de son premier mandat et qu’elle enchaîna allègrement deux autres victoires aux élections générales. One lives in hope*, comme disent les Anglais.
(L’Express)