La cuisine tunisienne revisitée , Kemia, amuse-gueule et autres appetizer

Au vernissage d’une exposition de peinture, organisée dans une grande villa à la Marsa, Gudrun, une amie à moi, a eu la bonne idée de servir à ses invités, en guise de kémia, seulement des légumes crus. Elle a placé un peu partout, sur de petites tables, guéridons et consoles des assiettes, et soucoupes de légumes de toutes sortes. Elle a associé ces beaux légumes à nombreuses sauces de toutes les couleurs, blanches, jaunes pâle ou foncé, rousses, acajou, vert pistache… et auxquelles elle a incorporé plusieurs arômes, herbes et épices.

L’idée avait nombreux avantages dignes d’être recommandés par les meilleurs conseils en nutrition. Autre bénéfice, les convives, ne trouvant pas les habituels gâteaux salés et appliquant la recommandation préventive : lorsqu’on boit, il faut bien manger, se sont abstenus de pousser sur la boisson. 

La tradition de la kémia, cette habitude de marier l’alcool et l’alimentation, surtout en Algérie et en Tunisie, a beaucoup perdu de sa gloire. Aujourd’hui on a l’impression que kémia et alcool se sont acoquinés pour le pire. Les amuse-bouche servis lors des grandes occasions : des cakes salés, canapés et mini-sandwichs, les cacahuètes, amandes et pistaches et autres fruits secs grillés et salés, sont bourratifs et indigestes ; ils  poussent, de surcroit, à boire sans modération. La kémia, sensée accompagner un petit apéritif, devient alors le prétexte à un gueuleton bien préjudiciable à la santé. 

Les comptoirs de bistrot, transformés aujourd’hui en bars à bière, n’offrent plus grand-chose à leurs clients, soucieux avant toute chose d’ingérer de l’alcool pour se griser et oublier. Ce sont les marchands ambulants qui ont pris la relève, offrant aux  picoleurs nombreux aliments, très valables parce que bon marché : fèves sèches ou fraîches selon la saison, pois chiche au cumin, fonds d’artichauts et autres légumes de saison cuits et bien épicés. Les plus gourmands envoient chercher du fromage, lorsque, au bout de la troisième Celtia, ils ont cessé de penser à la dépense.

Quelques industriels attentifs n’ont pas manqué d’exploiter le filon kémia et introduit sur le marché les amandes fraîches frigorifiées vendues un peu partout et en toutes saisons à ceux qui préfèrent boire chez eux et dont les femmes ne sont pas trop portées à leur préparer des amuse-bouche.

Si on a le cœur à ça ou si on a des invités et qu’on est appelé à garnir une bonne table dédiée à la kémia, l’offre est incommensurable et les inconvénients santé souvent proportionnels à la dépense, quoique des mets de luxe, comme la poutargue, n’ont jamais fait de mal à personne.

Pour ma part, je choisirai la solution Gudrun, ce qui va me permettre de me faire la main pour préparer les meilleures sauces et les associer adéquatement aux légumes. La cuisine tunisienne a d’ailleurs intérêt à mieux accommoder ses mets et plats en développant sauces et assaisonnements qui se réduisent aujourd’hui, dans la cuisine faite maison, à la mayonnaise et à l’harissa. Les sauces plaisent aux jeunes et aident à simplifier la cuisine. Profitons-en ! 

Pour palier à la sobriété d’un tel menu, je préparerai des coquillages : moules, palourdes ou bigorneaux qui peuvent être cuits au naturel, arrosés de jus de citron et accompagnés de beurre et d’un bon pain de seigle.

Je peux aussi faire du beurre d’anchois en pilant la chair et en la mélangeant à la même quantité de beurre.

Je décorerai mon buffet kémia évidemment d’une variété d’olives, de torchi, thon, sardines cuites à la vapeur et autres délices. Je penserai à quelques œufs durs, des œufs de caille, peut-être, disponibles au Marché Central au même prix que les œufs de poule. Les œufs de caille sont réputés pour leur faible teneur en cholestérol et leurs vertus aphrodisiaques.

 

Fèves au cumin – Foul bel kamoun

Je fais cuire une livre de fèves sèches à l’eau légèrement salée. Je décortique les fèves. Je pile ensemble trois gousses d’ail et deux bonnes pincées de cumin, je délaye avec un peu d’harissa dans un peu d’eau de cuisson des fèves, du jus de citron et six cuillerées d’huile. Je mélange mes fèves à cette sauce et je sers. Le Homs bel kamoun (pois chiche au cumin) se fait de la même façon, en remplaçant les fèves par les pois chiche.

 

Poivrons frits – Felfel mokli

Je pile ensemble deux gousses d’ail, deux pincées de carvi et un peu de sel. J’introduis la pâte (pour quatre poivrons) dans chaque poivron débarrassé de sa queue et de ses graines. Je fais frire pendant près de dix minutes

 

Friture de rougets

Je  prépare mes petits rougets, je les trempe dans la pâte à frire composée d’œuf, lait, farine et sel et que je dose selon la quantité de poissons. Je jette dans la friture chaude. Je sers avec du persil et du citron.

 

Salade aux amandes

J’épépine six tomates que  je coupe en dés, je pèle trois concombres moyennes que je coupe en rondelles, j’ajoute quelques poivrons, verts et rouges coupés en lanières fines ; si j’ai des radis, je les nettoie, les pèle et les coupe petit avec deux petites oignons. J’ajoute, dans le saladier 100 g de maïs en boîte, des olives dénoyautées, vertes et noires, les amandes effilées, un demi verre d’huile d’olive, un demi verre de citron, du sel et du poivre. Je mélange et je garde au frais avant se servir.

N’oublions pas que c’est la saison des jujubes et que quelques écuelles de Annab et Zaarour mettraient encore des nuances à notre table, déjà haute en couleurs.

Bon appétit

 Lotfi Essid

 

 

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