Aussi bizarre et invraisemblable que cela puisse paraître, de prime abord, à l’origine d’Israël était Hitler. D’autres points de départ furent possibles mais l’un d’entre eux advint bel et bien. Echappée aux camps de concentration, Hanna Harendt rédige l’ouvrage devenu incontournable au plan bibliothécaire et titré « Le système totalitaire ». Adorée par Heidegger, la rescapée songe à la manière de ne plus jamais voir les juifs subir l’épreuve du racisme génocidaire et de ses fours crématoires. Pour cela, il nous faut avoir notre État. Car, par expérience, les Français aidèrent les Allemands à nous gazer.
Depuis, la militante mémorable persuade et mobilise des effectifs de plus en plus notables. Son manège accélère et grossit la boule de neige.
Il s’agit, pour nous, de parvenir au sommet de l’autorité américaine et européenne avec l’indispensable manne financière, nerf de la guerre.
Netanyahu charrie cet arrière-plan historique derrière sa gouvernance meurtrière. Deux Hitler, l’un et l’autre immondes se répondent. Héritière d’Hitler, la formation sociale israélienne reproduit le système totalitaire par l’extermination génocidaire. Annexionniste et condamnée par cinq éminents rabbins, la prière de Ben-Gvir sur l’esplanade des mosquées rejoint le projet légué par la réaction collective au nazisme et à sa dérive. La relation unit l’individualité à la société. Quand Obama dira aux Arabes « assalamu 3aleikom », il inscrit par pertes et profits le puissant lobby construit depuis Hanna Harendt. Quand Kamala Harris énonce un discours électoral, une multitude pro-palestinienne l’interrompt à tout bout de champ. Enervée, elle adresse un regard excédé aux gêneurs et leur oppose un geste réprobateur : « Je vous répondrai après, pour l’instant occupons-nous de nos moutons. L’Amérique d’abord. Une fois judaïsée, surtout au sommet, l’Amérique n’est plus l’Amérique imaginée par les apôtres de la naïveté ». Contre Hanna Harendt et Netanyahu, son poulain, Kamala Harris ne peut rien.
La même dialectique déployée, en Tunisie, entre l’individu et la société orientera l’investigation vers l’aura de Bourguiba. Ce leader hors pair évolua au diapason de la population car le combat engagé pour l’indépendance mobilisait la personne et la collectivité.
Pour Bourguiba, trois atouts avaient partie liée avec le secret de la renommée : le pragmatisme politique, le courage et l’entourage. Ce leader préféré fut entouré par des personnes de qualité. Il ne rédige pas, lui-même, ses discours. A lui l’oralité et à Chedly Klibi, l’agrégé d’arabe, revient la rédaction conforme aux normes des belles manières littéraires. Mais Bourguiba relit l’écrit, soustrait ou ajoute les propos choisis.
Au fil de ce va-et-vient, le spontané avance, main dans la main, avec l’organisé. De nos jours, la fête de la femme cligne vers une ultime performance à signaler chez le grand Timonier. Féministe jusqu’au bout des ongles et à la mœlle des os, Bourguiba n’a jamais gobé l’excommunication de Tahar Haddad pour avoir publié l’ouvrage titré « Notre femme dans la chariâ et dans la société ».
Par mesure de rétorsion, le cheikh Tahar Ben Achour avait radié le titre zeitounien de Tahar Haddad, Bourguiba procéda par étapes orientées vers l’objectif souhaité.
Pour le jury affecté à la première promotion de l’École normale supérieure, Mahmoud Messadi voulait inviter Blachère. Bourguiba proposa Taha Hussein, auteur, entre autres, du célèbre ouvrage « Al fitnatou al kobra », intitulé plagié par Hichem Jaït sous le titre « La grande discorde ».
Bourguiba invita Azouz Rebaï, Taouhida Ben Cheikh, Taha Hussein et Tahar Ben Achour. Une fois ce quarteron réuni, avec lui, à la Zitouna, Bourguiba mine de rien, pose à Taha Hussein la question : « Que pensez-vous de Tahar Haddad et de son livre “Notre femme dans la chariâ et dans la société“ ? Taha Hussein répond, sur le champ : « C’est un écrivain remarquable et son ouvrage figure parmi les écrits émancipateurs de nos sociétés ». Aussitôt, Bourguiba toise Tahar Ben Achour, ahuri, et lui dit : « Vous avez entendu ? Alors, restituez le titre académique de Tahar Haddad ». Et l’habile tacticien parvint à ses fins. g