Dans une note publiée récemment intitulée « Renforcer la sécurité alimentaire de la Tunisie 2022-2023 », l’Institut tunisien des études stratégiques, ITES, a développé trois scénarii d’évolution possible de la sécurité alimentaire pour le reste de 2022 et 2023. L'institut avait alerté que si rien n’est réalisé d’urgence, la situation risque de se détériorer gravement durant le 2ème semestre 2022 et au cours de l’année 2023.
La note élaborée par les experts Noureddine Agrebi et Mohamed Jouneidi Abderrazak, a tenu compte de l’impact actuel et possible de la crise russo-ukrainienne sur la Tunisie, tout en se basant également sur les facteurs déterminants de la sécurité alimentaire en Tunisie tels que le capital de production, le climat, les pratiques de production (rotations, technologies utilisées, etc.), disponibilité et qualité de la main d’œuvre agricole , disponibilités et accès aux financements, infrastructure de stockage et répartition territoriale, circuits de distribution et de commercialisation, utilisations alimentaires et gaspillages, etc.
Le premier scénario proposé, considéré comme « tendanciel », consiste à maintenir les efforts actuels en matière de sécurité alimentaire. Parmi les facteurs primordiaux sur lesquels se sont basés le trois scénarii on peut citer le facteur « utilisations alimentaires et gaspillages ». En effet, le premier scénario prévoit la poursuite des gaspillages alimentaires des produits subventionnés, la continuation de la récupération d’une partie de la compensation par les hôtels et entreprises de restauration hors foyers et le maintien du fort taux de prévalence de l’obésité et des maladies liées à la surconsommation de pains, pâtes blanches et sucreries. Ce scénario tendanciel suppose également le maintien d’un taux d’inflation variant entre 7 et 8 % et de la politique de stockage et de régulation des marchés inchangées.
En revanche le deuxième scénario, un « scénario souhaitable » pour les deux experts, consiste à entreprendre des actions et initiatives volontaristes afin de réduire l’impact de la crise russo-ukrainienne sur la sécurité alimentaire. Cela suppose, pour réussir, que les choses changent catégoriquement en matière d’utilisation et gaspillage alimentaire. Ceci étant, des politiques et initiatives volontaristes de réduction des gaspillages alimentaires des produits subventionnés doivent être adoptées. De même pour les politiques et initiatives volontaristes de récupération d’une partie de la compensation par les hôtels et entreprises de restauration hors foyers ainsi que pour les politiques et initiatives volontaristes de réduction de la prévalence de l’obésité chez l’adulte et sensibilisation intensive à l’impact des maladies liées à la surconsommation de pains, pâtes blanches et sucreries.
Ce scénario qui prévoit une large augmentation des surfaces de céréales et d’autres cultures en irrigué par rapport à la campagne 2021- 2022, un niveau de financement des crédits de campagnes largement amélioré durant la campagne 2022-2023 pour les agriculteurs s’adonnant aux cultures des produits manquants ou importés et une politique de stockage et de régulation des marchés encourageant davantage le secteur privé (transparent et formel) à soutenir les efforts de l’État en la matière, se présente comme un scénario très approprié pour surmonter la crise de la dépendance alimentaire.
Le troisième scénario, qualifié de « noir » est on ne peut plus catastrophique. Ce scénario a été élaboré sur l’éventualité d’un impact plus fort de la crise russo-ukrainienne, des facteurs climatiques défavorables et d’un échec de l’implication des agriculteurs et autres acteurs des filières dans les efforts d’atténuation de l’effet de la crise sur la sécurité alimentaire. On continue alors de garder le même rythme du gaspillage alimentaire des produits subventionnés, de la continuation de la récupération d’une partie de la compensation par les hôtels et entreprises de restauration hors foyers et de maintenir le même fort taux de prévalence de l’obésité et des maladies liées à la surconsommation de pains, pâtes blanches et sucreries.
M.A.B.S
(D'après le rapport de l'ITES)