Des perspectives optimistes malgré l’instabilité

L’enquête annuelle diligentée par la Chambre de commerce tuniso-allemande et portant sur les sociétés exportatrices allemandes nous a livré un bulletin de santé très nuancé, 18 mois après le déclenchement de la Révolution. Difficultés, handicaps, avantages et facteurs favorables, prévisions d’évolution des activités et des investissements permettent de brosser un tableau de la situation.

 

L’enquête réalisée par la Chambre de commerce tuniso-allemande chaque année et portant sur les entreprises exportatrices allemandes implantées en Tunisie a concerné essentiellement le secteur électrotechnique soit 39,4% des entreprises enquêtées et le secteur textile-habillement à hauteur de 35,2%.

 

Un échantillonnage représentatif du tissu entrepreneurial

Près de 75% des entreprises enquêtées sont relativement homogènes par leur appartenance sectorielle, ce qui est tout à fait représentatif du tissu entrepreneurial allemand implanté en Tunisie. Alors que les 25,4% appartiennent à d’autres secteurs comme les industries chimiques, le plastique etc.

Il faut dire que la majorité des entreprises exportatrices allemandes qui ont participé à l’enquête sont des PME. En effet, 36,6% d’entre elles emploient moins de 100 salariés alors que 32,4%, emploient entre 100 et 300 salariés. Il y a lieu de remarquer également que les grandes entreprises qui dépassent 300 et même 500 salariés ne représentent que 14,1% de l’échantillon.

D’ailleurs, près des trois-quarts d’entre elles possèdent d’autres sites de production implantés dans d’autres pays. Elles ont donc une certaine dimension et disposent d’une grande souplesse en matière de répartition de leurs activités de production à travers le monde.  

 

2011 : évolution contrastée des affaires

55% des entreprises rendent compte d’une évolution favorable des affaires en 2011 et enregistrent une augmentation de leur chiffre d’affaires à l’export en cours d’année par rapport à 2010. Mais aujourd’hui, 32,4% des entreprises enquêtées ont constaté finalement une baisse du chiffre d’affaire en 2012. Cependant, 39,5% des entreprises ont augmenté leur personnel en 2011, ce qui est paradoxal.

Cette baisse de l’évolution des affaires en 2011 est exprimée surtout par les entreprises du secteur textile : 60% d’entre elles l’ont déclarée. Par contre, 78,6% des entreprises du secteur électro technique ont déclaré une hausse du chiffre des ventes dont près de 40% selon une proportion supérieure à 10%.

 

Le manque de stabilité politique et sociale

L’handicap majeur, un an et demi après le déclenchement de la Révolution, qui constitue un obstacle pour le développement des activités des entreprises exportatrices allemandes, selon leurs déclarations est le manque de stabilité politique et sociale à raison de 76%.

Il y a lieu de remarquer qu’il est en baisse car lors de la précédente étude, il était de 92% ce qui montre qu’il y a une légère amélioration mais le taux demeure élevé et préoccupant.

Il y a lieu de remarquer que le facteur stabilité politique et sociale était jusqu’en 2010 l’argument principal pour attirer les investissements directs étrangers et favoriser l’implantation des entreprises exportatrices en Tunisie. La gestion de la crise ainsi que l’habitude font aujourd’hui que tous les critères généralement cités lors des études les plus récentes, comme des obstacles propres à la Tunisie, site de production pour les entreprises exportatrices allemandes, reprennent de l’importance.

 

Deux impacts négatifs de la Révolution

D’après les opinions exprimées par les entreprises enquêtées, les deux impacts négatifs de la Révolution portent tout d’abord sur l’insécurité générale dans une proportion de 75,7% des entreprises qui se sont exprimées et sur les grèves sauvages ou sit-in dans une proportion de 47%. Ces deux facteurs négatifs constituent les principales difficultés rencontrées par les entreprises allemandes aussi bien pour le secteur textile que pour l’électronique.

L’évolution du sentiment de confiance placé par les entreprises allemandes dans le gouvernement tunisien va dans le sens négatif dans une proportion de 67% et seulement 32,8% dans le sens positif.

C’est pourquoi les principales suggestions exprimées par les entreprises pour améliorer la situation portent sur le rétablissement de la sécurité à concurrence de 39% des opinions exprimées, viennent ensuite la facilitation des procédures administratives pour 26%, puis suivent presque à égalité la clarification de la vision politique et la conclusion d’accords avec les syndicats dans une proportion de 21,5%. Enfin, la proposition d’interdiction des grèves sauvages a été exprimée par 17,3% des entreprises.

Plus du tiers des entreprises affirment n’avoir aucun problème avec leurs clients, fournisseurs ou donneurs d’ordre. La majorité des sentiments exprimés vont du scepticisme pour 23% à la méfiance pour 15,3% des opinions exprimées. La réaction tout à fait négative ne touche que les entreprises appartenant au secteur du textile dont le quart affirme avoir des annulations de commande.

 

Les facteurs favorables et les obstacles

Les principaux facteurs qui ont favorisé les activités des sociétés allemandes implantées en Tunisie, il y a lieu de citer la hausse de l’Euro vis-à-vis du Dinar pour près de 35% des déclarations.

Suivent par ordre décroissant, l’engagement des employés : 24,6% ainsi que l’enthousiasme : 23,2%. Il y a lieu de remarquer que la chambre de commerce tuniso-allemande assume un rôle très actif puisque les entreprises allemandes qualifient la coopération avec l’AHK comme un facteur positif à raison de 23,2%. En effet l’AHK, depuis 33 ans n’a pas cessé d’améliorer les conditions d’implantation des entreprises allemandes par une multiplicité de services.

D’autres facteurs comme la coopération avec les institutions tunisiennes (5,8%), l’amélioration de la productivité (4,3%) et les bénéfices susceptibles d’être récoltés à titre de subventions (2,9%) sont considérés comme des facteurs en baisse sensible.

En ce qui concerne les facteurs externes qui pèsent sur les activités des sociétés allemandes, il y a lieu de citer essentiellement le coût élevé du transport maritime dans l’espace méditerranéen : 24% selon les déclarations. 17% des entreprises considèrent que l’évolution des marchés européens a constitué une difficulté en 2011. En ce qui concerne les facteurs internes deux difficultés majeures sautent aux yeux : l’évolution spectaculaire du coût du travail dans une proportion de 37% et les problèmes administratifs pour 21,4%. C’est là où le bât blesse. En effet, les multiples augmentations salariales et revendications sociales amenuisent la compétitivité des entreprises.

 

Des perspectives encore optimistes    

Un an et demi après le déclenchement de la Révolution et après l’installation d’un régime et d’un gouvernement issus des élections, les perspectives relatives à 2012 selon les déclarations des entreprises allemandes se révèlent relativement optimistes.

C’est ainsi que près de 48% des entreprises prévoient une augmentation de leur chiffre d’affaires à l’export alors que seulement 22,5% s’attendent à une baisse.

C’est pourquoi près de 30% des entreprises ont des prévisions de recrutement de personnel en 2012 alors que pour 42,3%, il n’y a aura pas de changement d’effectif. Pour ce qui est des prévisions d’investissement, l’évolution positive est envisagée pour 45,6% des sociétés allemandes alors que ce taux n’était que de 36% lors de la précédente enquête.

Il y a donc de l’optimisme et des perspectives positives, notamment pour le secteur électrotechnique où 60,7% prévoient une augmentation. Pour 32,4% des sociétés, il n’y aura pas de changement.

Les principaux avantages comme la proximité géographique par rapport à l’Euro sont cités dans 77,5% des cas et les avantages fiscaux pour les entreprises exportatrices sont déclarées par 57,7% des réponses. Suivent de près les coûts de production compétitifs qui demeurent des avantages décisifs du site investissement Tunisie et sont cités dans 49,3% des cas.

Ridha Lahmar

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