Sens de l’ingérence

A propos de l’outrecuidance américaine, seul Ghannouchi rit, ou plutôt, ricane.
Tebboune, lui, soutient la Tunisie « souveraine » et assène un coup de patte au cynisme de l’impérialisme.
Son appui réplique à l’interventionnisme diabolique.  Pour un quarteron d’officiels yankees haut perchés, le référendum tunisien serait inapproprié. De quoi je me mêle ? « Qui fait le dégoûté montre qu’il se croit beau », écrit Baudelaire.
L’objectif serait un « processus inclusif » selon ces donneurs de leçons car, sans les vauriens, la Tunisie n’est rien. Voilà pourquoi pavoise l’ennemi juré de Bourguiba et du Carthaginois. Le chantage israélo-européo-américain détient l’immense avantage de la clarté bel et bien explicitée : la normalisation ou alors, les quatre milliards à négocier avec le FMI tintin ! Au nom de l’éthos démocratique, la drôle et obscure Amérique prône pour la Tunisie, « un débat public ». 
Henri Lefèvre administre une leçon magistrale aux donneurs de leçons infernales : « Sous couvert du sublime et du surhumain, tout l’inhumain passe en contrebande ».
L’impertinence de l’arrogance provoque deux réactions nimbées d’indignation.
Telle une seule femme, à juste titre fière et hautaine, la société solidarisée contre l’inique adversité, monte à l’assaut des nigauds.
En outre, le culot des inamicaux, pour ne pas dire, à la Sartre, les salauds, infléchit la  sympathie ressentie pour leurs adversaires.
Echaudée, l’Algérie l’a bien compris. Mais quelle serait l’ultime raison de la fausse piste suivie par l’égocentrisme impérialiste ?
Les anthropologues anglo-saxons lui ont attribué une appellation conceptuelle, tout à fait appropriée : « The cultural lag »,  le retard culturel. En effet, l’hybris, violence de la démesure déployée aujourd’hui par les Etats-Unis, chute vers les bas-fonds militaires de la dissuasion nucléaire. Je m’explique. Les catégories de pensée léguées par l’univers unipolaire peinent à trouver preneur parmi ce monde multipolaire.
Le concept « cultural lag » veut dire ceci :  le monde économique, politique et géostratégique change et l’esprit américain stagne au point d’esquisser un risible bond vers l’arrière après avoir annoncé un brillant saut vers l’avant. Un exemple, parmi d’autres, illustre le péché mortel de la pensée figée. Biden appelle son homologue chinois pour l’amadouer à propos du litige taïwanais. Munie de l’arsenal nucléaire, la Chine refuse de plier l’échine et avertit Biden. La réplique sera militaire, mon cher ! L’ingérence mène aux abords de l’apocalypse.
Tel est le non-sens du sens donné par l’Amérique à son ingérence. Bourdieu avait théorisé la signification de la bévue commise par un Biden déboussolé. Avoir des raisons ne veut pas dire avoir raison. La même gaffe commise à l’échelle mondiale intervient aussi à propos de la Tunisie. Haut-parleur de l’islam dit politique, l’Amérique reproduit les mots de Ghannouchi.
Réfuter le référendum, c’est révoquer son créateur personnalisé !
A l’Ouest rien de nouveau, la Maison blanche, si mal nommée, dégagea déjà Ben Ali ou Noriega. Mais pourquoi l’habitué à faire et défaire les chefs d’Etat semble-t-il buter sur un os face au Carthaginois ?
Devant Goliath le colosse, depuis quand David le maigrichon, tient bon ? Mais que faire si, parfois, la société globale peaufine le profil requis par la résolution du problème principal ? Le combat engagé contre le colonialisme enfanta Bourguiba et l’exigence de lutter contre les dégâts d’Ennahdha produisit le Carthaginois.
Et l’artisan du chaos créateur vole au secours du perturbateur. Au principe de l’ingérence était le souci de protéger Ghannouchi. 

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