Série : Machiavel a son feuilleton *

 

Netflix voit grand, très grand, à la limite de la mégalomanie à travers cette série mettant en vedette Kevin Spacey comme chef de file du Congrès qui intrigue dans les coulisses du pouvoir pour mieux tuer, au propre comme au figuré, son prochain.

Face à HBO et AMC, Netflix voulait sortir de l’arène de la concurrence comme un fournisseur de contenu digne de n’importe quel canal du câble, il faut avouer qu’elle a effectué un choix stellaire avec House of Cards, un remake de la série britannique éponyme, elle-même adaptée d’un roman, qui (re)place Kevin Spacey au sommet de la performance et réaliséé/produite par David Fincher, l’un des meilleurs réalisateurs hollywoodiens. Il y a une tonne d’argent sur l’écran dans House of Cards – produite par Media Rights Capital et lancé avec un investissement de 100 millions de dollars pour les deux premières saisons de 13 épisodes. La concurrence a de quoi trembler

Co – créée et écrite par Beau Willimon (The Ides de Mars), House of Cards est un spectacle qui pousse à la réflexion. Washington est représentée ici pour ce qu’elle est, une force centrale, nébuleuse, mafieuse qui, dans cette série politique, ne vieillit jamais. Le générique à lui seul vaut le détour.

La série se concentre sur le « whip » de la majorité. Francis Underwood (Spacey), un affairiste qui a fourni l’essentiel de son temps à soutenir le nouveau président Garrett Walker (Michael Gill) à être élu. Il prépare aussi son entrée au gouvernement, plaçant ainsi Linda Vasquez (Sakina Jaffrey) comme chef de cabinet, ce qui lui permettra d’avoir accès au bureau ovale. Le poste de Secrétaire d’État lui est promis. Mais il y a un seul problème… dès l’investiture, Linda, intraitable, annonce à Franck (son diminutif) que le Président veut qu’il reste là où il est, car il serait plus utile pour aider à défendre les futures nouvelles législations

Amèrement déçu, Francis décide tout simplement de tout écraser sur son passage. Sa femme tout aussi complice et avide de pouvoir, Claire (Robin Wright), ne permettra pas qu’il subisse cet affront : « Mon mari ne s’excuse pas, même pour moi. » déclare-t-elle. Leur connexion principale semble être qu’ils recherchent pouvoir et influence plus que tout autre couple, s’en nourrissant d’une façon presque érotique. Elle aussi est agacée par la tournure des évènements, utilisant son ONG comme un plan com’ pour la carrière de son mari. Pragmatique, il ne faut pas longtemps pour se remettre et savourer sa vengeance.

Aucune once de regret, Frank veut prouver où le pouvoir réel repose si une personne rancunière et manipulatrice peut déplacer tous les obstacles pour y parvenir. Il y a aussi Frank qui parle directement à la caméra, l’un des choix stylistiques les plus risqués pour toute série et il s’en sort bien, avec un aplomb plein de morgue qui n’est pas sans rappeler Don Cheadle, encore un autre acteur fantastique et magnétique, dans House of Lies pour la chaîne Showtime.

Dans House of Cards, Spacey donne la pleine mesure de son talent. Son dialogue transpire le mépris ou le dédain calme d’un homme qui a déjà mis en branle des événements destructeurs pour les autres et qui sait avant tout le monde les retombées qui sont sur le point de se produire. Pendant ce temps, la performance de Robin Wright est un mélange unique de puissance, celle d’une reine de glace fidèle et égale. Claire imprime la rétine et glace la pupille en soulevant les sens.

La série est une leçon de politique sur les méandres du pouvoir et le chemin, loin des sentiers moraux, qui mène au sommet. Élus, lobbyistes et autres manipulateurs participent à ce jeu de massacre où le prédateur le plus cruel l’emporte. Pour Francis, tirer les ficelles qui écrasent les plans les mieux conçus de l’Administration nécessitent un temps et son équipe le suit jusqu’au bout. Son chef de cabinet, Doug Stamper (Michael Kelly), est un « consigliere » digne de sa fonction. Lui et Francis ont besoin d’un soldat fidèle qui suit les ordres et en trouver un dans le Congrès, Peter Russo (Corey Stoll), animé par une propension pour les femmes, l’alcool et les drogues, leur permettent d’en faire ce qu’ils veulent….

La série choque, interpelle et livre, sans fard, la réalité de la politique entre pouvoir, sexe, trahison, violence et hypocrisie sociale. La saison 2 vient tout juste d’être livrée d’un coup par Netflix, le 14 février… le jour de la Saint-Valentin…

F.B

*House of cards, saison 2

 

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