Sihem Ben Sedrine et l’art de la contradiction

Après une pluie de points d’ordres et des interventions de députés à tout-va, Sihem Ben Sedrine, présidente de l’Instance Vérité Dignité (IVD) s’est finalement exprimée devant l’Assemblée des Représentants du Peuple (ARP) ce lundi 26 mars 2018, à l’occasion de la plénière consacrée au prolongement du mandat de l’Instance.
Le discours de la présidente était teinté d’une arrogance et d’une assurance manifestes, à travers lesquelles elle a souhaité, selon ses termes, « ne pas répondre aux discours de la haine ». « Je serai au-dessus de tout cela », a-t-elle insisté, ajoutant, sur un ton de provocation, que ceux qui critiquent sont ceux qui ont des lacunes à combler, et qu’elle n’en avait pas.
Tout au long de son discours, Sihem Ben Sedrine a plus d’une fois évoqué le prestige de l’Etat et la nécessité de respecter toutes ses institutions dans le cadre de la démocratie. « La vérité fait mal et parfois, on veut fermer les yeux devant elle. Les responsables doivent être interrogés, admettre leurs erreurs et demander pardon. Nous voulons la réconciliation », a-t-elle déclaré.
Après avoir justifié la décision du conseil de l’IVD relative à la prolongation de son mandat d’un an, conformément à la loi fondamentale sur la justice transitionnelle, Sihem Ben Sedrine a brandi ses piques à l’encontre de l’ARP, notamment sur la questions des vacances à l’IVD. « Nous avons envoyé plusieurs correspondances à l’ARP à ce sujet », a-t-elle noté, affirmant, dans ce même contexte, que plusieurs appareils de l’Etat ont constitué une entrave au travail de son instance, à savoir le ministère de l’Intérieur, le Tribunal Militaire et le ministère des Domaines de l’Etat.
L’IVD, poursuit Sihem Ben Sedrine, a presque atteint la fin de son travail, mais c’est un travail qui, selon elle, a été entravé par les institutions qu’elle a citées. « Les responsables de ces institutions auraient dû être auditionnés par l’ARP », a-t-elle souligné, déclarant, par la suite, qu’il sera difficile pour l’IVD de finir son travail dans les délais, à savoir mai 2018, ce qui justifie, rappelle-t-elle, la décision du conseil de prolonger d’un an le mandat de l’Instance. « L’IVD promet de lever le voile sur toute la vérité. La réconciliation, pour sa part, sera réalisée, et la victoire sera nôtre si Dieu le veut ! », a-t-elle conclu.

Faîtes ce que je dis, pas ce que je fais
Dans une posture de donneuse de leçons, la présidente de l’IVD semble avoir oublié plusieurs points, notamment en ce qui concerne le prestige de l’Etat qu’elle a vanté tout au long de son discours. Elle oublie qu’elle-même a piétiné ce prestige et les institutions qui l’incarnent à plus d’une reprise, notamment en refusant d’appliquer les décisions du Tribunal Administratif. D’ailleurs, c’est un point qui a été soulevé juste après son discours par Mohamed Troudi, député du bloc parlementaire Al Horra de Machrou3 Tounes.
L’autre point sur lequel Sihem Ben Sedrine s’était faite griller est relatif aux vacances au sein de son Instance. Les membres manquants, rappelons-le, ont été élus par l’ARP comme tous les autres. Les vacances ont été provoquées par le renvoi, par décision de Ben Sedrine, de deux membres dissidents. Or, elle ne pouvait, dans les règles de l’art, les renvoyer, étant donné qu’ils ont été élus. Ce sont ces mêmes membres qui auraient dû reprendre leurs fonctions par décision du Tribunal Administratif… complètement ignorée par la présidente de l’IVD. De quel prestige et de quel Etat parle-telle ?

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